FOCUS – Près de 150 personnes se sont rassemblées ce mardi 12 novembre devant le Crous du campus de Saint-Martin-d’Hères pour dénoncer la précarité étudiante. Un rassemblement en réponse à l’appel national de Solidaires étudiants après l’acte désespéré d’un de leurs camarades devant le Crous de Lyon, ce vendredi 8 novembre. Cet étudiant de 22 ans dans une situation financière critique après avoir perdu sa bourse s’était immolé par le feu.
Près de 150 personnes se sont rassemblées ce mardi 12 novembre à 18 heures devant le bâtiment du Crous du campus de Saint-Martin-d’Hères. Elles répondaient ainsi à un appel national du syndicat Solidaires étudiants, invitant à des rassemblements pour dénoncer la grande précarité qui touche le milieu étudiant.
Des mobilisations en hommage à l’acte désespéré d’un jeune homme de 22 ans, ce 8 novembre, devant un restaurant universitaire de Lyon. Ce dernier, militant de Solidaires étudiant, qui ne touchait plus sa bourse d’études, s’était immolé par le feu pour alerter sur sa situation financière devenue critique.
Dans un message posté sur son compte Facebook, il avait expliqué avoir « visé un lieu politique » pour revendiquer, entre autres considérations, « le salaire étudiant et d’une manière plus générale, le salaire à vie, pour qu’on ne perde pas notre vie à la gagner ».
« Nous sommes en colère face à l’attitude de froideur de l’État »
« La précarité tue, la solidarité sauve », pouvait-on lire sur la banderole tendue par des militants de Solidaires étudiants. Tout autour, les visages graves et les conversations feutrées traduisaient l’émotion des participants après ce passage à l’acte « irréparable », ainsi que le qualifiait lui-même le jeune homme dans son message.
Premier à prendre la parole, Amine, étudiant en sciences humaines et militant de Solidaires étudiants, a dénoncé au micro « la grande précarité touchant les étudiants due aux politiques menées depuis une cinquantaine d’années ». Pour Amine, « les revendications qu[e l’étudiant] a portées avant de passer à l’acte ne doivent pas être mises de côté. Le gouvernement doit agir enfin contre la précarité ».
Sa voix tremble un peu, il est visiblement ému, notamment lorsqu’il relit devant l’assemblée le texte de son ami et camarade de lutte. « Il dénonce aussi les responsables politiques qui ont organisé cette précarité généralisée », poursuit-il, sa lecture achevée. « Comme pour beaucoup d’autres, sa bourse lui a été refusée par le Crous, le précipitant ainsi dans une situation intenable. Ce contexte touche beaucoup trop d’étudiants ! », se révolte Amine.
« Nous sommes bouleversés, mais surtout en colère face à la froideur de l’État. Nous réclamons une prise de position officielle de Frédérique Vidal – la ministre de l’Enseignement supérieur – , pour l’heure toujours silencieuse ». Si le gouvernement ne réagit pas ? « Nous sommes prêts à aller au bras de fer. S’il ne fait rien, nous l’obligerons à prendre les mesures nécessaires », nous confie le représentant syndical.
« Comment peut-on vivre avec 450 euros par mois ? »
Que réclament les étudiants ? Principalement une augmentation importante des bourses d’études. « Comment peut-on vivre avec 450 euros par mois ? Et encore, c’est le haut du panier car la moyenne se situe autour de 200 euros », explique Amine.
Emma, étudiante, se sent très concernée par la précarité étudiante. « Je suis boursière et loin de chez moi. J’ai 250 euros de bourse et 100 euros de bourse au mérite, auxquelles s’ajoutent 130 euros d’APL. Avec un loyer de 350 euros, c’est la galère ! » À ses côté, une autre Emma. Non boursière, cette dernière estime être plus privilégiée mais se déclare solidaire. « Nous devrions plutôt assurer notre futur que la fin de mois. Tout le monde devrait se mobiliser ! »
Dans le collimateur des étudiants, le Centre régional des œuvres universitaires (Crous). « Ce 29 novembre, doit se dérouler son conseil d’administration qui va voter son budget », indique, quant à lui, Julien, étudiant en journalisme. « Ce sont des gens en costard qui prennent des décisions pour des gens qu’ils ne voient jamais et n’ont aucune idée de nos conditions de vie », explique-t-il. Avant d’inviter les participants à venir « leur montrer que ces personnes-là existent », ainsi qu’à s’exprimer à travers la page Facebook Résidents de Berlioz mobilisés.
« Nous devons donner à ce geste tout le symbole et l’ampleur qu’il doit avoir »
D’autres intervenants dont des représentants syndicaux et des enseignants vont, tour à tour, prendre la parole. Telle Isabelle, professeure de littérature comparée. « Il n’est absolument pas normal qu’un jeune homme éprouve la nécessité de se livrer à un acte pareil. Nous devons donner à ce geste tout le symbole et l’ampleur qu’il doit avoir », clame-t-elle.
D’autres vont évoquer les nombreuses luttes en cours, nationales ou internationales. Avant de donner rendez-vous pour les prochaines mobilisations, en particulier la grève prévue le 5 décembre prochain.
Concernant les suites à apporter au mouvement, une des intervenantes propose des blocages sur le campus martinérois, suite à la décision de Solidaires étudiants Lyon 2 de bloquer les campus de Bron et des bords du Rhône, ce mercredi 13 novembre. Toujours est-il que la lutte est bel et bien engagée. « Il faut un changement immédiat et radical, il faut que tout cela cesse ! », exhorte Solidaires étudiants.
Joël Kermabon