EN BREF – Faut-il passer par la case LREM pour espérer décrocher un stage quand on est élève de troisième dans les quartiers prioritaires de Grenoble ? C’est ce que laisse à penser le compte-rendu d’une réunion publique de la députée de l’Isère Émilie Chalas. Les communistes grenoblois crient au clientélisme, la section En marche de l’Isère invoque, elle, un problème technique.
En organisant le 30 novembre dernier à La Villeneuve une réunion publique autour de « l’inclusion économique pour l’emploi et les quartiers », la fédération départementale de La République en marche et la députée de l’Isère Émilie Chalas se sont-elles lancées dans une opération clientéliste ?
C’est ce que dénonce le parti communiste de Grenoble. En cause ? Une réunion publique donc, organisée à la suite du discours du 22 mai d’Emmanuel Macron. Pour lutter contre l’exclusion sociale, le président de la République prônait l’inclusion économique.
Sitôt dit, presque sitôt fait ? Dans le cadre de la semaine de l’inclusion économique, la députée de l’Isère Émilie Chalas lançait donc un atelier-débat dans un des quartiers visés. Sans son collègue de banc Olivier Véran, annoncé puis excusé. Mais aux côtés de plusieurs intervenants.
Objectif ? « Réfléchir avec l’ensemble des acteurs aux moyens concrets de faciliter l’emploi des habitants des quartiers prioritaires », dixit le compte-rendu consultable sur le site de la députée.
Une réunion publique à quelles visées ?
Une soixantaine de personnes, habitants et associatifs des différents quartiers prioritaires de la ville étaient ainsi rassemblées aux côtés de représentants institutionnels comme Pôle emploi ou de représentants du monde économique, comme le Medef.
Avec quelles visées ? « À Grenoble, on a une industrie qui se porte très bien mais qui a besoin de main-d’œuvre. Or, il y a une sorte de défiance envers les patrons. Il faut donc mettre ces deux parties en relation », souligne Olivier Six, l’un des intervenants du Medef à la réunion publique.
L’intention parait louable. D’autant qu’Olivier Six, coiffé de sa casquette de représentant des PME industrielles à la chambre de commerce et d’industrie de Grenoble, est aussi à la tête de CIC Orio, une entreprise où les besoins en main-d’œuvre sont criants. La société propose ainsi trente postes de chaudronniers, soudeurs et électro-mécaniciens.
Sauf que depuis la mi-décembre, Olivier Six est devenu, après plusieurs mois de tractations internes, le… référent départemental d’En marche en Isère. Et que le compte-rendu de la réunion publique sur le site internet d’Émilie Chalas laisse planer comme un malaise.
Un compte-rendu dans lequel Olivier Six revient sur les difficultés rencontrées par les entreprises à recruter. Et, ce faisant, sur l’importance des stages ouverts aux collégiens de troisième. Jusqu’à proposer, au nom du Medef Isère, une trentaine de stages dans des entreprises à destination des jeunes des quartiers de Grenoble. Mais une proposition accompagnée d’une précision qui a fait bondir la section de Grenoble du PCF.
« Les personnes intéressées par ces stages sont invitées à prendre contact avec l’équipe parlementaire et à envoyer leur CV à emile.chalas@assemblee-nationale.fr », précise le compte-rendu. Faut-il passer par la case LREM pour espérer décrocher un stage ? s’interroge Nicolas Beron Perez, le secrétaire de la section grenobloise du PCF. Olivier Six plaide un « problème technique ».
« Il fallait un point d’entrée. On a mis l’adresse de la permanence parlementaire »
« Il fallait un point d’entrée. On aurait mis l’adresse medef.com, on aurait été taxé de faire la campagne du Medef… soupire-t-il. Il n’y a aucun filtre. Et non, on n’offre pas un stage pour avoir autre chose. Il n’y a rien de clientéliste dans la démarche. Le député a un rôle d’animateur du territoire. »
Les communistes n’y croient guère. Ils pointent des « logiques de connivence et des tentatives de création d’un réseau qui pourrait s’apparenter à la mise en place d’un système clientéliste » et s’en réfèrent à la définition formulée par Anticor.
Un processus de recrutement opaque, donc, pour le PCF. Ce dernier dénonce par ailleurs le double discours d’Émilie Chalas, « qui consiste à détruire des droit collectifs d’un côté, et de l’autre à distribuer des miettes au niveau local afin de se constituer des obligés ».
Patricia Cerinsek