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Fondation Stendhal. © Patricia Cerinsek - placegrenet.fr

Stendhal : uni­ver­sité cherche mécènes

Stendhal : uni­ver­sité cherche mécènes

DÉCRYPTAGE - L’université Stendhal a désormais sa fondation. Pour faire face au désengagement de l’État et à des difficultés financières grandissantes, l’université de lettres et de langues de Grenoble a fait le choix de se tourner vers le mécénat. Un appel aux dons est lancé.

 
 
 
 
Photo Patricia Cerinsek

Sur la corde raide, l'université Stendhal se tourne vers le mécénat en lançant une fondation dédiée au plurilinguisme et la francophonie.

L’université Stendhal se met au mécénat. Après quatre années de gestation, la fondation Plurilinguisme et francophonie est sur les rails.
 
Ainsi donc, l’université de lettres et de langues de Grenoble a-t-elle fini, poussée par une situation financière tendue, par demander l’aide du privé. 
 
Un premier pas, mais mesuré. Car l’université a pris soin de sélectionner ses membres fondateurs. Aux côtés du groupe Hachette, l’entreprise Systran, spécialisée dans la traduction automatique mais aussi les start-up grenobloises Zeugmo, plate-forme professionnelle d’e-learning et Beebuzziness, spécialisée dans l’édition numérique et l’enrichissement multimédia. A ces quatre partenaires privés, s’est greffée Grenoble Alpes Métropole.
 
 
Une dotation de 30 000 euros
 
Un premier pas car la dotation de départ est modeste, autour de 30 000 euros. Mais une porte est ouverte. Car dès cet automne, des campagnes d’appels à dons seront lancées auprès des entreprises et des particuliers.
 
Objectif ? Renflouer les caisses de Stendhal pour tenter de faire face au désengagement de l’État depuis qu'une loi en 2007, la loi LRU, a consacré l'autonomie des universités, ces dernières héritant de la gestion de leurs personnels, sans moyens supplémentaires pour y faire face.

 

 

Lise Dumasy, présidente Université Stendhal Photo Patricia Cerinsek

Lise Dumasy, présidente de l'université Stendhal.

Résultat, Grenoble 3, comme de nombreuses universités françaises, est sur la corde raide. Pas encore en déficit mais sa présidente n’en finit pas de tirer la sonnette d’alarme.
Le conseil d’administration avait d’ailleurs en décembre 2013, dans un premier temps, refusé de voter le budget*.
« Nous sommes très serrés dans notre gestion, concède sa présidente Lise Dumasy. Nous sommes donc bridés dans tout ce que l’on veut construire. »
 
 
 
"On mutualise des enseignements"
 
 
Autonomes les universités ? Certes, mais sans grands moyens. Chaque année, l’établissement réduit un peu plus ses crédits de fonctionnement pour échapper au déficit. La faute, notamment, à l’augmentation de la masse salariale retranscrite dans le fameux GVT (Glissement vieillesse technicité). Pour résumer, plus le personnel vieillit, plus il monte en grade et, donc, plus il coûte cher. Alors, à moins de départs à la retraite, cet indice a tôt fait de plonger les universités dans le rouge.
 
“ Le GVT est une mécanique infernale. On ne peut pas compenser entre universités ”, soulignait en février dernier, après le vote du budget Lise Dumasy. “ Quelle est la solution ? Geler des postes ? Au risque d’attaquer l’offre de formation ou de recherche ? ”
 

 

Photo Patricia Cerinsek

Mettre aux normes les bâtiments est indispensable. Coût : 45 millions d'euros...

Pour l’heure, la parade consiste à limiter la casse. A l’université Stendhal, on mutualise des enseignements, comme le latin. On met en place un dispositif en autonomie guidée à la maison des langues.
 
Objectif : faire des économies. Mais jusqu’à quel point ? En cours de langues, les travaux dirigés peuvent compter jusqu’à 40 étudiants. A l’heure où l’on exhorte l’enseignement à faire preuve d’innovation pédagogique…
 
« On en vient alors à limiter nos moyens à l’international », admet Lise Dumasy. D’autant que l’université doit également s’approprier de nouvelles missions : accentuer encore plus l’insertion professionnelle ou développer le numérique. Des enjeux majeurs, mais qui ont un coût.
 
« Nous ne sommes pas contre ces objectifs mais cela ne peut pas se faire avec des crédits constants », souligne Lise Dumasy. Or, avec un budget de 50 millions d’euros et 6,5 millions de réserve, l’université Stendhal n’a pas beaucoup de marge de manœuvre. 
 
