TROIS QUESTIONS À — Le Codase (Comité dauphinois d’action socio-éducative) vient de célébrer son soixantième anniversaire. Retour sur les activités d’une association résolument tournée vers la protection de l’enfance sous toutes ses formes, avec sa présidente Annie Deschamps, ancienne première adjointe de Michel Destot à Grenoble et ancienne conseillère générale de l’Isère.
Le Codase : 300 salariés qualifiés
Association loi 1901, le Codase compte des services de prises en charge d’enfants ou d’adolescents, d’addictologie, de prévention spécialisée, d’enquêtes sur le profil de jeunes en difficulté ou encore d’accompagnement au droit de visite. Si le conseil d’administration de la structure est intégralement composé de bénévoles, l’association sur le terrain compte 300 salariés qualifiés qui vont au contact des jeunes et des familles. Ses valeurs ? « Inconditionnalité de l’accueil, engagement citoyen et laïcité républicaine. »
Place Gre’net – Le Codase fête cette année les 60 ans de l’ouverture de son tout premier service, en 1959. D’où provient cette association, et quelle a été son évolution au fil des décennies ?
Annie Deschamps – C’est une association issue de tous les gens de la Résistance. Initialement, elle a été créée complètement indépendante de tout, simplement parce que des gens constataient que beaucoup de jeunes après la guerre étaient délaissés, n’avaient plus de familles. Ou bien des familles en grande difficulté, qui n’étaient pas capables de s’occuper de leurs enfants. Et progressivement, cela a été pris en charge par l’État, qui a demandé à un certain nombre d’associations caritatives comme le Codase de créer des services.
Au moment de la décentralisation en 1981, la Protection de l’enfance a été confiée aux Départements. À partir de là, ils ont structuré leurs actions concernant cette compétence de plus en plus importante. Au départ, les enfants en grande difficulté étaient souvent placés dans des familles ou des établissements, et puis progressivement il y eu des mesures éducatives en milieu ouvert.
Nous avons développé beaucoup plus de services spécialisés, par la mise en place par exemple de ce que l’on appelle la prévention spécialisée. Nous avons un service d’addictologie important, à la fois sur Grenoble, sur le voironnais et sur Saint-Marcellin. Il y aussi un service de soutien à la parentalité, qui fait des visites médiatisées, etc.
Nous évoluons avec les demandes de la société. Quand on parle d’addictologie, il y a celle à l’alcool, à la drogue, mais aussi aux jeux vidéos. On travaille beaucoup avec des jeunes de moins de 18 ans qui ont une dépendance aux jeux vidéos. Cela se développe en fonction de ce qu’on voit arriver dans notre société.
Vous travaillez donc principalement avec le Conseil départemental de l’Isère ?
Le Département est le principal financeur, de par sa responsabilité de Protection de l’enfance. Mais nous travaillons un peu avec le partenaire Justice. Les mesures pour les jeunes sont décidées soit par le juge des enfants, soit par les services sociaux du Conseil départemental.
S’il y a décision du juge, c’est qu’il y a action en justice parce que les enfants subissaient des choses importantes, ou parce qu’il y a séparation dans la famille et qu’il y a besoin de trouver une solution. Quant au service d’addictologie, à la fois sur Grenoble, sur le Voironnais et sur Saint-Marcellin, il est payé par l’Agence régionale de santé (ARS), donc l’État.
Nous intervenons sur l’ensemble du département, avec une prédominance sur l’agglomération grenobloise, le Pays Voironnais et le Sud-Grésivaudan. Le seul territoire du département sur lequel le Codase n’intervient pas, c’est la commune de Vienne. Par exemple, une action d’éducateurs de rue a été mise en place dans des quartiers un peu difficiles, mais même maintenant dans le Pays Voironnais ou à Saint-Marcellin.
La question de la grande précarité ou encore celle des mineurs non accompagnées font partie des préoccupations qui s’imposent désormais dans le débat public. Quelles seront les prochaines orientations du Codase dans les années à venir ?
Vous parlez de la pauvreté… Le Codase n’est pas directement responsable de cela, mais les services sociaux du Département ont des relations soit avec des familles, soit avec des jeunes par rapport à ce problème. C’est ensuite la décision du Conseil départemental de dire s’il vaut mieux placer un enfant. Ou aider la famille à retrouver une forme de vie normale, en lui apprenant par exemple à ne pas forcément dépenser n’importe comment. Ce sont d’abord les services sociaux qui repèrent les problèmes.
Pour ce qui concerne les mineurs non accompagnés, le Département vient justement de lancer un appel d’offre en Isère pour en accueillir mille par an. Le Codase a répondu, avec d’autres associations qui font le même genre de travail ou qui sont complémentaires avec ce que nous faisons.
Nous faisons partie d’un collectif, Réseau 38, qui relie toutes les associations travaillant dans la protection de l’enfance. Toutes n’ont pas dit qu’elles voulaient y aller, mais celles qui sont volontaires ont répondu sur l’appel d’offre. Mais nous ne savons pas si nous serons retenus !