FOCUS – Une cinquantaine de personnes se sont réunies, rue Félix-Poulat à Grenoble, pour la journée internationale du souvenir trans, mardi 20 novembre, à l’appel de l’association Rita. L’occasion de rappeler les discriminations dont sont victimes les personnes transgenres et, plus largement, la communauté LGBTI.
Rendre hommage à toutes les personnes tuées au motif de la transphobie. Tel était l’objectif de la petite cinquantaine de personnes rassemblées rue Félix-Poulat à Grenoble, pour la journée internationale du souvenir trans, ce mardi 20 novembre.
Une commémoration nourrie par l’actualité française et internationale. Dans la nuit du 16 au 17 août 2018, Vanessa Campos – une travailleuse du sexe péruvienne et transgenre – a en effet été assassinée par une bande d’hommes armés au Bois de Bologne à Paris.
Ce crime n’est pas un cas isolé : près de 300 meurtres contre la communauté transgenre ont été recensés en 2017. Les associations nationales et locales dénoncent ainsi « l’indifférence » des autorités publiques et les discriminations omniprésentes dont sont victimes les personnes transgenres.
« Les communautés trans sont toujours en proie à de grandes difficultés »
« Les communautés trans sont toujours en proie à de grandes difficultés », assure Basile, aux côtés de Max et Raphaël, membres de l’association grenobloise Rita (Ressort intersexe et trans en action).
Parmi ces discriminations, des accès difficiles au travail, au logement et aux soins. « Les mesures mises en place ne permettent pas toujours d’avoir accès aux minimas sociaux », affirment-ils. D’autant plus que ces injustices se trouvent au « carrefour d’autres discriminations », telles que l’homophobie ou le sexisme.
La transphobie s’exprime par un rejet des personnes transgenres. Une peur qui peut passer par « l’ignorance, les violences, les insultes, le harcèlement », poursuit Basile. Il est parfois difficile de « faire valoir que notre identité est bien la nôtre ». Et de faire comprendre aux employeurs notamment que « l’identité physique et psychique ne correspond pas toujours au genre sur la carte d’identité », explique le bénévole de Rita.
Accueil des personnes et lutte contre la transphobie
L’association Rita a été fondée en 2016. Ambition affichée ? Accompagner les personnes transgenres et changer le regard de la société sur elles. Elle préfère d’ailleurs le terme de “transidentités” à celui de “transsexualité”, perçu comme « dégradant et péjoratif ».
La raison ? Ce dernier terme renvoyait à un trouble psychiatrique jusqu’en mai 2010. La France avait alors réalisé une « avancée historique », en abandonnant cette qualification.
De plus, le terme “transsexuel” serait susceptible de « sexualiser » les personnes trans. Enfin, il induirait une confusion entre sexualité et identité. En effet, « les personnes trans se définissent par rapport à leur identité de genre, leur psychisme » et non par rapport à leur sexe de naissance, expliquent les membres de Rita.
Cette association porte trois types d’actions. Elle coordonne des événements de sensibilisation et de soutien. Elle organise des permanences pour les personnes concernées deux fois par mois au Planning familial de l’Isère et au centre LGBTI. Ainsi que des permanences trimestrielles à destination de leurs proches (enfants, parents, conjoint etc). Enfin, Rita forme des professionnels du milieu médical, para-médical et social. Objectif ? Étoffer un réseau de partenaires. Et « avoir accès à un personnel bienveillant, respectueux, non intrusif, formé à l’accueil des personnes trans », répond l’association.
Création d’un poste au sein du Planning familial
Grâce à plusieurs financements – notamment par la Ville de Grenoble et la Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT (Dilcrah) –, l’association Rita a réussi à créer un poste de travailleur social au sein du Planning familial de l’Isère.
Max est ainsi chargé de coordonner les actions menées entre les différents partenaires. Mais aussi d’écouter, d’accompagner et d’orienter les personnes concernées et leur famille dans leur parcours. « Nous accueillons des personnes âgées entre 8 et 80 ans », explique-t-il.
« C’est un poste inédit en France », se réjouissent les membres de Rita. Toutefois, ce poste existe seulement trois à quatre mois par an, le reste du travail étant bénévole. L’association espère ainsi qu’il pourra être pérennisé, et les permanences de plus en plus fréquentes. « On va se battre pour que ça continue », affirment-ils.
« Il est important d’avoir des locaux adaptés, qui permettent la confidentialité. Mais aussi des gens salariés qui connaissent la situation et qui la vivent eux-mêmes », estime Marina Girod de l’Ain, ajointe au maire, présente le 20 novembre. « C’est une journée importante pour la Ville de Grenoble, de souvenir et de lutte contre toutes les discriminations. Elle montre que nous devons rester vigilants et apporter tout notre soutien aux associations », conclut l’élue.
Anaïs Mariotti
* Le Transgender Day of Remembrance (TDoR) a été instauré par Gwendolyn Ann Smith, une éditorialiste, graphiste et militante trans, suite au meurtre transphobe de Rita Hester, tuée le 28 novembre 1998 dans le Massachusetts (USA). Il s’agissait initialement d’un projet web qui a progressivement évolué en journée d’action internationale.
Vous avez dit transgenre ?
Une personne transgenre adopte une apparence, une attitude et un mode de vie d’un sexe différent à son sexe de naissance. En d’autres termes, son identité psychique et physique ne correspond pas toujours à son identité civile. Il existe une multitude de parcours de transition (avec ou sans hormones, avec ou sans chirurgie).
Cette « constellation d’identités » ne permet pas de « classifier » ces personnes dans une « seule catégorie stéréotypée », affirme l’association Rita. De ce fait, contrairement à certains stéréotypes, une personne trans peut être hétérosexuelle, tout comme homosexuelle, bisexuelle ou asexuelle.