 
 
« Stendhal cumule tous les désavantages »
 
 
« Stendhal est une université atypique, continue Lise Dumasy. De petite taille** et mono-disciplinaire. On cumule tous les désavantages ! ». Et notamment celui de compter moins que les grandes universités, moins que les cursus technologiques, moins que les filières scientifiques… Un étudiant en sciences a deux fois plus de moyens qu’un étudiant en lettres. Un étudiant en IUT tertiaire trois fois plus. Un étudiant en IUT ou en école d’ingénieur quatre fois plus.
 
« Il y a un vrai problème de sous-financement des cursus en lettres, sciences humaines et sociales en France ! ». Et la recherche n’est guère mieux lotie. Difficile de décrocher des financements quand on est chercheur dans un de ces trois domaines. A eux trois, les cursus totalisent 4 % des crédits de l’Agence nationale de la recherche (ANR).
 
Faut-il revoir le système de financement des établissements ? Assurément. Faudra-t-il se tourner vers le privé ? Le mot même est encore tabou, alors de là à sauter le pas…
 

 

Photo Patricia Cerinsek

Quatre entreprises privées et un partenaire public ont rejoint la fondation lancée par l'université Stendhal.

 
 
La fondation ménage la chèvre et le chou, à mi-chemin entre le public – puisque créée par le conseil d’administration de l’université – et le privé, l’origine de la dotation venant majoritairement des entreprises. 
 
Mais Lise Dumasy ne veut pas y voir qu’une simple affaire d’argent. « On n’a pas besoin de sommes extraordinaires. On n’a pas de Synchrotron à construire ! On est aussi sensible à ce que les entreprises peuvent nous apporter afin de construire une autre forme de partenariat ».
 
Se faire connaître du monde de l’entreprise pour se faire une place aux côtés des grandes écoles et jeter des passerelles ne se fera pas en restant chacun dans son coin. Le PDG de Bebuzziness, Pierre Nicodeme Taslé, ne dit pas autre chose. « Il faut que l’université apprenne la langue de l’entreprise et que l’entreprise apprenne la langue de l’université ». Du simple bon sens ?
 
 
Des travaux de 45 millions d'euros
 
 
Longtemps accusée d’être déconnectée du monde de l’entreprise, l’université n’a-telle d’autres saluts que de jeter des ponts ? C’est une piste. Car, de l’Etat, la présidente de l’université Stendhal n’attend plus grand chose.
 
Face aux difficultés financières, Grenoble 3 a obtenu en tout et pour tout… la promesse d’un emploi supplémentaire. Certes, après dix années de disette, pas question de faire la fine bouche. Mais les pouvoirs publics auront-ils les moyens et la volonté de s’attaquer aux fondations de l'université grenobloise, alors que se profile le prochain contrat de plan Etat-Région ? En 2008, une étude a chiffré à 45 millions d’euros le montant des travaux pour remettre à niveau l’ensemble des bâtiments…
 
 
 
 
Texte et photos de Patricia Cerinsek
 
 
 
* Le conseil d’administration avait finalement voté le budget, en deuxième présentation, le 24 janvier 2014, après proposition du ministère de tutelle de rembourser de manière anticipée les sommes qu’il devait au titre des charges de 2011-2012.
 
 
** 6 000 étudiants sur les formations diplômantes, reconnues par l’État, auxquels il faut ajouter 3 000 étudiants qui fréquentent le centre universitaire d’études françaises (sur les ressources propres de Stendhal) et environ 2 000 étudiants extérieurs à Stendhal formés aux langues étrangères.
 
 
 
Une fondation, pour quoi faire ?
 
Dans une université de lettres et de langues, le plurilinguisme s'imposait presque comme une évidence. Cette volonté d'ouverture sur les autres est donc le fer de lance de la fondation universitaire. Comme le soulignait Astrid Guillaume, vice-présidente de l'Observatoire européen du plurilinguisme : " apprendre les autres langues et donc les autres cultures permet d'avoir moins peur des autres ".
 
Les fonds collectés via la fondation serviront à développer de nouveaux projets pour développer l'enseignement des langues au travers de nouvelles technologies, tout en faisant la promotion de la francophonie. Les formations en langue des signes seront renforcées, tout comme l'offre d'enseignement en vingt langues ou les formations en langues de spécialité, telles que l'anglais scientifique ou l'allemand commercial. 
 
Développer l'e-learning à l'adresse des entreprises, créer une plate-forme d'aide à la traduction pour les entreprises et les centres de formation, développer l'enseignement du français langue étrangère, mieux intégrer les étudiants et chercheurs étrangers… font enfin partie des projets de la fondation.
 
Pour tout renseignement, contacter l'université Stendhal au 04 76 82 43 01 ou par mail : [email protected]
 
 

Patricia Cerinsek

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