FOCUS – Avec sa dernière exposition, De Delacroix à Gauguin, chefs‑d’œuvre dessinés du XIXe siècle du musée de Grenoble, visible du 17 mars au 17 juin 2018, le musée de Grenoble clôt un cycle entamé dès l’arrivée de son directeur Guy Tosatto en 2006. Le fonds de dessins anciens du musée a été passé au peigne fin et donne lieu, après plusieurs rendez-vous, à cette conclusion sur l’art graphique au XIXe siècle. Un parcours dense et thématique dans un siècle incroyablement riche.
On n’attrape pas les mouches avec du vinaigre. Expression qu’on accommoderait bien, façon musée de Grenoble, de la manière suivante : « On n’attrape pas les visiteurs sans grand nom de la peinture ».
La dernière exposition inaugurée par le musée le 16 mars 2018, De Delacroix à Gauguin, chefs‑d’œuvre dessinés du XIXe siècle du musée de Grenoble, s’appuie, dans son titre, sur la renommée des deux peintres cités. Si le premier est bel et bien présent à travers plusieurs dessins et esquisses, on ne trouvera du second qu’une seule aquarelle. Feuille, en recto-verso, extraite de l’un des carnets du peintre, qui s’appréciera au terme d’une exposition organisée autour du fonds de dessins que possède le musée.
On excuse cependant volontiers le musée de cette petite astuce de communication devant le parcours tout à fait pertinent qu’elle a su ménager via ces 115 pièces du XIXe siècle. Manière de montrer, comme l’a souligné Guy Tosatto, son directeur, que le musée possède là une véritable collection qu’il s’agira de mettre en ligne par la suite.
Un parcours thématique
Au regard du sous-titre de l’exposition, « chefs‑d’œuvre dessinés du XIXe siècle », on s’attend d’abord à suivre un cheminement chronologique fondé sur l’enchaînement des mouvements picturaux les plus fameux. Rien de tel. Ce sont les rapprochements thématiques – le renouveau de la peinture religieuse, les séductions de l’Orient, les artistes et la guerre, etc. – qui se sont substitués à cette division.
Le directeur du musée de Grenoble, Guy Tosatto, s’en est expliqué. « Pour un tel découpage, il nous aurait manqué certains grands noms. »
Une salle entière est néanmoins dédiée à Eugène Delacroix et, plus précisément, aux dessins et esquisses préparatoires réalisées lors de l’un de ses voyages en Afrique du Nord. Comme nombre de ses contemporains, il est séduit par une végétation, des costumes et des mœurs dont il tente de saisir les spécificités sur ses carnets et feuilles volantes.
« La plupart des feuilles ont été couvertes en marche, sur le pommeau de la selle ou sous l’ombre des figuiers, aux haltes, et le soir, quand tout le monde dormait accablé de fatigue, repassées à l’aquarelle dans le silence de la tente », a précisé le comte de Mornay, auquel s’était joint le peintre lors d’une délégation diplomatique menée en 1832 au nom du roi Louis-Philippe.
Le dessin : un art plus « exigeant »
« Nous avons choisi d’accompagner les dessins de davantage de texte. Car le dessin est plus exigeant dans son approche que la peinture ou la sculpture », prévient Guy Tosatto. Par ses dimensions plus modestes d’abord, on sera moins facilement captivé par un dessin que par une toile. Les dessins exposés sont aussi, pour certains, des ébauches, un travail préparatoire en vue d’une toile. Mais Valérie Lagier, qui a réalisé le commissariat d’exposition, note que certains dessins exposés ont aussi été réalisés pour eux-mêmes.
La section intitulée « Dans la sphère impressionniste », notamment, comporte également de très belles aquarelles. Les Monet, Renoir ou Sisley – si plébiscités par les visiteurs – ne figurent pas parmi les artistes exposés il est vrai. Mais l’aquarelle Bateaux au bord de l’eau, entre autres, vaut franchement le détour par le savoir-faire chromatique qu’y déploie Eugène Deshayes.
« Le travail directement sur la toile, face au motif […] s’accommode mal de longues étapes préparatoires. Les artistes impressionnistes ont peu dessiné […]. Il n’en reste pas moins que certains peintres avant eux – comme Félix Ziem, Eugène Boudin et Johan Barthold Jongkind – ont dans leurs aquarelles recherché cette instantanéité, cette transcription des phénomènes atmosphériques que les impressionnistes tenteront d’approcher à la peinture à l’huile », avance Valérie Lagier dans le catalogue d’exposition.
Adèle Duminy
Infos pratiques
De Delacroix à Gauguin – Chefs‑d’œuvre dessinés du XIXe siècle du musée de Grenoble
17 mars – 17 juin 2018