REPORTAGE VIDÉO - Près de 2 500 gilets jaunes, 1 500 selon la police, ont défilé ce samedi 19 janvier dans les rues de Grenoble pour l'acte X de cette mobilisation citoyenne. Des gilets jaunes venus de toute l'Isère, et des deux Savoie ont contribué à grossir les rangs des manifestants. Tout autant que la présence de "blouses blanches" des hôpitaux grenoblois ainsi que de syndicalistes de la CGT. Le tout en contrepoint du grand débat national initié par le gouvernement en début de semaine.
C'est sous un généreux soleil hivernal que s'est déroulé l'acte X de la mobilisation des gilets jaunes à Grenoble, ce samedi 19 janvier. Entre 2 000 et 2 500 personnes, 1 500 selon la police, ont ainsi arpenté le centre-ville de Grenoble durant toute l'après-midi. Soit davantage de participants que lors de l'acte IX, la semaine passée.
Et pour cause, des manifestants venus de communes de l'Isère, de Savoie et de Haute-Savoie ont contribué à grossir les rangs des gilets jaunes de l'agglomération grenobloise. Tout autant que le ralliement de “blouses blanches” des hôpitaux grenoblois et de syndicalistes de la CGT. De quoi faire de cette mobilisation la plus importante depuis les débuts du mouvement à Grenoble. Le tout en contrepoint du grand débat national initié par le gouvernement ce mardi 15 janvier.
Continuer à maintenir la pression et créer des projets constructifs
À l'évidence, ce débat n'a pas marqué le coup d'arrêt du mouvement, loin s'en faut. « Ce grand débat va durer deux mois, mais aujourd'hui les familles […] sont déjà dans l'urgence. L'urgence c'est maintenant, pas dans deux mois », lance au porte-voix Julien Terrier, l'un des “leaders” isérois du mouvement.
Pour ce dernier, les objectifs à court terme des gilets jaunes sont très clairs. « Nous allons continuer à maintenir la pression en manifestant dans la rue mais aussi créer des projets constructifs et prometteurs », clame-t-il devant la foule rassemblée au pied de la tour Perret.
Partie comme à l'accoutumée du parc Paul-Mistral, la manifestation s'est déroulée de manière pacifique, en dehors de quelques moments de tension avec la police. Pour autant, malgré l'absence de blocage, les usagers du tram et les automobilistes ont une nouvelle fois fait les frais de cette énième déambulation fluorescente.
Résumé en images de cette manifestation mieux organisée, encadrée par un service d'ordre interne discret et des “street medics” (soignants bénévoles) :
La création d'une association dissociée des gilets jaunes
Quid de l'avenir du mouvement grenoblois ? L'annonce de Julien Terrier juste avant la manifestation de créer « des projets constructifs » va se concrétiser. C'est du moins ce qu'il nous a assuré en évoquant plusieurs initiatives locales. La plus importante à ses yeux ? La création d'une association, comme cela s'est déjà fait dans d'autres régions en France. Avec une spécificité toutefois : « Nous voulons que cette association soit dissociée des gilets jaunes. Pas pour faire autre chose, mais pour être complémentaire », commence-t-il par expliquer.
Pour le leader grenoblois, s'il est salutaire de vouloir changer les choses aux niveaux national ou européen, « il faut aussi les changer au niveau local ». Les objectifs de cette structure associative ? « Pouvoir interagir avec les collectivités locales ou avec les associations de quartier. Notamment pour aider les familles en difficulté », précise Julien Terrier. Mais aussi pour régler les problèmes de financements.
« Les cagnottes c'est bien mais nous sommes face à un problème de transparence, reconnaît Julien Terrier. Avec l'association, nous pourrions disposer d'un fonds pour soutenir les actions des gilets jaunes. » Toujours est-il que la naissance de cette association est imminente puisque qu'un groupe de personnes intéressées sera créé dès la prochaine semaine.
Un « jardin des gilets jaunes » pour aider les familles dans le besoin
Également dans les cartons, le projet de création d'un « jardin des gilets jaunes ». Une idée née des cabanes qui se sont montées sur différents points de rassemblement, la plupart détruites, dont celle de Voreppe. « Elles nous donnaient pas mal de visibilité mais imprimaient, pour certaines, une mauvaise image du mouvement. Une image brouillée par leur occupation, notamment pendant la nuit, par des individus quelque peu portés sur la bouteille », estime Julien Terrier.
Les démolitions de ces cabanes ont frappé les esprits. Aussi, pas question de repartir sur les mêmes bases. « Ce jardin nous donnera une meilleure visibilité. Il aura une emprise sur des lieux occupés légalement. La police aura ainsi plus de difficultés à nous en déloger », explique le jeune entrepreneur.
« Nous pourrons faire des plantations, de la permaculture. Cela nous sera utile puisque tout ce qui va pousser et que nous allons récolter sera attribué à des familles dans le besoin, des SDF… », se prend à rêver Julien Terrier. Ce jardin continuera d'exister même si le mouvement prend fin. « Les gilets jaunes vont certes le créer mais des citoyens pourront ensuite s'emparer de ce projet. C'est une des choses dont pourra, à titre d'exemple, s'occuper la future association », souligne Julien Terrier.
Un Ric organisé dans les règles initiées par les gilets jaunes
Dernier projet, la création d'un référendum d'initiative citoyenne (Ric). « Nous voulons créer un Ric “officieux” non initié par la municipalité ou par le gouvernement sur Grenoble », annonce Julien Terrier. L'idée ? « On veut montrer que le peuple est souverain et que nous sommes force de propositions », revendique-t-il.
Ce Ric sera organisé dans les règles « avec une urne et un huissier pour le dépouillement », assure le jeune homme. Un projet pour l'heure en gestation. « Nous n'avons pas encore tout défini, nous allons y travailler au courant des prochains jours pour toucher le plus de monde possible », prévoit Julien Terrier.
Quant au grand débat, il le juge toujours « très flou » et refuse l'idée des quatre thèmes imposés. Pour autant, pas question de bouder cette opportunité. Les gilets jaunes vont en organiser un à leur niveau. « On va jouer le jeu et nous verrons s'il en découle quelque chose », déclare prudemment le leader.
Joël Kermabon