Le col­lec­tif Citoyens pour le Climat Grenoble répond aux « contre-véri­tés » des par­ti­sans du Ceta

Le col­lec­tif Citoyens pour le Climat Grenoble répond aux « contre-véri­tés » des par­ti­sans du Ceta

FOCUS – Les dépu­tés fran­çais ont tran­ché ce mardi 23 juillet… et ont voté pour la rati­fi­ca­tion du traité de libre-échange avec le Canada. Alors qu’Émilie Chalas a publié sur son site un billet défen­dant le Ceta, le col­lec­tif Citoyens pour le Climat Grenoble réplique dans un com­mu­ni­qué envoyé à tous les par­le­men­taires de l’Isère. Et entend mettre au jour les « contre-véri­tés » affir­mées par la majo­rité depuis plu­sieurs semaines.

C’est (presque) la fin des espoirs pour les mili­tants en faveur de la tran­si­tion éco­lo­gique et sociale. Même si les séna­teurs doivent encore la voter, les dépu­tés fran­çais ont en effet approuvé la rati­fi­ca­tion du Ceta mardi 23 juillet par 266 voix contre 213. En réponse au billet d’Émilie Chalas, le col­lec­tif Citoyens pour le Climat (CPLC) Grenoble a publié, le même jour, un contre argu­men­taire métho­dique et dénoncé des « contre-véri­tés mani­festes, dont cer­taines font preuve d’une fla­grante mal­hon­nê­teté intel­lec­tuelle ».

Les mili­tants des marches pour le cli­mat pré­cisent tou­te­fois qu’ils ne sou­haitent « en aucun cas jeter l’opprobre sur madame Chalas en par­ti­cu­lier, d’autant que ces argu­ments sont uti­li­sés par d’autres défen­seurs du Ceta et membres de la majo­rité ». Ils expriment mal­gré tout leur regret qu’aucun par­le­men­taire isé­rois favo­rable au Ceta ne se soit rendu à la réunion publique orga­ni­sée le 12 juillet dernier.

Greta Thunberg, jeune militante pour le climat au Parlement Européen de Bruxelles, a fait un discours avant le vote des députés. CC <a href="https://www.flickr.com/people/36612355@N08" rel="noopener" target="_blank" data-lazy-src=

Quelques heures avant la rati­fi­ca­tion, la jeune mili­tante éco­lo­giste Greta Thunberg a pris la parole devant les dépu­tés afin de les convaincre de ne pas rati­fier l’ac­cord. « Je suis convain­cue que le plus grand dan­ger ce n’est pas le fait d’être inac­tif. Le plus gros dan­ger c’est lorsque les entre­prises, les poli­tiques, font sem­blant d’agir alors que rien n’est fait, sauf de belles cam­pagnes de com­mu­ni­ca­tion », a‑t-elle déploré dans la salle Victor-Hugo de l’Assemblée.

De pro­fondes inquié­tudes concer­nant la sou­ve­rai­neté légis­la­tive des États

En dis­cus­sion depuis 2009, le Ceta a long­temps été repoussé en rai­son d’inquiétudes éta­tiques et citoyennes concer­nant les « tri­bu­naux d’arbitrages ». Une juri­dic­tion qui entend régler les conflits entre États et inves­tis­seurs étrangers.

Marche pour le climat à Grenoble le 24 mai 2019 © Florent Mathieu - Place Gre'net

Marche pour le cli­mat orga­ni­sée par le col­lec­tif Citoyens pour le cli­mat (Il est encore temps) à Grenoble le 24 mai 2019. © Florent Mathieu – Place Gre’net

Le prin­cipe ? Si un État euro­péen adopte une loi com­pro­met­tant les échanges, il pourra être condamné à payer de lourds dom­mages et inté­rêts aux inves­tis­seurs. Notamment aux mul­ti­na­tio­nales nord-amé­ri­caines. De quoi dis­sua­der rapi­de­ment les gou­ver­ne­ments euro­péens de toute vel­léité, alors qu’ils peinent déjà à légi­fé­rer en faveur de la tran­si­tion écologique.

