FOCUS – Visible jusqu’au 28 octobre prochain, la nouvelle exposition du musée de l’Ancien Évêché présente une mystérieuse bague ayant appartenu au dauphin Guigues VIII. Mais aussi le chemin pour le moins surprenant qu’a parcouru le joyau, avant qu’un Britannique ne la découvre par hasard.
La mystérieuse bague du dauphin Guigues VIII est en ce moment exposée au musée de l’Ancien Évêché. Le joyau et l’exposition qui lui est consacré sont visibles dès à présent et ce jusqu’au 28 octobre prochain.
Cette exposition arrive en même temps que les vingt ans du musée, comme le souligne Aymeric Perroy, directeur de la culture et du patrimoine du département de l’Isère. Voilà pourquoi il était « très important de pouvoir fêter cet anniversaire en relatant l’histoire du Dauphiné à travers cette magnifique bague et de pouvoir rappeler avec cette exposition que la mission première du musée est de faire connaître le patrimoine de l’Isère ».
L’exposition est exceptionnelle à bien des égards, comme l’a expliqué Isabelle Lazier, conservatrice en chef du patrimoine du Musée de l’Ancien Évêché, lors de la présentation de l’exposition. Il ne reste en effet quasiment pas de vestiges du patrimoine matériel des dauphins viennois. De sorte que la découverte de cette bague par un Britannique a été une sacrée surprise.
Le bague princière, ayant appartenu au dauphin Viennois et comte d’Albon Guigues VIII, porte les marques d’une réalisation typique du XIVe siècle.
Pourquoi Guigues VIII – qui a vécu très peu de temps, de 1309 à 1333 – a‑t-il possédé un tel joyau ? Parce que le jeune homme, promis en mariage à la fille du roi, a très vite été appelé à rejoindre la cour de France.
Une découverte à peine croyable
Personne ne s’attendait à la découverte de cette bague en or fin sertie d’un camée d’agate. C’est lors d’un séjour à Paris, il y a une dizaine d’années, en faisant le tour des antiquaires avec ses petits-enfants, que Jeffrey Cadby, collectionneur britannique et historien de la joaillerie, l’a trouvée, comme il l’a lui-même raconté lors de la présentation de l’exposition.
Chez un petit antiquaire vendant principalement des armes d’époque, se trouvait une mince collection de bijoux : au milieu, la fameuse bague de Guigues VIII. Remarquant la singularité de cette bague, Jeffrey Cadby demanda immédiatement des informations sur sa provenance à l’antiquaire, qui resta très évasif.
À travers son prix et le manque d’informations donné par le propriétaire de la boutique sur l’objet, le Britannique comprend que l’antiquaire ne sait pas qu’il a en sa possession une bague à grande charge historique.
Après avoir décrypté quelques jours plus tard l’inscription entourant le joyau – « Guigo dalphinus viennensis et albonis comes » – , il a effectué de longues recherches sur la bague et sa provenance pendant les années qui ont suivi.
Isabelle Lazier a quant à elle eu vent pour la première fois de l’existence de la bague durant l’été 2016. L’agent d’accueil du musée l’informa qu’un certain Jeffrey Cadby souhaitait lui montrer la bague de l’avant-dernier dauphin viennois. Sa première réaction fut l’étonnement : comment était-il possible d’avoir retrouvé la bague du dauphin Guigues VIII, alors que ces trois dynasties de dauphins n’avaient presque rien laissé derrière elles matériellement ? Quelques mois plus tard, devant l’insistance du Britannique et l’authenticité évidente de la bague, germait l’idée de cette exposition.
Une exposition basée sur le joyau, mais pas seulement
La présentation de ce joyau est également l’occasion de découvrir des objets médiévaux et une iconographie d’époque nous renvoyant à la vie au XIVe siècle. Car l’objectif n’était pas d’exposer la bague comme un bel objet d’art, mais bien comme un témoin de l’histoire de Guigues VIII et du Dauphiné. L’exposition revient donc d’abord sur l’expérience parisienne du dauphin et se concentre sur son retour dans le Dauphiné alors en guerre avec la Savoie.
Arbre chronologique, collection d’iconographie du XIVe siècle et d’objets d’époques… En parallèle de l’exposition, plusieurs animations festives seront proposées le samedi 28 juillet et le dimanche 21 octobre de 14 h 30 à 17 h 30. Une « plongée au cœur de l’époque médiévale » avec au programme, démonstrations de combats armés chorégraphiés, initiation au maniement des armes pour les enfants, ateliers de danse médiévale ou d’enluminure.
Cette exposition marque-t-elle la fin de l’histoire ? Pas sûr, à en croire Isabelle Lazier, la conservatrice en chef du patrimoine.
« L’étape suivante serait de trouver un historien médiéviste qui fasse une thèse sur Guigues VIII et qu’il trouve des documents prouvant de manière imparable l’authenticité de la bague. Car les historiens médiévistes ne croient que ce qu’ils voient. »
De fait, à ce jour, les historiens médiévistes n’ont trouvé aucune trace de possession de cette bague. Mais pas de doute pour Isabelle Lazier : « Je suis tout à fait persuadée que nous avons bien ici l’authentique bague du dauphin Guigues VIII ! »
Emilan Tutot