DÉCRYPTAGE – L’Ampérage est de nouveau sous les projecteurs. La salle de spectacle située dans le quartier Ampère-Berriat se bat depuis avril dernier pour obtenir une autorisation d’ouverture tardive. Hier, nouveau coup d’éclat. Alors que la salle n’était autorisée qu’à ouvrir jusqu’à 2 heures du matin, la Ville et la Préfecture ont décidé lors d’une réunion, l’ouverture de l’Ampérage jusqu’à 4 heures, deux fois au mois de novembre. Une décision qui a été prise sans aucune concertation avec la direction de la salle de spectacle. Explications.

L’Ampérage, lieu emblématique des nuits grenobloises.
Nouveau rebondissement pour l’Ampérage. L’association Stud qui gère la salle de spectacle vient d’apprendre qu’elle pourra ouvrir jusqu’à 4 heures du matin lors de deux soirées du mois de novembre. Pour rappel, en avril, l’Ampérage avait été obligée de fermer à 1 heure, contre 5 heures auparavant. Un arrêté préfectoral datant de début octobre avait ensuite autorisé l’ouverture jusqu’à 2 heures du matin.
Hier matin, une réunion a donc été organisée entre la Ville et la Préfecture, au cours de laquelle cette mesure, qui fera office de test, a été prise. Un nouvel exemple du manque de concertation selon Laurence Tadjine, directrice du Stud – l’association qui gère l’AmpéRage – qui déplore que la direction n’ait pas été conviée. « Nous allons prendre ce que l’on nous donne car nous sommes toujours dans une volonté de concertation mais nous sommes consternés que cette décision ait été prise sans nous contacter. Nous espérons toujours cette fermeture à long terme à 4 heures, voire 6 heures du matin comme nous le proposons, afin d’éviter les nuisances. »
Avis défavorable de la police
Pour resituer le contexte, l’Ampérage, avait auparavant formulé deux demandes, une temporaire et une permanente, pour pouvoir bénéficier de cette fermeture tardive. Las, elles ont finalement été toutes les deux refusées, suite à un avis défavorable de la police nationale. En cause, d’après Thomas Antoine, le président du Stud : le courrier d’un habitant, datant du mois de septembre et se plaignant des nuisances de voisinage, transmis par le cabinet du maire à la préfecture.
Une information confirmée par la Ville et la préfecture qui rappellent toutefois que d’autres lettres de riverains se plaignant des nuisances sonores ont aussi motivé la décision. Du côté de la mairie, on tempère : « la vie en ville est complexe, à la fois pour les Grenoblois et la municipalité. On ne doit donc pas pousser le curseur trop loin, au risque d’arriver à des situations de blocage ». Un avis que partage la préfecture, qui insiste sur le fait que des dérogations pourraient être accordées au cas par cas, en fonction de l’appréciation du préfet.
Pour Thomas Antoine, cette décision reste tout de même le pire des choix . « Cela va inciter les gens à davantage traîner dans la rue à la sortie des concerts » explique-t-il. L’idéal pour lui ? Autoriser la fermeture à 6 heures du matin, au moment où reprend la circulation des transports en commun.
« Baleine sous gravillon »

l’Ampérage © Niflheim-photos
Aujourd’hui, la coupe est pleine et l’association ne comprend pas cet « imbroglio ». « Il y a un discours contradictoire. D’un côté, notre subvention a été augmentée cette année et le service culturel de la ville nous soutient dans notre projet et, d’un autre côté, cette décision de la préfecture est prise sans aucune concertation » explique Thomas Antoine. Et celui-ci de considérer qu’il y a « baleine sous gravillon ».
« Depuis 2009, et ce décret national sur les fermetures tardives des salles de spectacles, nous n’avions eu aucune visite ni des services de la ville, ni de la police municipale ou nationale. Or, depuis avril dernier, nous en avons déjà eu deux ! » ajoute-t-il, en se demandant s’il n’y a pas un peu d’acharnement. « Si l’on est dans un État de droit, toutes les salles de spectacles du quartier devront fermer à 1 heure » soutient-il.
De son côté, la municipalité rappelle qu’elle a toujours accompagné l’Ampérage dans son projet. Et souligne que c’est encore le cas cette année puisqu’une subvention de 100 000 euros a été versée à la salle de spectacle. « Il n’y a aucune volonté de court-circuiter l’Ampérage avec la Belle électrique ou la MC2 » assure-t-on du côté du Boulevard Jean Pain.
Un modèle économique menacé

Street Therapy Act. 3
© Bourgeois Jeremy
Avec cette fermeture relativement tôt dans la nuit, Thomas Antoine redoute un gros manque à gagner.
« Les associations sont directement en péril car nous n’aurons plus le même montant à leur reverser. Or, le modèle économique de l’Ampérage fonctionnait bien jusqu’à présent » commente-t-il.
Jusqu’à présent car l’équilibre financier est aujourd’hui menacé, avec 52 000 euros de pertes depuis avril. Trois salariés sur les huit que compte la structure l’ont d’ailleurs quittée dernièrement. Des difficultés qui ne sont pas sans impact sur les autres associations, puisque trois d’entre elles ont déjà annulé des dates.
Face à cette situation dégradée, l’Ampérage se mobilise. Une pétition demandant l’ouverture à long terme de la salle jusqu’à 4 heures du matin devrait également circuler prochainement sur Internet. En attendant, le milieu artistique grenoblois se réunira le 14 novembre prochain, à l’initiative du Stud, pour discuter de la politique culturelle de la ville. La bataille ne fait que commencer…
Maïlys Medjadj
les 3 salariés n’ont pas été licenciés ! l’un a choisi de partir vers d’autres horizons, le deuxième avait une opportunité différente ailleurs et le troisième arrivait à la fin d’un CDD.
Merci pour ces précisions. Le texte a été modifié en conséquence.