Nicolas Hulot à Grenoble le 13 avril 2018 pour saluer la feuille de route sur la pollution de l'air

Nicolas Hulot à Grenoble le 13 avril 2018. © Patricia Cerinsek

Également mobi­li­sée sur le sujet, la fon­da­tion Nicolas Hulot pré­cise que « seuls les inves­tis­seurs peuvent atta­quer les poli­tiques publiques des États, qu’ils juge­raient défa­vo­rables à leurs inté­rêts. Les États n’ont aucun recours pos­sible face aux inves­tis­seurs et les inves­tis­seurs n’ont aucune obli­ga­tion en matière de res­pect des droits humains, de l’en­vi­ron­ne­ment ou des règles fis­cales. »

Un « véto cli­ma­tique » sans « aucune exis­tence légale »

L’ancien ministre de l’Environnement avait aussi demandé l’introduction d’un amen­de­ment garan­tis­sant un « véto cli­ma­tique » aux États. Les archi­tectes du traité ont entendu l’a­vis du ministre mais aucun amen­de­ment de ce genre ne figure dans l’accord. En l’état, ce dis­po­si­tif « ne bloque en rien la pro­cé­dure [ndlr : d’arbitrage] », déplore le CPLC. Il n’a par ailleurs aucune exis­tence légale.

Le méca­nisme pro­posé “per­met­trait en cas d’accord de l’UE et du Canada (et uni­que­ment s’ils sont d’accord) de trans­mettre une décla­ra­tion com­mune au panel d’ar­bitres à qui il appar­tien­drait tou­jours de sta­tuer sur le cas. Ce n’est par consé­quent pas un véto », s’indigne la fondation.

Un déca­lage des normes sani­taires et envi­ron­ne­men­tales jugé dangereux

Le CPLC attaque éga­le­ment les argu­ments de la majo­rité visant à ras­su­rer les consom­ma­teurs sur les pro­duits impor­tés du Canada. En effet, les normes sani­taires et envi­ron­ne­men­tales nord-amé­ri­caines sont beau­coup moins contrai­gnantes que les normes européennes.

De nombreux pesticides ont des effets de perturbateurs endocriniens. Crédit Fotolia

De nom­breux pes­ti­cides ont des effets de per­tur­ba­teurs endo­cri­niens. © Fotolia

Une situa­tion qui inquiète agri­cul­teurs et citoyens, sou­cieux de voir s’évaporer les pré­cau­tions euro­péennes en terme d’alimentation. Confrontée à une concur­rence accrue, l’a­gri­cul­ture tra­di­tion­nelle risque en outre à leurs yeux de deve­nir encore plus pro­duc­ti­viste, inten­sive et gour­mande en pes­ti­cides. C’est pour­quoi, pour la pre­mière fois, les syn­di­cats agri­coles fran­çais se sont una­ni­me­ment oppo­sés au traité.

Pour ras­su­rer les consom­ma­teurs, l’article 24.4 entend « pro­té­ger » les normes envi­ron­ne­men­tales et sani­taires euro­péennes. Ce qu’affirment d’ailleurs depuis plu­sieurs semaines les par­ti­sans du traité. Ces der­niers crient ainsi haut et fort que « le res­pect des normes sani­taires et envi­ron­ne­men­tales euro­péennes est ins­crit clai­re­ment dans le Ceta ». Et ont d’ailleurs demandé à la Direction géné­rale de l’alimentation de confir­mer leurs pro­pos… en vain.

Mais, pour la Confédération pay­sanne de l’Isère « l’acceptation de ces pro­duits néfastes va aug­men­ter les pres­sions pour com­mer­cia­li­ser des OGM, des nou­veaux anti­bio­tiques et pour ne pas inter­dire le gly­pho­sate… ». « Ce traité va à l’encontre des attentes des consom­ma­teurs fran­çais ! Et il bafoue les efforts réa­li­sés par les pay­sans fran­çais », pour­suit le syndicat.

