FOCUS – La présidente de la Commission des Affaires économiques au Sénat Sophie Primas était en visite en Isère le lundi 4 juin, à l’invitation des sénateurs de l’Isère Frédérique Puissat et Michel Savin. Les trois parlementaires Les Républicains ont suivi une « journée sénatoriale sur l’agriculture ». L’occasion de visiter des exploitations et de confier leurs impressions sur la future loi Agriculture et alimentation.
« Le cœur du problème, c’est comment faire gagner de l’argent aux agriculteurs », a insisté Sophie Primas. La présidente de la Commission des affaires économiques au Sénat était en Isère lundi 4 juin, à l’invitation des sénateurs Frédérique Puissat et Michel Savin, pour une « journée sénatoriale sur l’agriculture ». L’occasion pour les trois Républicains de s’exprimer sur la loi Agriculture et alimentation, adoptée par l’Assemblée nationale le 30 mai dernier, et qui sera soumise très prochainement au Palais du Luxembourg.
Visite à Voiron d’une cuisine collective du Département desservant des collèges, de la Ferme bio des Colibris à Méaudre ou de la coopérative Vercors Lait à Villard-de-Lans, rencontre avec des acteurs de l’agriculture iséroise… L’objectif était bien, explique Sophie Primas, de « confronter les textes généraux à la réalité territoriale ». En particulier, souligne Michel Savin, dans un département d’agriculture de montagne qui compte beaucoup de petites exploitations.
« La loi donne un cadre et c’est important, mais il faut que l’on soit très vigilant à ce que ces lois permettent la liberté territoriale », indique Sophie Primas. La crainte des sénateurs ? Que de nouvelles normes viennent perturber l’activité d’exploitations ou de coopératives qui ont très bien su s’organiser toutes seules. « Il ne faut pas que certains textes les mettent en difficulté avec des orientations compliquées », résume encore Michel Savin.
Un texte à améliorer, juge la sénatrice
Quel regard portent les sénateurs Les Républicains sur la loi Agriculture et alimentation, directement issue des États généraux de l’alimentation ? Si Sophie Primas juge le projet bon sur le fond, elle ne manque pas d’exprimer quelques réserves. Ses attaques les plus virulentes concernent la deuxième partie du texte. Une portion largement commentée dans l’opinion publique, englobant la non-interdiction du glyphosate, l’autorisation des « fermes-usines », de la castration à vif des porcelets ou encore du broyage des poussins mâles et canetons femelles…
Quel équilibre financier entre distribution et production pour permettre aux agriculteurs d’être mieux rémunérés ? © Florent Mathieu – Place Gre’net
« Nous sommes passés de six articles à soixante, avec une profusion d’imagination et de positionnements des uns et des autres, des amendements “Je n’y connais rien, mais je pense que ce serait mieux comme ça“ », moque volontiers la sénatrice. Et de déplorer une partie qu’elle juge avant tout vouée à la communication, « au moment même où l’on négocie la Pac [Politique agricole commune de l’Union européenne, ndlr] et que la France est terriblement absente ».
C’est finalement la première partie du texte que Sophie Primas et ses collègues veulent retenir. Un texte qui vise à réglementer les négociations entre producteurs, transformateurs et distributeurs, en fixant notamment un prix de revient idéal pour les agriculteurs. Mais comment y parvenir alors qu’un litre de lait peut être produit dans une petite exploitation du Vercors difficile d’accès ou bien dans une structure très accessible disposant d’un troupeau important ? « Le texte qui sort de l’Assemblée doit encore être amélioré », juge la sénatrice.
Une « course à la déflation » délétère ?
Mêmes doutes sur le relèvement des seuils de revente à perte (SRP). La loi prévoit en effet d’augmenter ce seuil de 10 %, autrement dit d’imposer aux distributeurs de revendre au détail un produit 10 % au-dessus de son prix d’achat. Une mesure, contestée par plusieurs chercheurs, et qui laisse perplexe la présidente de la Commission des affaires économiques au Sénat. « Je n’ai pas encore compris comment ça allait dans la poche des agriculteurs… », ironise-t-elle une nouvelle fois.
De gauche à droite, Frédérique Puissat, Sophie Primas et Michel Savin © Florent Mathieu – Place Gre’net
La volonté de la loi de réguler les promotions, sur les baisses de prix comme sur la volumétrie, trouve nettement plus grâce à ses yeux, même si elle est encore jugée insuffisante. Pour Sophie Primas, les promotions incessantes dans les grands commerces sont délétères : « On a tellement tiré les prix vers le bas qu’aujourd’hui ce n’est même plus une question de partage de la valeur, mais de création de valeur ! », dénonce-t-elle.
Et la sénatrice de se réjouir de l’interdiction du mot « gratuit » dans les annonces de promotions : « Quand on dit qu’un produit est gratuit, on instaure dans la tête du consommateur que rien n’a de valeur, y compris le travail des gens. » Plus qu’une question de coût, Sophie Primas voit aussi dans les promotions à répétition une « course à la déflation » qui crée une véritable perte de repères. Signe, concluent les trois parlementaires, d’une société où les citoyens perdraient la conscience de la valeur et du coût des choses.