Projet de loi bioé­thique : manifs à Grenoble des anti-“PMA sans père” et des pro-“PMA pour toustes”

Projet de loi bioé­thique : manifs à Grenoble des anti-“PMA sans père” et des pro-“PMA pour toustes”

 

FOCUS - Les anti-PMA sans père et anti-GPA se sont rassemblés place de Verdun à Grenoble, samedi 10 octobre. Ils souhaitent le retrait du projet de loi bioéthique qui doit passer en deuxième lecture au Sénat. Plusieurs manifestations ont eu lieu partout en France pour peser dans le débat public. Mais aussi des contre-manifestations avec des militants anti-Manif pour tous. À Grenoble, les deux cortèges ne se sont pas rencontrés.

 

 

Manifestations à Grenoble des anti et pro-PMA pour toutes. La manifestation des anti-GPA et des anti-PMA a rassemblé une centaine de personnes sur la place Verdun. © Tim Buisson – Place Gre’net

La manifestation des anti-GPA et des anti-PMA sans père a rassemblé une centaine de personnes sur la place de Verdun, à Grenoble, la 10 octobre 2020. © Tim Buisson – Place Gre’net

« Un papa. Une maman. On ne ment pas aux enfants ! » Les slogans n'ont pas changé depuis la Manif pour tous de 2013. Mais les manifestants se battent désormais contre un autre projet de loi : la loi bioéthique. Une loi « ni bio, ni éthique » pour la centaine de militants rassemblés ce samedi place de Verdun à Grenoble.

 

Réunies sous la bannière Marchons enfants, une vingtaine d'associations ont battu le pavé ensemble autour de cet objectif commun. On distinguait des tee-shirts de la Manif pour tous, d'autres d'Alliance Vita, aux côtés de militants d'associations catholiques et protestantes.

 

 

La PMA pour toutes "priverait les enfants de la présence du père"

 

La loi bioéthique a été adoptée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, le 31 juillet 2020, avec 60 voix pour, 37 contre et quatre abstentions. Elle prévoit l'élargissement de l'accès à la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes et aux femmes célibataires.

 

Marie, responsable de "Génération On ne lâche rien 38". © Tim Buisson – Place Gre’net

Marie, responsable de "Génération On ne lâche rien 38". © Tim Buisson – Place Gre’net

« Nous considérons que cette mesure est injuste pour les enfants, puisqu'ils seraient alors délibérément et intentionnellement privés de la présence de leur père. Or on considère qu'un père est nécessaire à l'enfant », argumente Augustin Cathignol, porte-parole du collectif "Marchons enfants". Un avis partagé par Marie, 17 ans, responsable de "Génération On ne lâche rien 38". Un groupe de jeunes rattaché à la Manif pour tous. « Ce qui nous gêne, c'est le fait qu'un père ne soit pas essentiel à l'éducation et que cela soit inculqué aux enfants dès leur plus jeune âge. Que cela soit banalisé. Nous pensons que ce projet de loi bioéthique peut nous amener à un oubli du père », explique-t-elle.

 

Si les familles monoparentales existent déjà dans la société, « ce type de situation a été subi, rappelle Augustin Cathignol. Cela n'a pas été organisé par la société. Je ne suis pas sûr que l'on puisse s'en réjouir », poursuit-il.

 

 

Un risque « d'instrumentalisation de l'embryon » pour les manifestants

 

Les opposants à la GPA et la PMA sans père s'insurgent également contre ce qu'ils considèrent comme une « marchandisation du corps humain ». Pourquoi ? Parce que le projet de loi permet l'autoconservation des gamètes pour les femmes et les hommes, afin de pouvoir procréer plus tard. Et assouplit le protocole encadrant les recherches sur les cellules souches embryonnaires.

 

Contre la PMA sans père : Augustin Cathignol porte parole du collectif "Marchons enfants". © Tim Buisson – Place Gre’net

Augustin Cathignol porte-parole du collectif "Marchons enfants". © Tim Buisson – Place Gre’net

« Pour nous, l’embryon devient de plus en plus un matériau de laboratoire. Hier, on pouvait faire des recherches sur l'embryon jusqu'à sept jours. Demain, si la loi passe, ce serait jusqu'à quatorze jours et on ouvrirait la possibilité de créer des embryons transgéniques », s'indigne Augustin Cathignol. Un nouveau délai qui s'appliquerait à la culture in vitro des embryons humains.

 

"C'est une rupture anthropologique majeure. On l'on viendrait briser la ligne de crête entre le monde biologique humain et animal », ajoute-t-il.

