Meaghan Major, présidente de la délégation iséroise de l’association Femmes chefs d’entreprises (FCE). © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

L’entrepreneuriat fémi­nin, « une oppor­tu­nité socié­tale » pour Meaghan Major, pré­si­dente de Femmes chefs d’en­tre­prises Isère

L’entrepreneuriat fémi­nin, « une oppor­tu­nité socié­tale » pour Meaghan Major, pré­si­dente de Femmes chefs d’en­tre­prises Isère

ENTRETIEN – En pleine semaine de l’entrepreneuriat au fémi­nin et de la jour­née inter­na­tio­nale des droits des femmes, Meaghan Major, nou­velle pré­si­dente de la délé­ga­tion isé­roise de l’association Femmes chefs d’entreprises (FCE), nous explique l’im­por­tance de l’en­tre­pre­neu­riat fémi­nin et ses spé­ci­fi­ci­tés. L’occasion de reve­nir sur la toute récente créa­tion de Réselle, le « réseau des réseaux » au fémi­nin en Isère.

Meaghan Major, présidente de la délégation iséroise de l’association Femmes chefs d’entreprises (FCE). © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

Meaghan Major, pré­si­dente de la délé­ga­tion isé­roise de l’association Femmes chefs d’entreprises (FCE). © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Directrice géné­rale de l’agence Witty, élue à la Chambre des métiers et de l’artisanat, pho­to­graphe, jeune mère de famille, la franco-amé­ri­caine Meaghan Major vient de prendre la tête de la délé­ga­tion isé­roise de Femmes chefs d’en­tre­prises (FCE). Elle suc­cède ainsi à Séverine Werquin-Matton jus­qu’a­lors pré­si­dente de l’or­ga­ni­sa­tion inter­pro­fes­sion­nelle, l’un des quatre réseaux des femmes entre­pre­neurs implan­tés en Isère.

Comment appré­hen­dez-vous votre fonc­tion de pré­si­dente de la délé­ga­tion isé­roise de FCE ?

C’est un grand hon­neur de repré­sen­ter une asso­cia­tion qui, depuis 1945, a tou­jours œuvré à valo­ri­ser la place de la femme dans le milieu éco­no­mique. Il est extrê­me­ment impor­tant de mettre en avant les ini­tia­tives fémi­nines et le fait qu’il y a tou­jours eu des femmes chefs d’entreprises car on n’en entend pas beau­coup parler.

J’apprécie la diver­sité des pro­fils au sein de l’association. Parce qu’il y a autant de femmes chefs d’entreprises dans l’in­dus­trie ou les ser­vices que dans les domaines finan­cier ou juri­dique. Certaines sont toutes seules dans leur entre­prise, d’autres gèrent des dizaines d’employés.

Meaghan Major, présidente de la délégation iséroise de l’association Femmes chefs d’entreprises (FCE). © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

Meaghan Major © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Une immense tâche s’offre à moi avec cette pré­si­dence. Quand on est chef d’entreprise, on voit sou­vent le bout de son nez, son entre­prise, ses pro­blé­ma­tiques… Là, j’ai une pers­pec­tive plus large. Je me rends compte de com­ment on s’inscrit en tant que femme chef d’entreprise sur un ter­ri­toire, dans un tissu éco­no­mique com­posé de beau­coup d’acteurs.

Je découvre les inter­ac­tions entre ces acteurs éco­no­miques et com­ment, en tant que réseau fémi­nin, nous pou­vons appor­ter une pierre à l’édifice et conso­li­der ou créer des pas­se­relles entre eux. Cela per­met aussi de mieux voir com­ment valo­ri­ser notre ter­ri­toire. Personnellement, je ne suis pas ori­gi­naire d’ici, mais je trouve qu’en Isère et plus par­ti­cu­liè­re­ment à Grenoble, il y a énor­mé­ment de richesses éco­no­miques. Grenoble s’inscrit au niveau mon­dial dans une vraie dynamique.

Comment défi­ni­riez-vous l’en­tre­pre­neu­riat féminin ?

