DÉCRYPTAGE – Le 5 septembre, une adolescente rom de 14 ans trouvait la mort, électrocutée alors qu’elle faisait sa toilette dans une pièce du squat du 62 rue des Alliés à Grenoble. Un décès qui repose, de manière dramatique cette fois, la question de l’accueil et de l’hébergement des Roms sur l’agglomération grenobloise. Et celle des responsabilités de la Ville, de la Métro, du Département et de l’État.
Ici, la pièce où Mélinda Varga s’est électrocutée, lundi 5 septembre alors qu’elle se lavait. Là, le sol où elle a été déposée en attendant les secours…
Le jeune Roumain de 26 ans qui nous fait “visiter” le squat du 62 rue des Alliés ne veut pas être photographié, ni même nous dire son prénom.
C’est lui, affirme-t-il, qui a sorti la jeune fille de la pièce qui servait de salle de bain et transporté son corps. Elle n’a pas survécu au choc. Elle avait 14 ans. C’est la première fois qu’une adolescente meurt ainsi des suites d’un accident dans un abri de fortune à Grenoble. Et pourtant, un tel drame aurait pu arriver bien avant.
« On a eu beaucoup de chance !, estime, non sans une ironie amère, le coprésident de Roms action Patrick Baguet. Il y a déjà eu plusieurs accidents auparavant, au camp d’Esmonin ou au camp de Flaubert. À Fontaine, ça a brûlé deux fois. Globalement, la chance intervient, mais pas cette fois-ci. »
La Ville de Grenoble responsable ?
La municipalité est-elle en cause ? Les Roms du 62 rue des Alliés en sont convaincus, et l’expriment avec beaucoup de rancœur. La mère de Mélinda affirme avoir demandé à ce que sa famille soit logée sur le terrain d’hébergement d’urgence du Rondeau, ce qui lui aurait été refusé, faute de place.
Elle nous montre une lettre adressée au CCAS le 28 juillet 2016, au sortir d’une période d’hébergement de trois semaines à l’hôtel Alizé de Grenoble, prise en charge par la Ville. La conclusion du courrier fait, avec le recul, froid dans le dos : « J’espère qu’une solution seras (sic) vite trouvée afin que cette situation ne se transforme pas en drame. »
« La famille était liée à Flaubert, répond Alain Denoyelle, adjoint à l’action sociale de la municipalité grenobloise. Avec l’évacuation du terrain, les familles qui l’avaient occupé ou l’occupaient encore ont été jointes par la préfecture. Dans ce cadre, celle-ci a dit qu’une seule famille répondait à ses critères d’urgence et devait être prise en charge. Nous ne pouvions pas intervenir plus que ce qui avait été fait. Et les autres familles devaient quitter le dispositif. »
Le CCAS renvoie donc la balle à l’État, en le rappelant à ses responsabilités. Si La Patate chaude considère que la municipalité est « mouillée » dans cette affaire du 62 rue des Alliés, Patrick Baguet de Roms action est beaucoup plus mesuré.
« À partir du moment où il se passe un drame, on peut dire que c’est soit la responsabilité de tout le monde, soit la responsabilité de la dernière personne qui s’est occupée de cette famille… Ce serait dommage de dire que la Ville de Grenoble est responsable parce qu’elle s’est occupée de cette famille. Elle s’en est occupée parce que les autres communes ne veulent pas s’en occuper, parce que l’État ne veut pas s’en occuper. »
Et Patrick Baguet de considérer que 90 % des communes ne jouent pas le jeu. Si Grenoble, Fontaine ou Crolles comptent parmi les villes aidantes, dans la mesure de leurs moyens, « quelques grosses communes ne font aucun effort pour loger ou scolariser à long terme », estime-t-il.
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