Rassemblement de Grenoble anti-Linky, et contre la Smart City, samedi 11 mars, en marge de la biennale, villes en transition © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Grenoble anti-linky et PMO remettent la ques­tion de la “Smart city” sur la table

Grenoble anti-linky et PMO remettent la ques­tion de la “Smart city” sur la table

REPORTAGE – Dans le concert de satis­fe­cits pro­non­cés au cours de la Biennale des villes en tran­si­tion, le col­lec­tif Grenoble Anti-Linky a voulu mettre les pieds dans le plat. Il a ainsi rap­pelé son oppo­si­tion au comp­teur intel­li­gent linky et à la Smart city, avec un ras­sem­ble­ment le 11 mars devant la Belle élec­trique orga­nisé avec le concours des acti­vistes de Pièces et main d’œuvre. Si celui-ci n’a guère déplacé les foules, il a per­mis un échange fugace entre les réfrac­taires à la Smart city et Eric Piolle, maire de Grenoble.

Rassemblement de Grenoble anti-Linky, et contre la Smart City, samedi 11 mars, en marge de la biennale, villes en transition © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Rassemblement de Grenoble anti-Linky, et contre la Smart city, samedi 11 mars, en marge de la bien­nale, villes en tran­si­tion © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Sur le par­vis de la Belle élec­trique, où se tient, en cette après-midi du 11 mars, une ren­contre autour de « la frac­ture urbaine » dans le cadre de la bien­nale des villes en tran­si­tion, un petit attrou­pe­ment se forme.

Les mili­tants anti-comp­teur Linky et contre la ville intel­li­gente, alias Smart city, ont ins­tallé une table où sont posés à dis­po­si­tion du public – moyen­nant quelque menue mon­naie –, dif­fé­rents tracts décryp­tant « les excès », « les dan­gers » et « les des­sous » de Linky et de la Smart city. On recon­naît, à la lec­ture des textes, la griffe et les thèses déve­lop­pées par le mou­ve­ment Pièces et main d’œuvre (PMO), parti en lutte depuis les années 2000 contre ce qu’il appelle « les nécro­tech­no­lo­gies ».

L’objectif est clair pour les mili­tants : faire entendre une voix quelque peu déran­geante, contras­tant avec la tona­lité glo­ba­le­ment consen­suelle des pro­pos enten­dus, ici et là, et relayés dans les médias par­te­naires lors de la bien­nale. Mais aussi rap­pe­ler, si besoin était, que les tech­no­lo­gies com­mu­ni­cantes qui débarquent dans les villes et à pré­sent dans les loge­ments avec Linky, ne recueillent pas l’unanimité de tous. Quand bien même, un débat sur les enjeux de la Smart city n’é­tait pas au pro­gramme de la bien­nale, a contra­rio de la Semaine de la tran­si­tion, qui l’avait ins­crite au menu.

« Avec la smart city, on va deve­nir les pas­sa­gers de notre vie »

L’une des mili­tantes de PMO der­rière le stand explique les moti­va­tions du col­lec­tif Grenoble anti-linky : « Dans la ville intel­li­gente, tout doit être pré­vi­sible grâce au data, au big data même […] Votre frigo est connecté à Internet et fait les courses à votre place ! L’humain, c’est devenu l’erreur… Les Smart cities vont trans­for­mer les villes en villes-usines gérant des flux. On va deve­nir les pas­sa­gers de notre vie », décrit-elle, dégoûtée.

Avant d’é­vo­quer les risques de confi­den­tia­lité, tant les don­nées sont convoi­tées et peuvent être vola­tiles. Sans sur­prise, cette mili­tante s’oppose fer­me­ment à Linky « parce que c’est l’interface de la Smart city dans le foyer ! »

« Si on est intel­li­gent, on éteint la lumière en sor­tant d’une pièce ! »

Linky n’est plus un pro­jet, ce n’est pas de la science-fic­tion. Cela a démarré. Le comp­teur est déployé depuis décembre der­nier dans toute la Métropole. A Fontaine par exemple, où habite Chantal venue ce samedi par­ti­ci­per au ras­sem­ble­ment. Ce qui insup­porte au plus haut point cette dame dans la soixan­taine ? « C’est qu’on n’ait pas demandé l’avis des gens. Linky, ce n’est pas démocratique ! »

Affiche s'opposant à Linky

Affiche d’op­po­sants au comp­teur Linky.

