FOCUS – Soupçonné d’avoir favorisé une entreprise pour lui faire décrocher un marché public avec la Métropole de Grenoble, le vice-président chargé des déplacements Yann Mongaburu a refusé de répondre directement aux questions des journalistes. Mais nous a répondu par écrit, dans un autre média, au risque de prendre quelques libertés avec le droit de réponse et la liberté de la presse. D’autant que, contrairement à ce qu’il laisse supposer, la rédaction de Place Gre’net n’a pas reçu de lettre recommandée avec accusé-réception*… Nous avons malgré tout décidé de publier ledit courrier pour que le lecteur puisse se faire sa propre opinion.
Le vice-président en charge des déplacements à la Métropole de Grenoble, également président du SMTC et conseiller municipal à la ville de Grenoble, a visiblement quelques difficultés à accepter de répondre aux questions de la presse.
Yann Mongaburu a‑t-il œuvré en vue de favoriser une entreprise afin qu’elle obtienne un marché public ? Dans un article mis en ligne sur Place Gre’net le 7 février 2017, nous nous interrogions sur son rôle après la lecture de plus de quatre-vingt fichiers informatiques, essentiellement des échanges de mails, qui nous avaient été transmis fin 2016.
Comme dans tout débat contradictoire, M. Mongaburu, mais également le maire de Grenoble Eric Piolle, les adjoints à la ville de Grenoble Vincent Fristot et Jacques Wiart, le conseiller municipal Raphaël Marguet, tous destinataires d’une partie des échanges de mails, ont été contactés le 4 février à 17 h 04.
Devant le silence général, nous les avons relancés le 5 février à 21 h 36. Sans plus de réaction de leur part. Seul Michel Papaud, le directeur général des services de la Métropole de Grenoble, également destinataire d’une partie de ces échanges électroniques, nous a répondu par la voix de la directrice du département Mobilités.
Sur la forme
Également contacté par nos confrères du Lanceur, Yann Mongaburu a tout autant refusé de répondre directement aux questions des journalistes. Mais s’est fendu d’un “droit de réponse” étonnamment mis en ligne donc, dans une autre publication que celle qui le « met personnellement en cause ».
Outre le fait qu’il s’agit là d’une certaine liberté prise avec le droit de réponse – rappelons que l’insertion doit être faite en même lieu et mêmes caractères d’après la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, conditions reformulées dans le décret du 24 octobre 2007 relatif à l’économie numérique –, Place Gre’net n’a pas reçu de demande de droit de réponse envoyée par recommandé avec accusé-réception* comme l’exige la procédure. Contrairement à ce que laisse supposer son courrier publié dans Le Lanceur.
Par ailleurs, rappelons que l’exercice du traditionnel droit de réponse est notablement restreint dans les médias en ligne avec la possibilité d’insérer un commentaire dans une zone prévue à cette effet (article 1 du décret du 24 octobre 2007). Possibilité que n’a pas non plus saisie M. Mongaburu.
Sur le fond
Par-delà la forme, la réponse de Yann Mongaburu – que nous publions ci-après intégralement afin que le lecteur puisse se faire sa propre opinion – mérite quelques précisions de la part de la rédaction.
La constitution de la société Ebikelabs en avril 2015, soit postérieurement à la majorité des échanges de mails que nous avons en notre possession (un an et demi de correspondances entre janvier 2014 et juillet 2015) dédouane-t-elle à elle seule le président du SMTC des soupçons portés sur sa personne et son rôle dans le dossier, comme sa réponse le laisse penser ?
Le 24 juillet 2014, dans un mail, Raphaël Marguet, conseiller municipal à la Ville de Grenoble – lequel deviendra par la suite directeur général d’Ebikelabs – appelle Yann Mongaburu, Vincent Fristot et Jacques Wiart à la prudence :
« Ce mail juste pour vous donner la version électronique du document que je vous ai donné tout à l’heure. Il est diffusable mais de manière raisonné, en effet ce sont des travaux que Maël Bosson souhaite partager avec les élus, mais qui peuvent être un peu sensible dans le sens où il y a une possible création d’entreprise derrière pour lui et d’autres. »
Courriel accompagné d’une pièce jointe « PropositionExperimentationMetroVeloElectriqueMaelBosson »
Dès juillet 2014, Yann Mongaburu ne pouvait donc ignorer qu’il y avait une création d’entreprise à la clé. Il devra vraisemblablement s’en expliquer aux enquêteurs. Après avoir assez vite classé l’affaire sans suite, le parquet de Grenoble a finalement ouvert une enquête préliminaire lors de la publication de notre article.
Rappelons que l’enquête préliminaire, qui ne préjuge en rien de la culpabilité des personnes citées dans le dossier, a pour objectif d’apporter des éléments suffisants au procureur de la République afin qu’il juge du bien-fondé d’une poursuite.
Patricia Cerinsek
* Nous avons finalement reçu la demande de droit de réponse avec accusé-réception le 25 février. Le courrier, bien que daté du 15 février, a été posté le 23 février (cachet de la poste faisant foi), soit le jour même de la mise en ligne de notre article. Un peu tard…
La réponse de Yann Mongaburu datée du 15 février initialement publiée sur Le Lanceur.