EN BREF — Alors que la préfecture de l’Isère a accordé une dérogation pour la réouverture des marchés grenoblois, les commerçants du marché de l’Estacade comprennent mal les restrictions imposées. Et se demandent pourquoi les grandes surfaces ont, elles, toujours le droit de vendre leurs produits.
« Encore un mois et je suis à la rue ! » Ce constat, c’est Antonio qui le dresse. Revendeur de produits frais et de salaisons sur le marché de l’Estacade à Grenoble, il fait pourtant partie des commerçants qui ont eu le droit de déballer ce vendredi 27 mars au matin. La règle : pas plus de cinq commerçants par marché et une distance de 5 mètres entre les étals. Des mesures obligatoires pour que la Ville de Grenoble ait pu obtenir une dérogation d’ouverture pour ses marchés.
Cinq commerçants seulement ? Certains craignaient la cohue au petit matin. Au final, les placiers de Grenoble ont appelé la veille au soir les commerçants retenus. Mais attention : ceux qui ont déballé ce vendredi ne pourront pas déballer le week-end. Les différents étals n’ont en effet droit qu’à un jour de présence par semaine. Or, « une fois par semaine, ça écoule la marchandise mais ça ne fait rien gagner », estime Antonio.
L’incompréhension des commerçants
Sans surprise, l’incompréhension prédomine parmi les commerçants présents. Tous estiment que le marché s’est déroulé sans encombres la semaine dernière, avec le respect des règles en vigueur par temps d’épidémie. « La distance entre les gens, ils l’avaient bien comprise ! », souligne ainsi Jean-Loup, fromager. Lui aussi écoule aujourd’hui son stock. Et a noté une diminution de son chiffre d’affaires de moitié lors du dernier week-end.
Pour beaucoup, les commerçants des marchés de province payent pour les abus observés dans de grands marchés parisiens, tout en pesant bien peu face aux grandes surfaces. Auto-proclamé « grande gueule » du marché, Jeannot ne décolère pas contre la grande distribution : « Aujourd’hui, les grandes surfaces se gavent et, nous, on continue à crever de faim. C’est une atteinte à la liberté de travailler et un non-respect des lois sur la concurrence ! »
Auto-entrepreneur, Antonio comme d’autres espère des aides de l’État… sans se faire beaucoup d’illusions. « Les 300 milliards [annoncés par Emmanuel Macron pour soutenir l’économie, ndlr], ils vont partir chez les gros. On n’en verra pas la couleur ! », assure-t-il par avance. Tout un symbole ? L’une des places laissée libre du marché est utilisée… par le camion venant ravitailler le magasin U avenue de Vizille, qui reste ouvert sept jours sur sept.