REPORTAGE – La campagne estivale des Espaces naturels sensibles (ENS) est bel et bien lancée en Isère. Au programme, 170 animations et événements gratuits à découvrir sur une trentaine de sites naturels, jusqu’au 22 septembre prochain. Visite guidée au bois de la Bâtie, dans les environs de Meylan, en compagnie d’une vingtaine d’animateurs et de Fabien Mulyk, vice-président du Département de l’Isère, chargé des ENS et de l’environnement.
Nous étions prévenus. À l’entrée de l’Espace naturel sensible du bois de la Bâtie, dans les environs de Meylan, un panneau avertit les visiteurs : « Accès déconseillé en cas de vents violents ».
En ce jour de mai, la météo est clémente. Mais la nature porte les marques du temps agité des semaines précédentes. En témoignent un arbre allongé et ses racines hors du sol, aux abords du sentier qui pénètre dans le bois.
Nous sommes à dix minutes du centre-ville, et pourtant déjà en pleine nature. Fabien Mulyk, chargé des ENS pour le Département, résume l’esprit de ces espaces naturels : « Il s’agit de prendre conscience de la biodiversité, sans la sacraliser. »
Le bois de la Bâtie s’étend sur 110 hectares, avec un sentier aménagé qui longe l’étang du même nom. La masse d’eau a profité de l’évolution plus ou moins naturelle de l’Isère – ou de son « reprofilage », comme nous l’explique l’équipe d’animateurs –, pour se nicher dans un de ses anciens méandres.
Les bienfaits du sureau noir et de la bardane
Nous nous arrêtons aux abords d’un majestueux peuplier pour une première animation et une comparaison des différents tracés de l’Isère. Un peu plus loin, un petit marécage révèle l’abondance passée des zones humides, très courantes en France au Moyen-Âge.
Surprise : des iris des marais y ont poussé. Ce serait, paraît-il, la véritable origine de la fleur de lys des rois de France. Après avoir traversé un verger, sublimé par une éclaircie, l’équipe nous présente les bienfaits du sureau noir et de la bardane, l’un pour soigner l’état grippal, l’autre utilisée encore aujourd’hui comme shampooing.
Il faut continuer la balade pour apprécier la richesse de la biodiversité. Cette fois-ci en silence, pour écouter les oiseaux, nombreux dans les parages. Une cinquantaine se sont installés dans les environs.
Clou de la visite, alors que le guide leur présente la différence entre le héron cendré et le héron pourpré, les visiteurs assistent à un spectacle peu ordinaire : une canne s’est fait attraper la patte par un brochet. Oui, nous sommes bien à deux minutes de la sortie 24 – 1 de l’A41, dans le sens Grenoble-Chambéry. Difficile de faire plus simple d’accès.
L’an dernier, 14 000 visiteurs ont participé aux animations sur les ENS isérois
La succès des espaces naturels sensibles isérois ne se dément pas. Le Département estime ainsi à 14 000 le nombre de visiteurs qui ont participé aux animations dispensées gratuitement sur l’ensemble des sites ENS en 2018.
Quelques 20 000 élèves se sont par ailleurs rendus sur les lieux cette même année et 4 000 personnes n’ayant pas ou peu accès à la nature ont pu profiter de cette campagne.
N’y a‑t-il pas un risque de sur-fréquentation ? Pour Fabien Mulyk, il s’agit d’« aménager pour canaliser le public et préserver d’autres zones ». Et la nature est une thérapie efficace dont il serait dommage de se priver.
« Une bouffée d’oxygène »
Antoine Bariffaud, animateur nature sur le secteur de Vienne, a l’habitude de s’occuper des visites dans leur dimension sociale. Il conduit sur place des personnes en situation précaire, des enfants ou des personnes âgés en balade.
« On obtient des résultats très intéressants. », assure-t-il. Vécue comme une véritable « bouffée d’oxygène », la rencontre avec le vivant est souvent source d’une « très forte émotion », confirme Nathalie de Yparraguirre, coordinatrice au sein du service patrimoine du Département.
Kenan, 9 ans, en a déjà appris beaucoup. Venu avec sa classe d’Ulis de l’école de Goncelin, il n’a déjà plus besoin des explications des animateurs. « Les castors ont rongé tout l’arbre, et ce qui reste, on appelle ça un crayon. Mais on ne peut pas voir ces animaux le jour, seulement la nuit », explique-t-il. Avant de repartir les yeux et la tête pleine de nature.
Antoine Beau
Le programme des animations est à retrouver sur le site d’Isère Tourisme.