REPORTAGE VIDÉO - Ce jeudi 24 juillet à 13 h 30 se tenait au tribunal administratif le procès opposant la préfecture aux habitants du centre d’hébergement Les Mimosas, rue Verlaine. A cette occasion, le collectif Hébergement-Logement avait appelé à un rassemblement place de Verdun. Le jugement a été rendu ce vendredi. La préfecture est déboutée.
Une quarantaine de personnes s'est réunie ce jeudi à 13 h 30 place de Verdun, à l'appel du collectif Hébergement-Logement. Le tribunal administratif de Grenoble devait en effet examiner un recours de la préfecture de l'Isère contre les demandeurs d'asile occupant le centre d'hébergement Les Mimosas, en dépit d'une décision de fermeture.
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Mises en demeure successives
Pour mémoire, ce centre, essentiellement dédié à l'hébergement d'urgence de migrants venus de Roumanie, d'Albanie et de Serbie, devait fermer ses portes le 5 juillet dernier. Une décision liée à son « état d'insalubrité notoire », selon les termes de la préfecture, mais aussi à son coût de fonctionnement.L'association Arepi, gestionnaire du centre, comptait procéder à une évacuation des lieux le 8 juillet mais des associations et collectifs très mobilisés, comme Roms Action, la Patate Chaude et Hébergement Logement, avaient bloqué l'accès au bâtiment ce jour-là et les résidents avaient refusé de quitter les lieux. Cette fermeture n'avait donc pu avoir lieu. Une situation qui avait provoqué sans tarder la réaction de la préfecture de l’Isère par communiqué, le 10 juillet : « Malgré les mises en demeure successives et le report de la fermeture initialement prévue le 5 juillet dernier (…) 15 familles, soit 68 personnes ont refusé d’engager toute procédure administrative mais aussi de quitter les lieux. Ces 68 personnes, toutes en situation irrégulière sur le territoire, occupent désormais illicitement le bâtiment, propriété de l’État. » La préfecture annonçait alors vouloir engager une procédure en référé dès le lendemain devant la juridiction administrative compétente. Et demandait sur le champ de couper l'eau et l'électricité aux résidents.
Bras de fer
Allait alors s'engager un véritable bras de fer entre la préfecture et le maire de Grenoble. Eric Piolle, pour sa part favorable au maintien de cette structure d'hébergement, a ni plus ni moins renvoyé l’État à ses responsabilités, lors d'une conférence organisée en urgence le jour-même. « L’État crée un squat en se désengageant de ce bâtiment », a-t-il ainsi déclaré.Et celui-ci de rappeler son souhait, exprimé depuis trois mois, d'engager une discussion avec la Métro et l’État sur l’hébergement d’urgence et de déplorer « une situation qui empire ». Avec, en toile de fond, un objectif clairement affiché : celui de revenir sur la régionalisation des demandes d’asile datant de 2010 et revenant à concentrer les demandeurs dans quelques métropoles. En l'occurrence Grenoble et Lyon. Dans la foulée, la ville rétablissait à ses frais l’eau et l’électricité coupées sur décision de la préfecture. Le lendemain, à savoir le 11 juillet, la préfecture enfonçait le clou : « La fermeture du centre Verlaine est effective depuis le 10 juillet à 16 h 00. Malgré la mise en demeure officielle de quitter les lieux formulée le 20 juin dernier à l’encontre des hébergés, un huissier de Justice a constaté ce jour que des personnes sans droit ni titre occupent ce bâtiment appartenant à l’État. » Elle soulignait la présence d’une centaine de personnes dont de nombreux enfants, « alors même que des branchements électriques extrêmement dangereux ont été constatés (bloc incendie arraché, câbles électriques apparents, tableau électrique démonté) » et évoquait « des risques de troubles à l’ordre public (liés aux tensions avec le voisinage et aux conflits potentiels à l’intérieur du bâtiment) ». Enfin, elle confirmait avoir saisi le juge des référés administratif afin d’autoriser l'évacuation des occupants avec le concours de la force publique.
Ville, militants et résidents face à la préfecture
Lors du procès qui s'est tenu aujourd'hui au tribunal administratif, la mairie de Grenoble s'est placée sans surprise du côté des résidents du centre d'hébergement. La défense de ces derniers a d'ailleurs été assurée par un avocat mis à disposition par la ville de Grenoble, par le biais de son Centre Communal d'Action Sociale, et l'Institut des Droits de l'Homme. La préfecture a tenu à rappeler que Les Mimosas était « un centre d'hébergement provisoire », ouvert en 2012 à l'occasion d'un hiver rigoureux et que les conditions d'accueil étaient restées « précaires voire insalubres ». De son côté, la défense a souligné qu'aucun travaux n'avaient été entrepris depuis pour améliorer les conditions d'hébergement et estimé que cette expulsion représentait une atteinte tant aux Droits de l'Homme qu'aux Droits de l'enfant. Après une audience d'environ quatre heures, les différentes parties ont été informées qu'elles se verraient notifier le jugement ce vendredi. Paul TurenneMise à jour le 25 juillet 2014 La préfecture de l'Isère déboutée Il n'y a aucune urgence à fermer le centre d'hébergement Les Mimosas. Ainsi en a jugé le tribunal administratif de Grenoble, ce vendredi 25 juillet. Le juge des référés n'a donc pas retenu la requête du préfet de l'Isère demandant le respect de son arrêté sur la fermeture de la dite structure. Pour le tribunal, il n'y a pas lieu de prendre une mesure d'expulsion, dans la mesure où les locaux ne sont pas "destinés à court terme à un usage ou à un projet particulier" et qu'ils ne doivent pas "faire l’objet de travaux". Le juge a par ailleurs estimé que ces derniers n'étaient pas plus insalubres qu'avant. Pour finir, concernant les risques de trouble à l'ordre public, il considère que le préfet n'a pas démontré "l’existence de circonstances particulières présentant pour l’ordre public des dangers auxquels il ne serait pas en mesure de faire face". Une décision qui suscite une réaction mesurée au sein du Collectif La patate chaude : "Nous nous félicitons de cette décision du tribunal administratif, même si l'occupation de ce bâtiment n'est pas une fin en soi pour les personnes qui l'habitent. Nous attendons à présent que l’État, le Conseil général, la Métro et les communes mettent en place des structures d'hébergement conséquentes qui évitent que ce type de situation ne se reproduise sans cesse, et que la préfecture permette aux personnes concernées d'accéder, comme elles le souhaitent, au droit commun et à un logement digne de ce nom."
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