FOCUS – Bras-de-fer entre la Métropole de Grenoble et les syndicats sur une augmentation annoncée du volume horaire annuel des agents à compter du 1er janvier 2022. Alors que les organisations syndicales demandent une compensation financière pour atteindre les 1607 heures travaillées, l’intercommunalité s’y refuse pour des raisons budgétaires et propose d’autres pistes, unanimement rejetées par les syndicats.
Le torchon brûle entre la Métropole de Grenoble et ses représentants du personnel, voire ses agents. D’une même voix, les syndicats CFDT, Force ouvrière, CGT et CFE-CGC dénoncent une « posture d’autisme social » de la part de l’intercommunalité. La tension est même montée d’un cran lorsqu’un comité technique organisé le mercredi 30 juin 2021 a dû être annulé… après l’irruption dans la salle de personnels décidés à en empêcher la tenue.
Un bras-de-fer s’est engagé entre Métropole et syndicats sur le passage aux 1607 heures de travail annuel © Eléonore Bayrou – Place Gre’net
En cause ? L’augmentation prévue du nombre d’heures de travail des agents. À compter du 1er janvier 2022, le personnel métropolitain devra en effet s’acquitter de 1607 heures travaillées annuelles. Soit, selon les cas, une augmentation du volume horaire pouvant aller de 50 à près de 80 heures par an. Le tout, estiment les syndicats, « sans compensation ». Ainsi qu’ils l’affirmaient à l’occasion d’un rassemblement devant le conseil métropolitain le vendredi 21 mai 2021.
Un volume de 1607 heures travaillées imposé par la loi
Pourquoi une telle augmentation ? Celle-ci découle directement de la loi de Transformation de la fonction publique. Un texte qui impose à l’ensemble des collectivités 1607 heures de travail pour leurs agents, en mettant fin aux possibilités de dérogations jusqu’ici accordées. Si le texte de loi a été âprement combattu par les organisations syndicales, il n’en a pas moins été adopté courant 2019.
Les syndicats appelaient déjà au rassemblement devant la Métro à l’occasion du conseil métropolitain du 21 mai 2021. Une nouvelle mobilisation est prévue le 2 juillet. © Florent Mathieu – Place Gre’net
« Ce n’est pas de notre fait, c’est la loi qui nous l’impose », résume ainsi Michelle Veyret, vice-présidente de la Métro en charge des Ressources humaines. L’élue rappelle au demeurant avoir été opposée au texte. « Mais en tant qu’élus de la République, nous nous devons d’appliquer les lois, même si elles ne nous plaisent pas », ajoute-t-elle.
Une application sans compensation, à la faveur d’une « mascarade de dialogue social », comme l’affirment les syndicats ? « Ce n’est pas entendable », réplique Michelle Veyret. Pour qui, au contraire, l’intercommunalité a fait preuve de transparence vis-à-vis des agents et des représentants du personnel dès la mise en œuvre de la réforme. En organisant notamment des ateliers, et pas moins de sept comités techniques depuis janvier 2021.
Les syndicats de la Métro réclament une hausse salariale
Si le comité technique du 30 juin a été annulé, celui du 17 juin ne s’était guère mieux passé : après avoir signifié leur mécontentement unanime, les syndicats avaient purement et simplement claqué la porte. Choqués, écrivaient-ils, d’avoir été accusés « d’irresponsabilité et de déconnexion avec la réalité ». De quoi les motiver à lancer un nouvel appel à la grève et au rassemblement à l’occasion du conseil métropolitain du 2 juillet.
Michelle Veyret aux côtés du président de la Métropole de Grenoble Christophe Ferrari. © Florent Mathieu – Place Gre’net
En toile de fond, demeure un désaccord profond sur la manière d’appréhender l’augmentation du volume horaire. Les syndicats demandent une compensation financière, solution que refuse la Métro. « Ce sont des sommes qui ne sont pas possibles. C’est un budget énorme ! », proteste Michelle Veyret. De plus, explique l’élue, une telle augmentation creuserait le fossé salarial entre les agents de la Métro et ceux des communes qui la composent.
Pour atténuer l’impact de la hausse des heures de travail, la Métro propose donc d’autres pistes. À commencer par une modification des statuts horaires, qui permettrait aux salariés actuellement à 35 heures de bénéficier de RTT. Une mesure à laquelle viendrait s’ajouter la généralisation des tickets restaurants pour l’ensemble des agents. Et une extension du paiement des jours en compte-épargne-temps, en allant au-delà du quinzième. Autant de propositions qui ne satisfont pas les syndicats.
Une délibération d’intention votée le 2 juillet 2021
« Nos élus ont décidé de nous faire travailler gratuitement dix jours alors que notre pouvoir d’achat ne cesse de baisser. Entre ça et le travail forcé, la limite est faible ! », affirment-ils par voie de communiqué. De quoi faire soupirer Michelle Veyret : « J’attends qu’ils fassent d’autres propositions. Ils restent campés sur “non, vous devez payer”. Là-dessus, en effet, on n’a pas la même approche des choses. »
Quelle compensation pour la hausse du volume horaire à 1607 heures annuelles des agents de la Métro ? © Julien Morceli – Place Gre’net
Et quand les syndicats jugent que la Métro pourrait fort bien refuser d’appliquer la loi, l’élue s’agace encore. « On peut ne pas appliquer, mais il faut aussi se prémunir de décisions beaucoup moins favorables pour les agents », juge-t-elle. Traduction ? Si l’État, via le préfet de l’Isère et le contrôle de légalité, devait prendre la main, sa façon d’appliquer la règle des 1607 heures serait nettement plus brutale.
C’est (aussi) la raison pour laquelle, explique Michelle Veyret, la Métro compter voter une délibération d’intention le 2 juillet 2021 : pour acter le principe de changement de volume horaire. Les syndicats estiment aujourd’hui qu’une telle délibération serait illégale après l’annulation du dernier comité technique. L’élue métropolitaine précise toutefois qu’elle ne fixe pas les dispositions générales. Qui devraient, pour leur part, être fixées à l’automne. Au terme d’un rude bras-de-fer ?