EN BREF – L’hôpital Couple enfant du CHU de Grenoble a présenté, ce mardi 3 mars, une nouvelle chirurgie mini-invasive dite « révolutionnaire » pour le traitement de la scoliose. Cette technique représente, pour des patients en phase de croissance, une réelle alternative à la classique chirurgie de fusion spinale permettant de stabiliser une scoliose. Ses principaux intérêts ? La modulation de la croissance de la colonne vertébrale de façon continue, des incisions réduites et une réduction du temps de récupération des patients.
Ce mardi 3 avril a eu lieu une opération de la scoliose mini-invasive vidéo-assistée d’un adolescent scoliotique de 14 ans à l’hôpital Couple Enfant du Centre hospitalier universitaire Grenoble-Alpes (Chuga). Cette opération réalisée par le Pr Aurélien Courvoisier, chirurgien orthopédique, était la quinzième utilisant une technique « révolutionnaire » pour le traitement de la scoliose.
Le nom de cette chirurgie innovante qui n’existe que depuis deux ans en France ? La VBT ou Vertebral body tethering [attache du corps vertébral, ndlr] pratiquée par seulement deux chirurgiens français, dont le chirurgien grenoblois.
Une technique qui renforce l’arsenal thérapeutique existant au CHU, tout en offrant une réelle alternative à la traditionnelle « chirurgie de fusion vertébrale », traitement chirurgical de référence pour cette pathologie. Avec toutefois une condition sine qua non : qu’il s’agisse d’adolescents en phase de croissance.
Seulement trois ou quatre incisions de 2 à 3 centimètres nécessaires
« Cette opération est destinée à des enfants qui n’ont pas fini leur croissance, ce qui permet d’intervenir plus tôt, mais qui ont une déformation du dos importante avec une courbure de l’ordre de 40 à 45 degrés », nous explique le Pr Aurélien Courvoisier.
Le principe est relativement simple : « il s’agit de bloquer chirurgicalement la croissance de la colonne vertébrale au niveau de la convexité de sa courbure », explique le CHU. L’objectif étant, considérant l’âge des jeunes patients, de « relancer et de moduler » la croissance dans la concavité pour que, progressivement, la colonne vertébrale se corrige dans les mois et années suivant l’opération.
Une opération entièrement réalisée sous thoracoscopie durant laquelle le chirurgien vient placer les implants au niveau des vertèbres en s’aidant des images captées par une caméra. « On ne passe pas dans le dos, on passe au niveau du thorax – sous l’aisselle – pour accéder à la cavité thoracique et avoir une très bonne vision de la colonne vertébrale », décrit le Pr Aurélien Courvoisier.
Une chirurgie mini-invasive car seules trois ou quatre incisions de 2 à 3 centimètres sont nécessaires pour réaliser l’ensemble de l’opération. Un avantage important si l’on considère la longue incision pratiquée le long de la colonne dans le cas de la traditionnelle technique de fusion vertébrale.
Le chirurgien place ensuite des vis dans les vertèbres et les relie par un câble en tension, constituant ainsi une sorte de corset interne. Juste après l’opération, la colonne vertébrale est ainsi déjà plus droite, l’objectif étant que la courbure du dos puisse continuer à se corriger progressivement au fur et à mesure de la croissance.
« Les enfants vont plus vite bien, ils récupèrent très vite de l’opération »
« Cette opération ne va pas tout remplacer, elle ne peut pas remplacer l’habituel corset prescrit pour les petites scolioses mais elle va venir s’insérer avant l’opération de fusion vertébrale en fin de croissance, là où il n’y avait rien jusqu’à présent », précise Aurélien Courvoisier.
Pour autant, « si l’intervention reste une chirurgie assez lourde, on constate que par rapport à l’opération conventionnelle, les enfants vont beaucoup plus vite bien, ils récupèrent très vite », ajoute le chirurgien.
Quid de l’efficience de cette chirurgie ? « Le Dr Vincent Cunin du CHU de Lyon s’est rendu durant une année au Canada pour explorer cette technique avec des confrères canadiens qui ont déjà opéré plus d’une centaine de patients. Des publications internationales scientifiques ont montré l’efficacité de cette technique », explique le Pr Courvoisier.
« Il est toutefois primordial de bien sélectionner les personnes susceptibles de bénéficier de cette chirurgie », souligne le professeur. « Si dans le monde ça bouge, notamment aux États-Unis, au Canada et en Turquie, le Dr Cunin et moi-même sommes les seuls en France. Pour l’instant, nous sommes dans une phase d’évaluation mais nous avons bon espoir que cela puisse contribuer à diminuer les opérations de fusion vertébrale », conclut Aurélien Courvoisier.
Joël Kermabon