Pour moi, c’est une réelle oppor­tu­nité socié­tale parce qu’on crée de la valeur ajou­tée au niveau éco­no­mique, on crée de l’emploi et on le fait avec des dyna­miques dif­fé­rentes de celles des hommes. C’est alors une richesse de plus pour le monde éco­no­mique, pour le territoire.

Meaghan Major, présidente de la délégation iséroise de l’association Femmes chefs d’entreprises (FCE). © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

Meaghan Major © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Aujourd’hui, seuls 30 % des créa­teurs d’entreprises sont des femmes. Pourtant, des études montrent que les entre­prises mana­gées par des femmes affichent en moyenne une ren­ta­bi­lité supé­rieure de 36 % et offrent de meilleures condi­tions de tra­vail. La Banque mon­diale estime ainsi que si plus de femmes se lan­çaient, la pro­duc­ti­vité fran­çaise aug­men­te­rait de 25 %.

Une des rai­sons à cela est que les femmes n’ont pas la même écoute. Une femme chef d’entreprise ne va pas abor­der l’interaction entre ses col­la­bo­ra­teurs ou le mana­ge­ment de la même manière qu’un homme. La dif­fé­rence phy­sique joue dans la façon d’a­bor­der les gens.

Autre point impor­tant qui res­sort des études : les femmes ont plus de mal à délé­guer. Elles vont se sur­char­ger encore plus de tra­vail. D’autant qu’en tant que femme chef d’entreprise on a un peu cette éti­quette de super woman. On doit être une super maman, super copine, super épouse…

Y a‑t-il une dyna­mique par­ti­cu­lière de l’en­tre­pre­neu­riat fémi­nin en Isère ? Quel est le rôle des réseaux de femmes entrepreneures ?

On constate une forte pré­sence fémi­nine en Isère dans les entre­prises de ser­vices, notam­ment à la per­sonne, ou bien encore dans les cabi­nets d’a­vo­cats. Il y a par ailleurs une forte dyna­mique dans l’entrepreneuriat fémi­nin, avec quatre réseaux fon­da­teurs qui œuvrent dans ce domaine : les Femmes chefs d’entreprises Isère, Les Inform’elles, le réseau Entreprendre au fémi­nin et le Réseau Mampreneures Isère).

Au sein de ces réseaux, il y a beau­coup de soli­da­rité, d’entraide, d’écoute… On sort de l’isolement, pre­mier pro­blème ren­con­tré par des chefs d’entreprise, hommes et femmes confon­dus. Cela donne beau­coup de force lorsqu’on ren­contre des dif­fi­cul­tés. Le fait d’en par­ler ensemble nous rebooste vraiment.

Membres de l'interréseau Réselle pour un entrepreneuriat féminin inspirant. © Muriel Beaudoing - Placegrenet.fr

Membres de l’in­ter-réseaux Réselle pour un entre­pre­neu­riat fémi­nin ins­pi­rant. © Muriel Beaudoing – Placegrenet​.fr

Ces quatre réseaux tra­vaillent ensemble depuis plu­sieurs années. Nous créons des évè­ne­ments en com­mun, mutua­li­sons nos com­pé­tences et nos connais­sances. Chaque réseau a sa spé­ci­fi­cité et on essaie d’al­lier tout ça. C’est pour cela que le 1er mars, nous avons lancé un nou­veau pro­jet de coopé­ra­tion, une sorte de « réseau des réseaux fémi­nins », nommé Réselle, en par­tant du prin­cipe que le mot “réseau” est mas­cu­lin, sans équi­valent féminin.

Nous sommes par­ties du constat qu’aujourd’hui 30 % des créa­teurs d’en­tre­prises sont des femmes mais que, dans les médias, moins de 30 % des experts inter­viewés sont des femmes. Il y a un déca­lage entre la place des femmes en tant que chefs d’entreprise et leur repré­sen­ta­tion en tant qu’expertes dans les médias. Quel que soit le sujet traité, il y a un vrai manque.

