FOCUS – Le Jazz club de Grenoble a lancé la 12e édition du Grenoble Alpes Métropole Jazz Festival, qui se tient jusqu’au 22 octobre dans les salles de l’agglomération. En guise de fil rouge ? Les femmes et le jazz. Mercredi 19 octobre, Kristin Marion, vocaliste de jazz, donnait justement une conférence sur la question à la médiathèque Paul Eluard de Fontaine. Alors, un poil sexiste l’univers du jazz ? On lui a posé la question.
Exit le Festival de Jazz d’automne de Grenoble. Bonjour le Grenoble Alpes Métropole Jazz Festival, du 14 au 22 octobre 2016. Le nom change mais le Jazz club de Grenoble reste aux manettes.
Quoi de neuf alors ? La dimension métropolitaine et, pour cette 12e édition, la place accordée aux femmes. La chanteuse Stacey Kent – qui a joué le 14 octobre au Théâtre de Grenoble – comptait d’ailleurs parmi les têtes d’affiche.
Kristin Marion, autre chanteuse de jazz programmée mercredi 19 octobre à la salle Edmond Vigne de Fontaine, à 20 heures, a beaucoup à dire sur les relations qu’entretient le jazz avec la gente féminine. Premier constat : les femmes ne représentent que 7 % des artistes de jazz. De plus, au sein de cette petite portion, on compte 65 % de chanteuse. Les instrumentistes féminines sont donc bien rares dans le jazz. Pourquoi ?
Le jazz et la virilité
« Ça va, le micro n’est pas trop lourd pour toi ? Tu as bien appelé tes enfants ? L’impro, ça va pas le faire, c’est la mauvaise période du mois. » D’après Kristin Marion, voilà un florilège de réflexions assez courantes chez ces messieurs du jazz
Un sexisme tristement banal, non ? « En plus concentré qu’ailleurs, comme dans d’autres milieux majoritairement masculins », analyse la jazzwoman, avant d’embrayer sur le caractère phallique dont peuvent se charger certains instruments suivant la posture du musicien…
De l’avis général, le jazz serait donc plutôt viril. Pas seulement côté instruments du reste. On dit encore du scat – chant fondé sur les onomatopées – qu’il n’est pas « très féminin ». Plus grave, un chroniqueur de la revue new-yorkaise Time Out aurait décrété, il y a tout juste quinze ans, que la femme ne pouvait pas swinguer… Billie Holiday a dû se retourner dans sa tombe !
Du mieux ?
Décidément, les médias ne sont pas prompts à souligner les talents des jazzwomen. En ce sens, un article daté de 2011 publié dans la revue Les allumés du jazz fustige une anthologie, « Les Géants du Jazz », parue la même année dans le journal Le Monde. Grief principal : seules quatre chanteuses (Bessie Smith, Billie Holiday, Ella Fitzgerald, Sarah Vaughan) figurent parmi les quarante « géants » consacrés. « La seule absence d’une Mary Lou Williams (pianiste, arrangeuse et compositrice américaine de jazz, ndlr) est proprement scandaleuse et montre bien comment, au fil du temps, silence et indifférence se sont ligués pour conserver au jazz sa suprématie masculine », dénonce l’article.
Toutefois, les femmes sont de plus en plus nombreuses à rejoindre les rangs des instrumentistes de jazz. Pour Kristin Marion, c’est en partie dû aux cours de jazz que dispensent désormais les conservatoires. À l’avenir, peut-être le terme « jazzwoman » deviendra-t-il aussi fréquent que son homologue masculin…
Adèle Duminy
INFOS PRATIQUES
Grenoble-Alpes-Métropole Jazz Festival
Mercredi 19 octobre 2016 – 20 heures
Salle Edmond Vigne, à Fontaine : « THREE LADIES OF JAZZ »
(avec Denise KING, Laure DONNAT et Kristin MARION)