 

 

Prendre en compte l'intérêt de l'enfant

 

Pour les manifestants proches des milieux religieux catholiques et protestants, le sujet est également sensible. « L'être humain n'est plus considéré comme une personne à part entière. On en fait ce que l'on en veut », se désole Jacqueline de la fédération des associations familiales catholiques de l'Isère. L'évêque de Grenoble, Guy de Kérimel, craignait déjà des dérives graves en juillet dernier.

 

Jean-Luc Tabailloux, pasteur protestant à Grenoble. © Tim Buisson – Place Gre’net

Jean-Luc Tabailloux, pasteur protestant à Grenoble. © Tim Buisson – Place Gre’net

Jean-Luc Tabailloux, pasteur protestant à Grenoble, s'est lui aussi opposé à la loi visant à renforcer et faciliter le droit à l'avortement, adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale début octobre. Il redoute la suppression de la clause de conscience spécifique des médecins leur permettant de refuser un avortement.

 

« Tout croyant qui travaille dans ce domaine et qui s’honore risque d'avoir à démissionner et à renoncer à son poste à l’hôpital public. Ils devront choisir d'autres professions qui ne les obligent pas à transgresser leur foi ou leur convictions et leurs consciences », a tempêté le pasteur à la tribune.

 

Jean-Luc Tabailloux remet aussi en cause l'allongement de l'IVG qui passerait de douze à quatorze semaines. « Si la vie d'un bébé n'est pas sacrée, rien n'est sacré. Tout se vaut et, au final, rien n'a d'importance », juge-t-il. Le projet de loi bioéthique devrait arriver au Sénat début 2021. D'ici-là, les débats risquent d'être houleux entre pro et anti-PMA sans père.

 

Tim Buisson

 

 

UNE CONTRE-MANIFESTATION DES PRO-“PMA POUR TOUSTES”

 

En marge de ce rassemblement anti-loi bioéthique (PMA, GPA…), une contre-manifestation – déclarée en préfecture – est partie de la place Victor-Hugo. Plusieurs centaines de personnes avaient ainsi répondu à l'appel de militants, syndicats et associations1Dont Nous toutes 38, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), Solidaires, la CGT, le Planning familial, l'Union nationale lycéenne (UNL), Pour une écologie populaire et sociale, La Confédération nationale du travail (CNT), l'Unef. Mais aussi Ensemble! Isère, Collages féminicides Grenoble, Rita et l'Association transféminine de l'agglomération Grenobloise (Atfag) pour la “PMA pour toustes”.

 

Manifestation des pro-PMA pour toutes. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Contre-manifestation des militantes et militants pour les droits des femmes. © Joël Kermabon - Place Gre'net

« À chaque fois que les courants réactionnaires sont sortis pour attaquer nos droits, nous nous sommes mobiliséEs plus nombreux/euses qu’elleux », haranguait ainsi le tract des contre-manifestants.

 

« Lors de leurs prières devant le centre IVG ou de leurs conférences au diocèse, [leur] présence a permis de faire entendre notre voix plus forte que la leur ! », y indiquaient les militants. En invitant, dès lors, à ne pas « leur laisser la rue [...] pour défendre [leurs] droits contre les réacs et pour en gagner de nouveaux ».

 

La loi bioéthique « ne va pas assez loin », selon les féministes

 

La principale revendication des contre-manifestants ? La procréation médicalement assistée (PMA) pour toutes, dont l'élargissement aux femmes seules et aux couples de lesbiennes met « fin à une discrimination », estiment-ils. Avant de regretter que la loi bioéthique n'aille pas plus loin. Notamment concernant la filiation dans les couples de lesbiennes et des personnes trans qui, selon les organisations présentes, « restent toujours discriminantes ».

 

Arrivée des contre-manifestants place Notre-Dame. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Arrivée des contre-manifestants place Notre-Dame. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Les militantes féministes demandent également l’arrêt des mutilations des enfants intersexes.

 

« Le droit des enfants à l’intégrité physique et sexuelle est un droit inaliénable. Cela implique le droit de choisir si, quand, et comment, leur corps sera modifié », plaident-elles.

 

Quant à l'interruption volontaire de grossesse, « il faut aller plus loin », réclament les défenseurs des droits des femmes. Qui exposent ainsi leurs revendications en la matière, forgées pour la plupart sur la base du rapport d'information Battistel-Muschotti sur l'accès à l'IVG

 

 

Une personne interpellée après la dispersion du cortège

Retour en images sur cette manifestation qui, bien qu'animée, s'est déroulée dans le calme. À ceci près que des débordements ont eu lieu juste après la dispersion du cortège place Notre-Dame, selon nos confrères du Dauphiné libéré. Ainsi, les policiers ont-ils interpellé une personne, placée ensuite en garde à vue pour outrages envers les forces de l'ordre.

