FOCUS – La démission de Nicolas Hulot de son poste de ministre de la Transition écologique et solidaire a surpris, et suscité nombre de commentaires. Les élus isérois et régionaux ne sont pas en reste, depuis la réaction du maire de Grenoble Éric Piolle jusqu’aux réponses, parfois divergentes, des députés En marche.
La démission “surprise” de Nicolas Hulot du gouvernement, annoncée en direct durant la matinale de France Inter, a suscité une véritable onde de choc médiatique et politique à laquelle ont pris part nombre d’élus locaux. À commencer par le maire de Grenoble qui, quelques heures après l’annonce, organisait une conférence de presse pour faire connaître sa réaction.
Saluant « le courage et la sincérité » du désormais ex-ministre, Éric Piolle veut faire de cette démission le signal qu’un rassemblement des forces est nécessaire. « Je lance un appel aux élus, aux formations politiques, de ne pas laisser les institutions à ces cyniques », déclare-t-il en désignant le gouvernement. Tout en se tournant vers la « société civile », mentionnant les mouvements Attac ou Alternatiba, présents lors de l’Université d’été rebelle et solidaire.
Grenoble, terreau d’une refondation écologiste ?
Grenoble, terreau d’une union faisant la force ? L’édile veut y croire. « Je suis prêt à les accueillir ! Les Grenobloises et les Grenoblois sont prêts à les accueillir pour échanger autour de cela ! », clame Éric Piolle. Pour lui, aucun doute : la transformation viendra des villes, qui ont « une capacité à être moins sujettes aux lobbys ». Et plus encore de Grenoble, « où, historiquement, les humanistes savent produire ensemble pour le bien commun ».
Dans une même lignée idéologique, les élus d’opposition à la Région RCES (Rassemblement citoyens, écologistes et solidaires) saluent la « lucidité » de Nicolas Hulot. Et jugent que « ni M. Macron ni son équipe n’avait pris la moindre conscience de l’ampleur des enjeux ». Rappelant qu’une réunion avec les chasseurs a précipité la démission du ministre, les élus établissent un parallèle avec la situation locale : « Ici, en Région, cela fait deux ans qu’au titre de la politique environnementale, des moyens démesurés sont donnés aux chasseurs », dénoncent-ils.
La trahison du nouveau monde ?
Les socialistes ne sont pas en reste. La députée de l’Isère Marie-Noëlle Battistel juge la démission de Nicolas Hulot « symptomatique du sentiment de trahison qui est partagé par tous ceux qui ont cru à la promesse du “nouveau monde” ».
Même tonalité chez l’ancien député Erwann Binet, qui décrit sur Facebook un exécutif « dont on peine encore, au bout d’une année, à entrevoir le sens et l’efficacité de l’action ».
À droite, c’est la sénatrice Les Républicains de l’Isère Frédérique Puissat qui a pris la plume. Très préoccupée par le Plan loup, l’élue évoque des prises de position de Nicolas Hulot qui « montrent clairement qu’il n’a pas été en capacité de mesurer l’importance de l’économie de montagne et la détresse des éleveurs ».
Et la sénatrice d’espérer un renouvellement ministériel permettant « de prendre davantage en compte notre économie de montagne ».
Côté En marche : des regrets… et un bilan
Restent les voix des marcheurs. Les députés de l’Isère Émilie Chalas, Catherine Kamowski et Olivier Véran ont chacun pris la parole dans trois communiqués distincts. Des communiqués qui reviennent sur le départ de l’une des figures d’importance du gouvernement d’Édouard Philippe, quitte à l’aborder parfois sous des angles bien différents.
Concordance des termes à relever, toutefois : les députés de la première et troisième circonscriptions de l’Isère « regrettent » la décision de Nicolas Hulot de quitter le ministère de la Transition écologique et solidaire. Émilie Chalas tient « à saluer son action au sein du gouvernement », tandis qu’Olivier Véran décrit « un ministre mobilisé, motivé et à l’écoute ». Notamment dans son soutien à l’amendement nutri-score défendu par le député… et rejeté par l’Assemblée nationale.
Autre constante : les trois parlementaires mettent en avant les “victoires” de Nicolas Hulot… pour mieux verdir le bilan de la majorité. Abandon du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, « part de bio dans les exploitations agricoles de 6 à 15 % », « lutte contre les pesticides et pour la biodiversité », « arrêt des centrales à charbon d’ici 2022 »… Les députés égrènent ce qu’ils considèrent comme des réussites.
Olivier Véran rejette toute « politique politicienne »
Les raisons mêmes de la démission de Nicolas Hulot ne sont quant à elles pas perçues de la même manière. Au risque de sembler donner des leçons, Émilie Chalas estime que « l’exercice du pouvoir est une question de pragmatisme et de compromis ». « On ne peut donc tout régler en un an mais il n’en reste pas moins que jamais autant n’a été fait pour l’écologie en un an », ajoute-t-elle. Une affirmation étonnante alors que l’ancien ministre de la Transition écologique a dit justement quitter son poste face au manque de réalisations effectives du gouvernement.
Son de cloche légèrement différent du côté de Catherine Kamowski, qui veut avant tout voir dans le départ de Nicolas Hulot « le choix d’un homme ». « Cette décision, personnelle et intime, lui appartient », écrit de façon lapidaire la députée de la cinquième circonscription de l’Isère, semblant vouloir vider la démission de Nicolas Hulot de toute dimension politique.
Un discours assez proche en somme de celui d’Olivier Véran, pour qui la démission de Nicolas Hulot « tient bien moins de la politique politicienne que de la volonté d’un homme de trouver une liberté nouvelle d’agir au service de ses combats ». Le parlementaire va même jusqu’à dénoncer « la récupération politique » de cet événement… pourtant hautement politique.
Le député de la première circonscription n’oublie d’ailleurs pas de citer nommément Éric Piolle. Et de dénoncer ce qui lui apparaît comme un « paradoxe » : « On voit des élus écologistes saluer aujourd’hui la démission de Nicolas Hulot comme une décision courageuse alors même qu’ils n’auront eu de cesse que de se démarquer de son action lorsqu’il était en capacité d’agir pour l’intérêt général », raille-t-il.
Le « combat » continue, pour les parlementaires
Les parlementaires concluent leurs communiqués en appelant au « combat ». Un « combat de fond », juge Émilie Chalas, qui doit dépasser les clivages politiques et commencer par « la prise de conscience de nos actes individuels ». Et la députée de la troisième circonscription de citer les mégots de cigarettes jetés sur les trottoirs, ou « notre consommation immodérée de viande, de plastiques ou d’hydrocarbures ».
Combat toujours, quand Catherine Kamowski s’affirme « plus que jamais déterminée à faire réussir la transformation de la France ». Tandis qu’Olivier Véran considère que « l’écologie n’est pas l’apanage d’individus ou de partis : c’est l’affaire de tous et de chacun ». Le député En marche affirme ainsi que l’urgence demeure… et que la démission du ministre de la Transition écologique « invite collectivement à faire davantage encore ».