Elle pour­fend aussi les éco­no­mies d’énergie que Linky est sup­posé per­mettre. « C’est une grosse fumis­te­rie ! On veut nous vendre des ser­vices et recueillir des infor­ma­tions per­son­nelles. Alors non merci, pas besoin de comp­teur intel­li­gent. Si on est intel­li­gent, on éteint la lumière, en sor­tant d’une pièce ! » Et Chantal de poin­ter la pol­lu­tion élec­tro­ma­gné­tique géné­rée par le comp­teur : « un futur scan­dale sani­taire », prédit-elle.

Linky émet en effet des émis­sions élec­tro­ma­gné­tiques clas­sées « can­cé­ro­gènes pos­sibles » par l’OMS. Si l’Agence natio­nale des fré­quences a mesuré que le rayon­ne­ment du Linky demeu­rait très faible, ses oppo­sants sou­lignent qu’il ouvre la voie à une longue série de cap­teurs ame­nés à se déployer dans les loge­ments… Augmentant ainsi le niveau de « pol­lu­tion électromagnétique ».

« Avec Eric Piolle, on n’a rien à se dire. Il n’écoute pas les Grenoblois »

Ce samedi, l’un des prin­ci­paux ani­ma­teurs de PMO – se pré­sen­tant sous le nom de “François Martin » pour cacher son iden­tité –, est venu dis­tri­buer des tracts aux per­sonnes se diri­geant vers l’entrée de la Belle élec­trique. En effet, à 17 heures, se tient une Rencontre autour de la frac­ture urbaine. Eric Piolle, le maire de Grenoble y intervient.

Eric Piolle accepte le tract du Collectif Grenoble anti-Linky, qui a organisé un rassemblement samedi 11 mars, en marge de la biennale, villes en transition © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Eric Piolle accepte le tract du Collectif Grenoble anti-Linky, qui a orga­nisé un ras­sem­ble­ment samedi 11 mars, en marge de la bien­nale, villes en tran­si­tion. © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Au pas­sage, il prend poli­ment un tract. François Martin, de Pièces et main d’œuvre, com­mente le bref échange que les deux hommes ont eus : « Il m’a dit qu’on devrait se par­ler… Mais non, on n’a rien à se dire. Eric Piolle n’écoute pas les Grenoblois, je ne vois pas pour­quoi il nous écou­te­rait nous », déclare le mili­tant. Le ton est donné.

Il faut dire que les anti-Linky ont été quelque peu échau­dés par les élus.

« Christophe Ferrari nous affir­mait le 9 mars 2016 que les gens pou­vaient refu­ser Linky. Le 1er avril, il fai­sait voter en conseil métro­po­li­tain le vœu en faveur de Linky », déplore la mili­tante de PMO.

Pour racon­ter leurs rela­tions tumul­tueuses avec la Métropole, les mili­tants ont pro­duit un quatre pages sous forme de « roman-pho­tos » dont le héros est le « vieux comp­teur ». Se vou­lant didac­tique et sati­rique, il met en scène les contra­dic­tions du pré­sident de la Métropole, jusqu’à l’irrup­tion des mili­tants au sein du conseil métro­po­li­tain, le 3 février der­nier, rame­nant fiè­re­ment leur prise de guerre : un Linky débranché…

« Ils har­cèlent les gens »

Revenons à Chantal, habi­tante de Fontaine. Pourra-t-elle s’opposer indé­fi­ni­ment à la pose du comp­teur intel­li­gent ? « Affirmatif », répond Grenoble anti-Linky, qui incite tous les habi­tants à s’opposer à l’installation de Linky. Et se pro­pose comme force de pres­sion, sou­tien tech­nique et même juri­dique. « Ils m’ont dit qu’ils fini­raient pas y arri­ver ! », s’énerve Chantal, pas prête à aban­don­ner son vieux comp­teur. « Enedis (ex-ERDF) sait qu’il n’a pas le droit d’imposer Linky réaf­firme une mili­tante, alors ils har­cèlent les gens, d’autant que les ins­tal­la­teurs reçoivent une prime sur chaque installation. »

Son de cloche plus timoré du côté de l’UFC-Que Choisir… L’association de consom­ma­teurs s’est d’abord bat­tue, en vain, contre la géné­ra­li­sa­tion de Linky et semble désor­mais décon­seiller de s’opposer à son installation.

Roman-photos, réalisé par Grenoble anti-Linky, mettant en scène Christophe Ferrari, président de la Métropole grenobloise, compétente en matière d'Energie

Roman-pho­tos, réa­lisé par Grenoble anti-Linky, met­tant en scène Christophe Ferrari, pré­sident de la Métropole gre­no­bloise, com­pé­tente en matière d’énergie.