Pas de « bœuf aux hor­mones » mais des farines ani­males et des antibiotiques

Autre sujet d’inquiétudes des consom­ma­teurs : les farines ani­males et anti­bio­tiques uti­li­sés pour nour­rir les bovins canadiens.

« Contrairement à ce qu’a long­temps pré­tendu le gou­ver­ne­ment, le Canada auto­rise bien les farines de sang de bovin et les farines de viandes et d’os de volailles et de porc dans l’a­li­men­ta­tion des bovins. Cela signi­fie que les viandes issues d’a­ni­maux nour­ris avec ces farines ani­males pour­ront bien béné­fi­cier des droits de douane nuls pré­vus par le Ceta », affirme le CPLC. Idem pour les anti­bio­tiques, précise-t-il.

Une situa­tion inad­mis­sible pour le col­lec­tif de défense du cli­mat gre­no­blois, qui consi­dère en outre le sys­tème de contrôle cana­dien insuf­fi­sant. En effet, « 200 faux cer­ti­fi­cats sani­taires cana­diens ont été iden­ti­fiés dans des pro­duits de porc expor­tés vers la Chine le mois dernier ».

Dangers éco­no­miques pour les agri­cul­teurs, risques sani­taires pour les consom­ma­teurs, perte de sou­ve­rai­neté pour les États… Le col­lec­tif Citoyens pour le Climat ne pré­sage rien de bon pour « l’a­près-rati­fi­ca­tion » du traité. Quoi qu’il en soit, son adop­tion défi­ni­tive dépend encore des votes des 14 par­le­ments euro­péens qui ne l’ont pas encore ratifié.

Nina Soudre

UN TRAITÉ EN CONTRADICTION AVEC LES ACCORDS DE PARIS ?

Dans son billet du 12 juillet, la dépu­tée LREM Emilie Chalas ten­tait de ras­su­rer les citoyens sur l’avenir des poli­tiques envi­ron­ne­men­tales en cas de rati­fi­ca­tion du traité.

Elections législatives. Soirée électorale à la Préfecture de l'Isère. 11 juin 2017. © Yuliya Ruzhechka - Place Gre'net

Emilie Chalas. Députée de la 3ème cir­cons­crip­tion de l’Isère © Yuliya Ruzhechka – Place Gre’net

Elle rap­pe­lait en effet que « le Président de la République a lui-même […] appelé à ne plus signer d’accord avec les États qui ne res­pectent pas l’Accord de Paris ».

Une ques­tion appa­raît donc en toile de fond : le Canada res­pecte-t-il ces enga­ge­ments ? Difficile à dire au regard des inves­tis­se­ments du pays dans des éner­gies non renou­ve­lables, telles que le gaz de schiste ou le sable bitu­mi­neux. Le CPLC rap­pelle d’ailleurs que la moi­tié du pétrole cana­dien pro­vient de l’exploitation de ces sables.

D’autant plus que « le Canada est un des pires pays du monde en termes d’émission de GES [gaz à effet de serre, ndlr] par habi­tant », rap­pelle le col­lec­tif. Il est éga­le­ment le seul à avoir quitté le pro­to­cole de Kyoto. Pour les mili­tants, « le Canada n’a aucune chance de res­pec­ter l’accord de Paris tant qu’il ne réorien­tera pas sa poli­tique énergétique ».

La France déjà rap­pe­lée à l’ordre au sujet de ses engagements

Nuage de pollution sur Grenoble

Nuage de pol­lu­tion sur Grenoble – © Véronique Serre

Le CPLC rap­pelle éga­le­ment la conclu­sion ren­due le mois der­nier par le Haut Conseil pour le Climat. À l’instar du Canada, « la France n’est pas sur une tra­jec­toire d’émission de gaz à effet de serre com­pa­tible avec ses enga­ge­ments inter­na­tio­naux ».

Les citoyens pré­cisent aussi qu’ « il n’existe pas dans le Ceta (…) de dis­po­si­tif per­met­tant de sanc­tion­ner ou d’exclure un État pour non-res­pect des enga­ge­ments de l’accord de Paris une fois l’accord signé. »

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