 

 

Joël Kermabon

 

1 Dont Nous toutes 38, le Nouveau Parti anticapitaliste (NPA), Solidaires, la CGT, le Planning familial, l'Union nationale lycéenne (UNL), Pour une écologie populaire et sociale, La Confédération nationale du travail (CNT), l'Unef. Mais aussi Ensemble! Isère, Collages féminicides Grenoble, Rita et l'Association transféminine de l'agglomération Grenobloise (Atfag).

 

Tim Buisson

Auteur

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

A lire aussi sur Place Gre'net

Maison de la vie associative et citoyenne, anciennement "maison des associations" rebaptisée en juin 2024, Grenoble © Séverine Cattiaux - Place Gre'net
Grenoble : la Maison des asso­cia­tions a laissé place à une « mai­son de la vie asso­cia­tive et citoyenne »

FOCUS - Exit la Maison des associations de Grenoble. Place à la "Maison de la vie associative et citoyenne", inaugurée assez discrètement en juin 2024. Lire plus

La société Vencorex (Pont-de-Claix) condamnée pour atteinte à la liberté syndicale et au droit de grève
Potentielle fer­me­ture de Vencorex : des élus isé­rois font état de leur vive inquié­tude au Premier ministre

FOCUS - Dans un courrier adressé au Premier ministre Michel Barnier, trois parlementaires et deux maires de l'Isère font part de leurs vives inquiétudes face Lire plus

Résidence Condillac: le Crous Grenoble-Alpes répond (vertement) aux alertes de la CGT concernant le nouveau directeur
Résidence Condillac : le Crous Grenoble-Alpes répond (ver­te­ment) aux alertes de la CGT concer­nant le nou­veau directeur

DROIT DE SUITE - Alors que la CGT a dénoncé la venue d'un nouveau directeur au sein de la résidence Condillac, la direction du Crous Lire plus

La Ville de Grenoble annonce mettre fin à sa convention avec la MJC Prémol
MJC Prémol : la fin de la conven­tion annon­cée par la Ville de Grenoble sus­cite de vives réactions

FOCUS - La Ville de Grenoble annonce mettre fin à la convention d'objectifs et de moyens qui la lie à la MJC Prémol, quartier Villeneuve. Lire plus

Le spectacle Spray, une œuvre virtuose entièrement jouée avec des bombes de peinture et divers accessoires programmé à l'Hexagone. © Bartosch Salmanski
Meylan : la sai­son 2024 – 2025 de l’Hexagone sous les signes de l’é­co­lo­gie et de la parole féminine

FOCUS - Une saison 2024 - 2025 principalement placée sous les signes de l'écologie et de la parole féminine. Voilà ce que réserve à son Lire plus

L'Institut supérieur du tertiaire (IST) de Grenoble déménage pour intégrer les locaux de la CCI Avec ce changement de site, la CCI affirme que l'Institut supérieur du Tertiaire "offrira à plus de 200 apprentis un cadre d'apprentissage idéal, avec des espaces et des équipements repensés pour leur bien-être et leur réussite et un environnement propice à leur épanouissement professionnel". Ceci, notamment, grâce aux "installations de la CCI" et la proximité du centre-ville, de la gare et des stations de tramway.  Pierre Streiff, président de la Chambre de commerce et d'industrie de Grenoble, lors de l'inauguration des nouveaux locaux de l'Institut supérieur du tertiaire (IST) dans les locaux de la CCI, au sein du World Trade Center de Grenoble. © CCI Grenoble Les formations de l'IST, allant du bac + 2 au bac + 5 en alternance, "permettent aux apprentis d'acquérir des compétences solides et recherchées par les entreprises en administration et gestion des entreprises, comptabilité et finances, vente et management commercial", vante également la CCI. Et ceci dans les domaines de l'administration et gestion de l'entreprise, de la comptabilité et finance, ou de la vente et management commercial. La Chambre de  commerce et d'industrie décrit encore une école qui "facilite l'insertion professionnelle de ses apprentis", en mettant en relation les jeunes avec un réseau de plus de 500 entreprises partenaires "qui ont des postes à pourvoir et souhaitent recruter dans cette école". Mais aussi en proposant à ses diplômés de rejoindre la communauté des Alumni sur Linkedin, "où sont publiées toutes les offres d’emploi de ses entreprises partenaires, en relation avec leur diplôme". Des séances de job-dating sont aussi fréquemment organisées.    
L’Institut supé­rieur du ter­tiaire (IST) de Grenoble démé­nage pour inté­grer les locaux de la CCI

FLASH INFO - La Chambre de commerce et d'industrie de Grenoble a inauguré jeudi 5 septembre 2024 les nouveaux locaux de l'Institut supérieur du Tertiaire (IST). Lire plus

Flash Info

Les plus lus

Agenda

Je partage !