FOCUS – Une centaine de personnes se sont rassemblées devant le TGI de Grenoble, ce lundi 16 septembre, en soutien à six gilets jaunes appelés à comparaître. Elles répondaient ainsi à l’appel du collectif anti-répression de Grenoble, en lutte contre les violences policières. Mais l’audience a tourné court après les demandes de renvoi systématiques des avocats en grève pour la défense de leur régime de retraite.
Une centaine de personnes se sont rassemblées, ce lundi 16 septembre à midi, devant le palais de justice de Grenoble à l’appel du collectif anti-répression de Grenoble (Car38). Un rassemblement en soutien à six manifestants gilets jaunes, appelés à comparaître en audience correctionnelle.
Que leur reproche donc la justice ? De n’avoir pas obtempéré aux ordres de la police. À savoir ? « Être restés sans arme dans un attroupement après sommation de dispersion » lors des violences qui ont émaillé la manifestation du 1er mai.
Dans la petite foule, nombre de gilets jaunes bien sûr, des syndicalistes de Solidaires, de la CNT ou de la CGT et des militants associatifs, avec le renfort de nombreux sympathisants du Car38. Tous attendent, dans le plus grand calme, le début de l’audience prévu pour 13 h 30.
« Les seules réponses du gouvernement ? La matraque et les décisions de justice ! »
Durant l’attente sur le parvis du palais de justice, nous rencontrons Benjamin Moisset, syndicaliste Solidaires et membre du Car38. Ce dernier revient sur les événements du 1er mai. « Nous considérons qu’il y a eu un ordre national de réprimer violemment la mobilisation des gilets jaunes », explique-t-il.
« Les seules réponses du gouvernement ? La matraque et les décisions de justice ! », déplore le jeune militant. Un constat sévère qui reflète bien l’état d’esprit du collectif Car38 dans son appel.
En substance ? « Si des violences ont été commises par des manifestants contre des biens, des institutions, des personnes, en aucun cas elles ne justifient que l’exécutif s’arroge des pouvoirs exorbitants et des méthodes de répression disproportionnées. »
« Une répression judiciaire qui frappe de plus en plus de manifestants »
Le procès des six gilets jaunes, qui intervient au terme d’une « semaine contre la répression » organisée par le collectif, prend l’allure d’une tribune contre les violences policières. « Nous souhaitons alerter sur l’accélération de la répression policière dans les quartiers populaires et lors des mouvements sociaux depuis 2013 », déclare Benjamin Moisset.
Le syndicaliste va même plus loin, en dénonçant également la « répression judiciaire qui frappe de plus en plus de manifestants ». Une pression qui s’exerce, explique-t-il, à travers des amendes mais aussi de la prison avec sursis « voire ferme ». Et ce, surtout, précise le militant, « depuis le début du mouvement des gilets jaunes ».
Agnès, éducatrice spécialisée, l’une des six prévenus, semble à peu près sereine pour ce procès. « Nous avons plein de témoins car une bonne centaine de personnes étaient présentes. Elles aussi ont été victimes des lacrymogènes et des coups de matraque. Elles peuvent témoigner qu’il n’y a pas eu de sommations », assure-t-elle. Et quand bien même, se souvient Agnès, « il était impossible que l’on se disperse puisque nous étions “nassés” par la police. Aucune issue n’était possible ! »
Les avocats en grève demandent le renvoi du procès de leurs clients
L’heure venue, la salle d’audience numéro cinq s’emplit peu à peu jusqu’à l’arrivée de la cour. Tout pouvait alors sembler normal mais ce serait oublier que les avocats du barreau de Grenoble étaient en grève. En cause ? La défense de leur régime de retraite menacé par le projet de réforme en cours.
Une représentante des robes noires présentes vient solennellement lire une déclaration de l’assemblée générale du barreau de Grenoble à la barre.
Avant de déclarer qu’elle et tous ses confrères ont l’intention de demander le renvoi des affaires dont les gilets jaunes leur ont confié la charge. Ce dont la présidente, conciliante, va prendre acte.
Autant dire qu’à partir de ce moment le procès va tourner court. Le résultat ? Cinq des six prévenus ont vu leur affaire renvoyée au 20 janvier 2020. La cour ne s’est intéressée qu’au sixième prévenu qui, comparaissant sans le secours d’un avocat, ne pouvait demander l’ajournement. Dans son réquisitoire, le procureur a requis une peine de 400 euros d’amende assortie d’un sursis. Une peine qui, pour l’heure, reste en suspens puisque le tribunal ne rendra son jugement que le 30 septembre.
Joël Kermabon