Maigre affluence pour le rassemblement

À Grenoble, le gaz et l’élec­tri­cité sont dis­tri­bués par GEG, qui pré­pare un objet com­mu­ni­cant équi­valent à Linky… Mais d’ici 2024. Les oppo­sants ont donc le temps de voir venir. De quoi expli­quer qu’une petite tren­taine de per­sonnes seule­ment ait répondu à l’appel des anti-linky, ce samedi après-midi ?

Rassemblement de Grenoble anti-Linky, et contre la Smart City, samedi 11 mars, en marge de la biennale, villes en transition © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Rassemblement de Grenoble anti-Linky et contre la Smart city, samedi 11 mars, en marge de la bien­nale, villes en tran­si­tion. © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Les mili­tants ne semblent en tout cas visi­ble­ment pas déçus du peu d’af­fluence. « Nous n’avons pas trop fait de publi­cité », lancent-ils. Ils n’ont, en revanche, aucun doute sur la mon­tée en puis­sance de la mobilisation

« Dans l’agglomération, et aussi en France, tous les jours, des col­lec­tifs anti-linky se créent. Dans tous les pays où ce type de comp­teur est ins­tallé, il s’en crée éga­le­ment », sou­ligne l’ac­ti­viste de PMO. Dernier signe en date que la mobi­li­sa­tion se struc­ture : la créa­tion d’un col­lec­tif, Stop comp­teur Linky 38, qui réclame la tenue d’un réfé­ren­dum à l’échelle de la Métropole.

L’Allemagne a renoncé en 2015 au comp­teur intelligent

La Sem GEG et la Ville savent d’ores et déjà que des oppo­sants refu­se­ront le comp­teur made in Grenoble quand le moment de l’installation arri­vera… Des habi­tants sont en effet déjà sur leur garde, comme Myriam qui réside dans le centre-ville de Grenoble.

Siège Gaz Electricité de Grenoble (GEG) à Europole. © Elodie Rummelhard - placegrenet.fr

Siège de GEG à Europole. © Élodie Rummelhard – pla​ce​gre​net​.fr

« Les comp­teurs actuels fonc­tionnent très bien ! Alors que ces comp­teurs n’ont une durée de vie que de dix ans. Après, il fau­dra les rem­pla­cer ? Les recy­cler ?, s’in­surge-t-elle.

On est enva­his de tech­no­lo­gies dont on ne sait pas quoi faire ensuite. Je refuse ce monde absurde, de pol­lu­tion et de datas qui consomment énor­mé­ment d’énergie. »

Saugrenue cette idée de renon­cer à Linky ? L’Allemagne, sou­vent dési­gnée comme le meilleur élève de l’Europe, y a en tout cas renoncé. Le pays a pris la déci­sion en 2015 de reti­rer mas­si­ve­ment les comp­teurs intel­li­gents et de les main­te­nir uni­que­ment dans les foyers très consom­ma­teurs d’électricité.

Séverine Cattiaux

POUR UNE SMART CITY « LOW TECH » : LA POSITION AMBIGUË D’ERIC PIOLLE

Que pense Eric Piolle, maire de Grenoble (EELV) de la « ville intel­li­gente » ? Il n’y est, a priori, pas opposé, mais prend ses dis­tances. Lors de la Rencontre orga­ni­sée dans la salle de la Belle élec­trique, le maire a répondu à la ques­tion posée par un oppo­sant à la Smart city, qui s’est intro­duit dans la salle.

Rencontre organisée dans le cadre de la biennale villes en transition, le samedi 11 mars, à la Belle Electrique, en présence d'Eric Piolle. © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Rencontre orga­ni­sée dans le cadre de la bien­nale villes en tran­si­tion, le samedi 11 mars, à la Belle Électrique, en pré­sence d’Eric Piolle. © Séverine Cattiaux – Place Gre’net

Il a assuré pro­mou­voir le déve­lop­pe­ment d’une « ville low tech où les liens et le sens importent avant tout ». Néanmoins, Eric Piolle ne s’est jamais pro­noncé pour ou contre le comp­teur intel­li­gent, à l’ins­tar de nom­breuses villes en France. La Ville de Grenoble anti-pub, anti-tafta… pour­rait-elle un jour deve­nir anti-Linky ?

En atten­dant la réponse claire et nette du maire, François Martin de PMO y va de son ana­lyse : « Il est impos­sible qu’Eric Piolle soit contre Linky, c’est un ingé­nieur de chez HP ! Il est dans la lignée des maires gre­no­blois. Eric Piolle a un agenda poli­tique : il veut se faire réélire ! Alors il se planque der­rière la Métropole dont c’est la com­pé­tence [éner­gie, ndlr]. Il lui fait por­ter les choix des déci­sions impo­pu­laires. Et il se vante de se qui fonc­tionne bien. »

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