REPORTAGE VIDÉO - Ce 1er mai 2020, jour de la fête du Travail, n'a décidément ressemblé à aucun autre. Toute manifestation étant interdite en raison des règles de confinement, les syndicats appelaient les Français à « manifester aux balcons » et sur les réseaux sociaux. Ce qui n'a pas empêché certains de perpétuer la tradition syndicale en organisant de modestes rassemblements à Grenoble.
Un 1er mai sans manifestation ni quasiment de brins de muguet au coin des rues… De mémoire de Grenoblois, cela ne s'était jamais vu. Confinement oblige, tout rassemblement était en effet interdit au nom de la lutte contre le virus Covid-19, à Grenoble comme partout ailleurs.
Dans ce contexte inédit, syndicats et partis politiques ont dû changer leur fusil d'épaule. Certains appelaient ainsi leurs militants à une mobilisation en ligne et aux balcons « pour rendre leur colère visible ». Mais, vu la dispersion des initiatives, difficile d'évaluer si les citoyens ont massivement suivi le mouvement. Une chose est sûre, en l'absence de tout cortège, le traditionnel conflit de comptage des manifestants entre syndicats et autorités n'a pas eu lieu !
Faute de manifestation, les syndicats ont investi les réseaux sociaux
En Isère, les syndicats ont investi les réseaux sociaux pour diffuser en direct un discours intersyndical à plusieurs voix ou leurs propres vidéos, comme la CGT et Solidaires. Parmi les mots d'ordre ? "Plus jamais ça ! Construisons ensemble un jour d’après démocratique, écologique, féministe et social."
Le fameux « jour d'après »… ou plutôt tous ceux qui vont suivre la fin du confinement. C'est bien ce qu'envisageait l'événement Facebook. Celui-ci proposait notamment aux manifestants virtuels de signer une pétition en ligne. L'objectif ? Demander au gouvernement de prendre des "mesures de rupture" et d'engager des politiques publiques "pour ne plus jamais revivre ça ».
Plusieurs gardes à vue pour "organisation de manifestation illicite"
Certains ont tout de même tenu à perpétuer la tradition syndicale en organisant de modestes rassemblements en différents lieux de Grenoble. Ainsi, quelques dizaines de militants de Sud, Solidaires et de la CNT accompagnés de gilets jaunes et de sympathisants se sont-ils regroupés sur les places Saint-Bruno et de la Cimaise, quartier Saint-Laurent.
Le tout en respectant au mieux les consignes de distanciation sociale, toujours en vigueur en ce vendredi 1er mai.
« Nous ne confinerons pas notre colère », avertissait quelques affiches du Mouvement du jour d'après qui avaient fleuri la veille sur quelques murs de la ville.
Des regroupements qui ont tourné court. Les policiers, intervenus en nombre, ont en effet placé trois militants en garde à vue pour "organisation de manifestation illicite ». Et plusieurs participants ont écopé d'une amende de 135 euros « pour non-respect du confinement ». Retour en images sur quelques séquences de ce drôle de 1er mai à Grenoble.
En fin de journée, Éric Vaillant, procureur de la République de Grenoble, a toutefois annoncé la levée des gardes à vue. « [les manifestants] ont fait l'objet d'une verbalisation à 135 euros pour non-respect du confinement et d'un rappel à la loi », a indiqué le procureur. Idem pour l'épouse d'un des organisateurs qui, elle, « a été entendue hors garde à vue », a-t-il précisé.
La CNT va contester ces amendes, jugées abusives
Les syndicats de l’union départementale 38 de la CNT s’insurgent, pour leur part, "contre les intimidations, les arrestations et les verbalisations dont les travailleuses et travailleurs ont été victimes ce premier mai à Grenoble. Des dizaines d’amendes et des arrestations contre des militant-e-s qui n’enfreignaient aucune règle de distanciation physique, c’est une atteinte arbitraire aux libertés fondamentales […], jugent-ils dans un communiqué, publié ce samedi 2 mai.
Ils font d'ailleurs savoir qu'ils contesteront ces amendes, jugées abusives, et seront solidaires "sur le plan politique et financier" des personnes inquiétées et verbalisées.
"[…] comme syndicalistes nous ne pouvons supporter qu’une loi “d’état d’urgence sanitaire” prenne le prétexte d’une pandémie pour attaquer les droits des salarié-e-s et nos libertés politiques fondamentales."
Et d'enfoncer le clou : "Le pouvoir politique prétend protéger la population en interdisant la manifestation d’opinion dans la rue, tout en ouvrant les écoles contre l’avis des organismes sanitaires officiels pour pousser la population à reprendre le travail par tous les moyens, y compris quand les conditions de travail sont objectivement dangereuses."
Joël Kermabon