REPORTAGE VIDÉO - Près de 250 personnes ont défilé dans Grenoble ce samedi 12 septembre 2020, marquant ainsi la rentrée des gilets jaunes de l'agglomération. Après une longue pause, le mouvement citoyen recherche un second souffle en prônant un retour aux fondamentaux. Avec l'apport d'autres mouvances dont des anti-masque qui profitent opportunément de l'appel d'air.
"Ahou, ahou, ahou !" Depuis le 17 février dernier, on avait perdu l'habitude d'entendre ces cris galvanisants entonnés tous les samedis dans les manifestations des gilets jaunes (GJ) de l'Hexagone.
La journée de ce samedi 12 septembre marquait le retour du mouvement citoyen au-devant de la scène politique et sociale, dans une ambiance encore estivale.
Des manifestations ont ainsi eu lieu dans quelques métropoles et sur des ronds-points ; tentative de “remontada” des gilets jaunes sur le front social. À Grenoble, près de 250 personnes ont défilé pacifiquement trois heures durant dans les rues de la ville.
Un mouvement en perte de vitesse
Deux ans après sa naissance et en pause forcée depuis le début de la crise sanitaire, le mouvement citoyen prône un retour à ses fondamentaux de justice sociale et fiscale portés sur les fonts baptismaux de 2018. Malgré la grogne exacerbée par le contexte sanitaire et social, force est toutefois de constater qu'il ne parvient pas à remobiliser les troupes à la hauteur de ses espérances. De fait, les gilets jaunes, loin d'avoir fait le plein pour leur rentrée, ont enregistré une participation relativement faible à leurs manifestations sur l'ensemble du territoire.
D'anciennes revendications se sont mêlées aux nouvelles : "Justice sociale", "démocratie participative", quand ce n'était pas le "droit de manifester", sérieusement mis à mal par la crise sanitaire. Sans oublier les "violences policières", des pancartes rappelant le nombre de personnes éborgnés par les tirs de balles de défense des forces de l'ordre. Sur ce point, la rancune des GJ est tenace. Pour autant, la manifestation étant déclarée, aucun uniforme n'était en vue, sinon ceux des motards ouvrant le cortège.
"Nous ne revenons pas, nous avons toujours été là !"
"On lâche rien !", clamait l'appel lancé sur les réseaux sociaux par différents groupes de gilets jaunes de l'agglomération grenobloise dont Action Crolles 38. Ce samedi, devant la gare de Grenoble, peu avant le départ de la manifestation, Nanou, une GJ de la première heure du rond-point Pierre et Marie Curie, affichait sa détermination.
"Nous ne revenons pas, nous avons toujours été là ! On se bat pour le mieux-vivre et nous continuons aujourd'hui", assurait-elle. "On trouve intolérable ce qui se passe aujourd'hui en France. Notre liberté, nous ne voulons pas la perdre ! Et que le Cac 40 nous laisse tranquilles et surtout, qu'il arrête de nous pomper !"
Plus loin, sur le parvis, deux personnes très véhémentes voire verbalement agressives – notamment envers les journalistes – agitaient des pancartes et haranguaient la petite foule. Notamment sur les dangers supposés du port du masque, "imposé par un État qui joue sur la peur des citoyens. Le tout relayé par les médias complices".
Pas de quoi emporter l'adhésion des gilets jaunes purs et durs, interloqués par cette leçon de morale intempestive. "On ne les a jamais vu défiler parmi nous depuis deux ans, ceux-là ! », grommelle ainsi un manifestant, loin d'apprécier la démarche, malgré le masque sur… son menton.
Des gilets jaunes mais pas seulement...
Dans le cortège, des gilets jaunes, bien sûr, la majorité sans doute, mais aussi de petits groupes aux visées diverses voire opportunistes pour certains. Anti-masque, anti-vaccins, partisans du professeur Raoult, zadistes des jardins de la Buisserate ou encore un autre groupe invitant "à se réveiller et à faire ses propres recherches".
Jacques, du groupe Action Crolles 38, s'il ne cautionne pas les anti-masque, dit ne pas s'étonner de leur présence. "Les autorités ont eu un discours tellement confus et absurde qu'elles n'ont créé que de la confusion dans la tête des gens", explique-t-il.
Retour en images sur cette manifestation qui n'a donné lieu à aucun débordement avant de s'achever, au rythme des percussions, sous les frondaisons du parc Paul-Mistral.
Joël Kermabon