FOCUS – Après l’opération Deux mois sans ma voiture et la mise en œuvre des certificats de qualité de l’air, le SMTC, Métromobilité et l’Ademe lancent « Je plaque ma caisse ».
Ce dispositif expérimental inédit vise à inciter 1 000 métropolitains possédant un véhicule polluant à en réduire l’usage, voire à s’en séparer. Un divorce sans douleur et accompagné pour sensibiliser aux enjeux de la qualité de l’air et à la promotion des alternatives à la voiture.
« Plaque ta caisse, tu mérites mieux ! », « Plaque ta caisse, elle a deux fois ton âge ! » ou encore « Plaque ta caisse, elle est moche et elle pue ! »
Tels sont les messages chocs – exploitant le thème de la séparation – de la campagne de communication destinée au grand public qui se déroulera durant tout ce mois de septembre dans la métropole grenobloise.
Une opération d’envergure visant à faire connaître « Plaque ta caisse », le dispositif expérimental inédit que lancent conjointement le Syndicat mixte des transports en commun de l’agglomération grenobloise (SMTC), Métromobilité et l’Ademe.
Ce projet, qui s’étalera sur 2017 et 2018, nourrit l’ambition de recruter mille métropolitains propriétaires de vieux véhicules (certificats de qualité de l’air 4 et 5 ou non classés) afin de les sensibiliser à l’utilisation de modes de déplacement moins polluants.
Envisager un autre rapport à la voiture
« Il y a un peu moins d’un an, nous avions lancé une expérimentation des certificats de qualité de l’air […] Un dispositif qui a trouvé le succès escompté puisqu’il a été appuyé par une règlementation nationale, et que pas moins de 380 000 certificats ont été distribués sur notre territoire », rappelle, non sans satisfaction, Yann Mongaburu, le président du SMTC.
Pour les deux ans à venir, dans la continuité, le SMTC et l’Ademe appellent ni plus ni moins 1 000 propriétaires de véhicules « à plaquer leur caisse ». Avec, en contrepartie, des conseils ciblés qui seront doublés d’un accompagnement adapté et personnalisé. Ce qu’explique Yann Mongaburu, utilisant pour l’occasion la métaphore de la fin d’une histoire d’amour… avec sa voiture.
« C’est l’opération, inédite dans ce territoire, d’accompagner 1 000 personnes, sur la durée, ceux qui se questionnent pour envisager un autre rapport à la voiture », poursuit Yann Mongaburu. Qui se prend à espérer qu’après évaluation cette opération puisse être reproductible et déployée sur tout le territoire.
Entrevoir le champ des possibles
Jérôme D’Assigny, le directeur régional de l’Ademe en est persuadé, quand on s’occupe de questions de mobilité et de transports et, partant, de ce programme préfigurant la transition énergétique, on ne se trompe pas de cible. « L’enjeu c’est la qualité de l’air. Nous allons gagner des points sur chacun des critères qui nous intéressent. Sur les économies d’énergie, sur les gaz à effet de serre, sur le pouvoir d’achat, sur la fluidité du trafic dans la ville… », énumère le directeur.
L’opération Deux mois sans ma voiture – à laquelle ont participé 90 personnes dont 16 ont finalement abandonné leur véhicule – ainsi que le succès grandissant rencontré par le challenge annuel Au boulot, j’y vais autrement, « [ont laissé] à entrevoir le champ des possibles », explique Jérôme D’Assigny.
Lequel, optimiste, anticipe et présage que cette nouvelle expérimentation permettra, quant à elle, d’aller beaucoup plus loin. De fait, estime-t-il, « sur un territoire, 1 000 personnes c’est loin d’être négligeable et cela constitue un échantillon très important. »
Des conseils personnalisés prodigués par un conseiller mobilité
Quid des critères d’éligibilité à cette expérimentation ? Deux conditions. Habiter dans la métropole grenobloise et posséder un véhicule sans certificat ou avec un certificat 4 ou 5, ce qui représente potentiellement 25 % du parc automobile. Soit les véhicules qui doivent être retirés de la circulation le plus rapidement possible pour organiser la transition énergétique.
« C’est pour accompagner ceux-là que le SMTC et l’Ademe ont engagé des moyens », souligne Yann Mongaburu. Qui précise encore que les deux organismes financent à parts égales les coûts du projet.
Ensuite, il sera proposé à chacun des participants une séance de conseils personnalisés lors d’une rencontre avec un conseiller mobilité. Où ça ? Dans les locaux de l’Agence locale de l’énergie et du climat (Alec), de la Maison de la nature et de l’environnement de l’Isère (MNEI), de la Station mobile et plusieurs autres lieux répartis sur la Métropole restant à déterminer, en partenariat avec les communes de l’agglomération.
Un accompagnement d’une durée maximale de six mois
Comme suite logique de cette séance, les propriétaires des véhicules éligibles pourront gratuitement bénéficier d’offres d’essai. C’est ainsi qu’ils pourront tester différentes solutions : vélo – à assistance électrique (VAE) ou pas –, transports collectifs, train, covoiturage et autres alternatives de mobilité. L’objectif à atteindre consistant à valider les solutions préconisées en amont par le conseiller mobilité.
Puis – et c’est en cela que l’opération est inédite –, dans le cadre de la conduite du changement, viendra le temps d’un accompagnement sur mesure qui ne saurait excéder une durée de six mois. Il s’agira là, selon le SMTC, de « construire de façon pérenne de nouvelles habitudes ». Pour autant, les expérimentateurs ne seront pas complètement livrés à eux-mêmes.
Ils pourront en effet continuer à échanger directement avec leurs cicérones, mais aussi profiter d’avantages tarifaires, participer à des formations ou encore tout simplement partager des moments conviviaux.
Vers un Plan mobilité ?
À quelques encablures des Assises de la mobilité qu’appelle de ses vœux Nicolas Hulot, le ministre de l’Environnement, « cette expérimentation inédite pourrait verser aux débats et à un champ des possibles très largement ouvert », considère Yann Mongaburu, qui se réjouirait qu’un Plan mobilité vienne consolider ce type d’opération.
Quoi qu’il en soit, l’expérimentation s’achèvera fin 2019 par une évaluation qui devrait permettre d’en tirer tous les enseignements utiles et nécessaires. Quant au SMTC, si le test s’avère concluant, il n’est pas exclu qu’il puisse « installer dans la durée ce principe d’accompagnement individualisé des personnes », conclut Yann Mongaburu.
Joël Kermabon