Jérôme Safar : « Le vide que je suis censé lais­ser sera sans doute très vite rempli »

Jérôme Safar : « Le vide que je suis censé lais­ser sera sans doute très vite rempli »

ENTRETIEN - Jérôme Safar, au Parti socialiste depuis 1986, conseiller communautaire et président du groupe Rassemblement de gauche et de progrès au conseil municipal de Grenoble, a décidé de faire une croix sur sa carrière politique. Après son cuisant échec aux élections municipales de 2014, les divisions au sein du PS lors des élections présidentielle et régionales ont été les gouttes d'eau qui ont fait déborder le vase. Place Gre'net a voulu en savoir plus sur les tenants et aboutissants d'une décision qui n'est, somme toute, qu'une demi-surprise.

 

 

 

Jérôme Safar lors d'une intervention au conseil municipal © Joel Kermabon - Place Gre'net

Jérôme Safar lors d'une intervention au conseil municipal. © Joël Kermabon - Place Gre'net

Poulain de l'ancien maire de Grenoble Michel Destot, Jérôme Safar a successivement occupé les postes d'adjoint à la culture et de premier adjoint chargé des finances et de la sécurité, avant d'être le candidat malheureux aux élections municipales de Grenoble en 2014.

 

Aujourd'hui âgé de 50 ans, le président du groupe d'opposition Rassemblement de gauche et de progrès au conseil municipal rend donc son tablier politique. C'est du moins ce qu'il a annoncé – sans attendre la fin de son mandat –, le 9 octobre dernier, dans les colonnes du Dauphiné libéré :

 

« Vu l’état de ma réflexion aujourd’hui, il est clair que je ne serai pas candidat lors des prochaines élections municipales. Je ne partirai pas sur une liste. Oui, j’ai décidé de mettre un terme à ma carrière politique. »

 

Une demi-surprise

 

Une décision qui n'est, somme toute, qu'une demi-surprise si l'on se réfère à la tonalité des analyses à chaud postées régulièrement sur son compte Facebook durant, pendant et après les dernières élections présidentielle et législatives.

 

Des billets en filigrane desquels on pouvait percevoir les signes précurseurs d'une vraie désillusion politique. Que n'ont fait qu'amplifier les atermoiements et les divers retournements de vestes – voire les trahisons pour certaines « très violentes » – de ses camarades du Parti socialiste (PS).

 

Régionales 2015 en Rhône-Alpes-Auvergne : à gauche, Jean-Jack Queyranne, à droite Laurent Wauquiez.

Régionales 2015 en -Auvergne Rhône-Alpes : à gauche, Jean-Jack Queyranne, à droite Laurent Wauquiez.

L'élément déclencheur ? Les élections régionales de 2015, avec la guerre fratricide des barons Gérard Collomb et Jean-Jack Queyranne, dont il était le directeur de campagne. Une lutte qui a précipité l'accession de Laurent Wauquiez à la tête de la région Auvergne Rhône-Alpes. « Cela m'a presque plus déstabilisé que ma défaite aux municipale, c'est un paradoxe d'ailleurs », avoue sans ambages Jérôme Safar.

 

Autant de raisons qui ont fini par le convaincre « qu'il ne s'était pas engagé pour ça », a-t-il confié à notre consœur. Place Gre'net a souhaité en savoir plus sur les raisons qui ont poussé l'élu à jeter l'éponge mais aussi sur l'avenir du PS à Grenoble. Notamment son incarnation pour les – encore lointaines – élections municipales.

 

 

« LE VIDE QUE JE SUIS CENSÉ LAISSER SERA SANS DOUTE TRÈS VITE REMPLI »

 

 

Place Gre'net : Votre décision ne semble pas dater d'hier. Certaines de vos analyses au cours des dernières élections étaient marquées au coin d'une vraie déception, d'une perte de confiance dans le PS. Comment l'idée d'abandonner la politique a-t-elle cheminé dans votre esprit ?

 

Jérôme Safar : C'est une déception qui s'est installée chez beaucoup après les séquences présidentielles et législatives, mais qui était présente bien avant. Les choses ont alors beaucoup bougé et pas toujours dans le bon sens. C'était un peu la prime à l'instantanéité et pas au travail de long cours. Cela a sûrement joué dans une réflexion liée aussi à la nécessité pour moi, d'une certaine façon, de “réinitialiser le logiciel”.

 

Dépouillement votation citoyenne - Safar, Carignon, Clouaire © Florent Mathieu - Place Gre'net

Dépouillement votation citoyenne - Jérôme Safar, Alain Carignon et Pascal Clouaire. © Florent Mathieu - Place Gre'net

Il y a aussi un aspect que l'on évoque peu souvent, pourtant présent chez beaucoup d'élus locaux, qui est une espèce d'assèchement intellectuel. On est tellement pris par le quotidien et la nécessité de réagir sur tout et tout le temps qu'on ne prend plus beaucoup de recul. Cela a joué, indéniablement. Mais à aucun moment, en me rasant le matin ou pas, je me suis dit “c'est fini”. Je pense que c'est quelque chose qui a muri peu à peu.

 

 

Vous avez déclaré, juste après les élections législatives, que vous preniez vos distances avec le Parti socialiste. Vos convictions politiques restent-elles intactes ou bien avez-vous perdu le feu sacré ?

 

Aujourd'hui, je reste socialiste mais je ne suis plus encarté. C'est très clair. Je regarde ce qui se passe et comment les choses évoluent au niveau de la reconstruction du PS. Moi, j'ai besoin de clarté. On ne peut pas avoir au sein du parti des gens qui soutiennent Benoît Hamon, qui par ailleurs créé lui-même un mouvement à l'extérieur du parti, et d'autres qui sont en même temps pro-Macron mais qui restent socialistes.

 

A un moment, il va falloir choisir. Je n'ai pas milité pendant des années auprès de gens comme Michel Rocard ou d'autres pour me retrouver dans un parti qui soit une resucée des vieux partis de la IIIe et IVe République. J'ai un ADN de social-démocrate […] et je ne peux pas entendre parler d'un parti qui soit une espèce d'auberge espagnole sans ligne claire.

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Joël Kermabon

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