FOCUS – Lara, dessinateur de presse grenoblois qui officie, entre autres, sur le site de L’Obs et dans les pages du Canard enchaîné, expose ses dessins à La Frise jusqu’au mois de mars. Nous avons profité du vernissage de ses « Dessins de campagne » le 3 février pour lui poser quelques questions sur les particularités de son métier, redoutablement indexé sur l’actu.
Ne le dites pas caricaturiste, vous l’indisposeriez. « La caricature grossit les traits physiques des personnages représentés », définit simplement Lara. Sur la quarantaine de « dessins de campagne » exposés au café restaurant La Frise jusqu’au mois de mars, on observe en effet que la ressemblance entre les personnalités représentées et les bonshommes crayonnés n’est pas toujours frappante. « Je ne m’attache pas aux traits physiques mais plutôt aux situations. Si la charge se résume au grossissement des traits, elle me semble invalider le travail du dessinateur de presse », explique Lara avec verve.
De fait, son sens du détail supplée aisément cette volontaire absence de caractérisation physique. Plus qu’à ses sourcils broussailleux, on identifiera son Fillon aux armoiries qui ornent le mur de son manoir et à sa compagne, bien sûr, exigeant un devis contre un simple café. Ce dessin (voir ci-dessus), on le trouvera sur le site de L’Obs, pour lequel Lara suit la présidentielle 2017.
Du Canard à L’Obs et vice-versa
Mais son plus haut fait d’armes sans doute est d’avoir su se faire accepter de l’hebdomadaire qui lui a donné envie de faire ce métier : Le Canard enchaîné. Depuis deux ans, le jeune quadra y est pigiste et livre, inlassablement, tous les lundis, une liasse de dessins, publiés ou non le mercredi suivant.
Son modèle ? Pétillon. Qui, comme lui, porte cette double casquette de bédéiste et de dessinateur de presse. « J’aime beaucoup la manière dont Pétillon traite le fait politique dans le Canard enchaîné. On sent chez lui une certaine tendresse à l’égard de ses représentants. » Aux antipodes du « tous pourris ». Slogan populiste auquel ne souscrit pas non plus le dessinateur de presse grenoblois.
En quoi diffère son travail pour L’Obs de celui pour le Canard enchaîné ? « La temporalité n’est pas la même. Sur le web, tu joues avec l’horloge. La durée de vie du dessin est très courte, elle s’inscrit dans une actualité, très vite chassée par une autre. Pour le Canard, le dessin doit pouvoir se lire durant une semaine entière. »
Quelle date de péremption pour les dessins de presse ?
Sur le web, en effet, ses dessins embrassent si bien l’actualité qu’ils peuvent ne plus s’entendre quelques semaines voire quelques jours après leur publication.
Qui se souviendra dans un mois de la raison pour laquelle Jean-Christophe Cambadélis, Premier secrétaire du Parti socialiste, craignait de manquer de calculettes le 29 janvier 2017 (voir ci-contre) ?
Cette incurable obsolescence est-elle compatible avec le fait d’exposer ? « À la Frise, je n’ai pas choisi ce type de dessins, trop strictement politiques. J’en ai sélectionnés qui ne nécessitent pas d’être un professionnel de l’info pour être compris. »
Si les dessins exposés arborent des thématiques plus légères, ils n’en sont pas moins emprunts du style très reconnaissable de Lara, épuré et nerveux. En un mot, efficace.
Adèle Duminy
Infos pratiques
150 cours Berriat, à Grenoble
Exposition « Dessins de campagne », de Lara
Du 3 février au mois de mars 2017