FOCUS – Le Rassemblement national, le parti de Marine Le Pen, se dit au bord de la cessation de paiement après la saisie par la justice de deux millions d’euros d’aide publique dans le cadre de l’affaire des assistants présumés fictifs d’eurodéputés ex-FN. Les instances nationales et départementales du parti, qui crient à « l’assassinat politique », ont lancé un appel aux dons via un site internet dédié.
Deux millions d’euros, c’est presque la moitié de la somme totale, soit 4,5 millions d’euros, qu’aurait dû percevoir cette année le Rassemblement national (RN, ex-FN) de la part de l’État. Une somme versée au titre des subventions publiques que touchent toutes les formations politiques au prorata des scores réalisés lors des élections législatives.
Mais en ce début du mois de juillet, c’est la douche froide. Juste avant le premier versement, les juges d’instructions parisiens du pôle financier ont décidé de saisir deux millions d’euros à titre conservatoire. En cause : l’affaire dans laquelle l’ex-FN, le parti de Marine Le Pen, est suspecté d’avoir rémunéré des assistants sur des fonds européens. De quoi assécher rapidement les finances du parti qui risque de se retrouver en situation de cessation de paiement d’ici la fin de l’été.
Ce lundi 16 juillet, des représentants des instances de la fédération du RN de l’Isère ont relayé l’appel aux dons lancé en direction des militants et sympathisants du parti par Marine Le Pen dès l’annonce de cette saisie. L’objectif ? Pouvoir compenser cette perte financière dans toutes les fédérations, dont bien évidemment celle de l’Isère.
« Nous n’aurons plus la possibilité de payer nos charges et les salaires »
« Suite à cette décision des juges, le Rassemblement national risque de devoir mettre la clef sous la porte car nous n’aurons pas la possibilité de payer nos charges et nos salariés. On ne peut plus faire de tracts ou des affiches », déclare Alexis Jolly, conseiller régional RN Auvergne Rhône-Alpes et conseiller municipal d’Échirolles.
Ce dernier qui n’hésite pas à parler « d’entrée en dictature », fustige un pouvoir « qui ne parvient pas à nous faire taire par tous les moyens, notamment, en novembre dernier, en nous empêchant de détenir un compte dans une banque ».
Un coup de force sans base légale en l’absence de tout jugement estime quant à lui Bruno Desies, conseiller régional RN. « Si la loi conçue pour les trafiquants de drogue prévoit la saisie des biens provenant d’actes délictueux, en aucun cas cet argent ne provient d’un acte délictueux », s’indigne-t-il. Avant de compléter : « ils saisissent au nom du Parlement européen un revenu qui nous revient légitimement ».
Pour ce qui est des deux juges à l’origine de la confiscation, Alexis Jolly n’a pas de mots assez forts. « Il est inacceptable d’être jugés par des magistrats dont on sait qu’ils sont politisés et qu’ils nous combattent », déplore l’élu. Une allusion à peine voilée aux deux juges d’instruction, Claire Thepaut et Renaud Van Ruymbeke « qui ont décidé sans aucune condamnation d’un tribunal de confisquer notre dotation publique, et de tuer notre mouvement ! Ils nous appliquent la peine de mort à titre conservatoire », a déclaré, scandalisée, Marine Le Pen.
Un site internet d’appel aux dons
Pour tenter de se sortir de cette mauvaise passe et de se financer, le Rassemblement national a mis en place un site internet d’appel aux dons. « Nous demandons à tous ceux qui ont fait confiance à Marine Le Pen et, au-delà, à tous ceux qui sont attachés à la démocratie, à la liberté de penser, de pouvoir nous donner un petit coup de main, quelle que soit la somme, pour sauver le Rassemblement national d’ici la fin du mois d’août », explique Alexis Jolly.
La plateforme est opérationnelle depuis ce 9 juillet et les dons déjà enregistrés atteignent la somme de 200 000 euros, indique le conseiller régional qui précise « que ce n’est naturellement pas suffisant mais on s’accroche ! ».
D’ailleurs, outre l’appel aux dons, les militants ne se sont pas découragés puisqu’ils ont imprimé, « à partir de [leurs] ordinateurs personnels », insistent-ils, un tract. Qu’ils comptent bien distribuer sur les marchés pour alerter la population sur la situation tout autant que pour les inciter à la générosité.
Alexis Jolly ne revient pas de son étonnement. « Le RN est le premier parti d’opposition national, poursuit l’élu régional. Il est incroyable que l’on nous empêche de nous exprimer alors que partout en Europe nos idées sont gagnantes ».
Pourquoi cet empressement présumé du pouvoir à vouloir affaiblir le parti ? Alexis Jolly a sa petite idée. « Peut-être qu’à l’approche des élections européennes, le RN représente un danger pour la classe politique et tous ceux qui défendent l’Union européenne telle quelle. Peut-être qu’avec nos alliés européens nous pourrions être majoritaire dans le futur hémicycle du Parlement européen », pronostique-t-il.
Joël Kermabon