C’est pour cela qu’entre autres actions, nous allons mettre à dis­po­si­tion des jour­na­listes un fichier des femmes expertes avec leurs com­pé­tences. Nos quatre réseaux réunissent plus de 240 chefs d’entreprise en Isère. Un autre objec­tif pour nous est de mon­trer à des jeunes femmes, à des étu­diantes qu’elles peuvent se lan­cer, qu’elles ont des forces, des com­pé­tences et qu’il ne faut pas qu’elles hésitent à entreprendre.

Quels sont les prin­ci­paux défis de l’en­tre­pre­neu­riat au fémi­nin aujourd’hui ?

La pres­qu’île scien­ti­fique. © Morel

Pour moi, le prin­ci­pal défi, c’est de se faire confiance et de prendre des risques. Seuls 10 % de femmes créa­teurs d’entreprise se lancent dans le domaine de l’innovation. Or, je pense que les femmes ont tout inté­rêt à valo­ri­ser leurs com­pé­tences dans ce domaine, notam­ment à Grenoble qui a un pôle scien­ti­fique très développé.

C’est le vrai chal­lenge aujourd’hui : que les femmes osent se lan­cer dans les entre­prises scien­ti­fiques, numé­riques et high-tech. Il y a un vrai défi à aller vers les réseaux sociaux, à uti­li­ser le numé­rique comme un trem­plin pour déve­lop­per nos entreprises.

L’axe du numé­rique est très impor­tant pour moi. C’est un grand axe de tra­vail de la Chambre des métiers et de l’artisanat de l’Isère et je m’inscris vrai­ment dans cette dyna­mique. Certaines entre­prises ont encore de grosses dif­fi­cul­tés à se lan­cer dans ce sec­teur, à sai­sir qu’il repré­sente vrai­ment un atout pour se déve­lop­per et non une menace.

Je pense aussi que le numé­rique crée des liens. Même à une échelle per­son­nelle : 95 % de ma famille vit dans d’autres pays, par­ti­cu­liè­re­ment aux États-Unis. Aujourd’hui, sans les outils numé­riques, je per­drais des contacts, n’ayant pas le temps d’appeler chaque per­sonne de manière régulière.

Comment trou­ver un équi­libre entre son entre­prise et sa vie de famille ?

Homme ou femme chef d’en­tre­prise, il faut avoir un bon par­te­naire pour être à la fois épa­noui dans son tra­vail et dans sa vie fami­liale. Sans le sou­tien de son par­te­naire de vie, je pense que ce n’est pas pos­sible. En tout cas pour moi. Mon conjoint est en même temps mon asso­cié. C’est lui qui va me dire « oui, vas‑y » là où je vais avoir ten­dance à douter.

Meaghan Major, présidente de la délégation iséroise de l’association Femmes chefs d’entreprises (FCE). © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

Meaghan Major © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Quand j’ai eu l’intention de me pré­sen­ter à la pré­si­dence de FCE alors que j’étais enceinte de huit mois, élue à la chambre des métiers et de l’artisanat avec une entre­prise à gérer, il aurait pu me dire « cela va faire trop ». Au lieu de cela, il m’a dit : « Fonce car ce sera une super expé­rience ! Tu vas te réga­ler et t’enrichir de plein des choses, autant sur le plan humain que sur la connais­sance de notre ter­ri­toire au niveau économique. »

Je suis une toute jeune maman. Je vais donc voir com­ment conci­lier tout cela mais mes amis adhé­rentes FCE m’ont convain­cue en tant que chef d’entreprise de ne pas hési­ter à être mère. Il faut juste faire la part des choses. Dans la jour­née, il y a du temps pour tra­vailler et déve­lop­per son entre­prise et, le soir, du temps pour ses enfants, sa famille et pour soi aussi. Il faut éga­le­ment par­fois prendre du recul, quand on est sub­mergé par tout ce qu’il y a à gérer. Je pense en fait que tout est fai­sable, à condi­tion d’être organisé.

Propos recueillis par Yuliya Ruzhechka

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