DECRYPTAGE – Nouvelle alerte à la pollution de l’air à Grenoble. Les mesures de limitation de la vitesse des voitures suffiront-elles à faire passer cet épisode ? Assurément non. Raymond Avrillier réclame la libre circulation sur le réseau du Syndicat mixte des transports en commun de l’agglomération grenobloise (SMTC) avec un seul titre de transport. Reste que, l’hiver, la pollution de l’air, ce n’est pas seulement les voitures…
Le beau temps se maintient et la pollution atmosphérique, elle, se concentre un peu plus. Depuis hier, le niveau d’alerte a été activé sur le bassin grenoblois et, plus largement, sur l’ensemble de la région Rhône-Alpes. La faute aux particules fines et au dioxyde d’azote que l’on retrouve dans l’air à des niveaux largement supérieurs aux valeurs réglementaires. Car les conditions météo – anti-cyclone, absence de vent et inversion de température – non seulement ne permettent pas de disperser les polluants mais les concentrent en fond de vallée… Et les spécialistes météo ne sont guère optimistes pour les jours à venir. Du niveau d’information à l’alerte Hier matin encore en niveau d’information, la ville de Grenoble est donc passée en alerte en cours de journée. Car, depuis le 9 novembre, le taux de particules fines dans l’atmosphère dépasse sensiblement les valeurs réglementaires de 50 microgrammes par mètre cube. Mercredi 11 décembre, l’observatoire Air-Rhône-Alpes enregistrait ainsi sur le bassin grenoblois une moyenne de 71 microgrammes par mètre cube d’air. Pour tenter de faire barrage, les pouvoirs publics ont sorti la désormais traditionnelle parade : la limitation de vitesse. Soit 70 km/h maximum sur les autoroutes et les portions routières les plus touchées et un abaissement de 20 km/h sur les autres axes où la vitesse maximale est d’ordinaire supérieure à 70 km/h. Raymond Avrillier interpelle le préfet Des obligations respectées ? Toujours est-il que, sur fond de grève SNCF et donc d’un accroissement du trafic automobile, la vitesse est descendue d’un cran par la force des choses. Des obligations suffisantes ? Pas pour Raymond Avrillier qui, ce matin, s’apprêtait à interpeller le préfet, déplorant “l’absence persistante de mesures réelles dans la région grenobloise”. Quelles solutions ? Mettre en place la libre circulation sur le réseau de la SMTC avec un seul titre de transport, préconise l’ancien élu grenoblois, afin de pousser l’automobiliste en puissance à laisser son véhicule au garage. Les véhicules, et notamment diesel, sont parmi les principaux responsables de la pollution atmosphérique tout au long de l’année. Mais si le dioxyde d’azote émane majoritairement des pots d’échappements, les particules fines, elles, ont d’autres sources. Et en premier, le chauffage au bois, ancien ou peu performant, qui équipe la très grande majorité des foyers. C’est lui qui, en hiver, vient polluer en grande partie l’atmosphère, rejetant quantité de poussières : des PM 10 mais aussi des PM 2,5, particules carbonées particulièrement nocives. Alors, faut-il couper le chauffage ? Air-Rhône-Alpes conseille de ne pas utiliser les inserts ouverts et les chauffages d’appoint. Dans le même ordre d’idées, l’écobuage est interdit.Pas de footing au bord de la route…
A ce niveau d’alerte, ce ne sont plus seulement les enfants, les personnes âgées ou souffrant de problèmes respiratoires ou cardio-vasculaires qui sont touchés mais l’ensemble de la population. La plupart des conseils relèvent du bon sens. Comme limiter les efforts physiques violents ou éviter de faire son jogging en bordure de route… Porter un masque par contre ne sert à rien ; de même que s’enfermer dans sa voiture en pensant être à l’abri des poussières volatiles. Au contraire même. “Dans sa voiture, l’automobiliste est plus exposé que les autres, piétons ou cyclistes”, rappelle Marie-Blanche Personnaz, directrice générale d’Air-Rhône-Alpes.Limiter la circulation automobile ?
Faudra-t-il limiter la circulation automobile ? Les solutions existent. Sur le papier. Elles sont même prévues par la législation. Comme mettre en place une circulation alternée. Ou limiter la circulation des véhicules le plus polluants, mesure jugée par beaucoup comme la plus efficace. Sa traduction, dans les Zapa, ces zones d’action prioritaire pour l’atmosphère, a été très vite enterrée… Car de la théorie à la pratique, il y a encore un pas, surtout quand il s’agit de mesures temporaires. Comment informer correctement et rapidement l’usager ? “La sensibilisation des citoyens est importante, continue Marie-Blanche Personnaz. La pollution de l’air aujourd’hui coûte 500 euros par an et par habitant. C’est aussi six mois de vie en moins. Mais il y a encore des gens pour contester ces éléments ! Il y a une forme de négationnisme. Or, des dispositifs ne peuvent fonctionner que si les individus sont convaincus du bien-fondé”. Premier problème de santé publique en Europe et dans le monde, la pollution de l’air passerait-elle au second plan ? “La pollution de l’air nous coûte dix fois plus cher en vies humaines que les accidents de la route… Mais on s’est habitué. On en a moins conscience et cela demande des changements de comportement réels”. Patricia Cerinsek Photos : Véronique Serre/ Place Gre’netA lire aussi sur Place Gre’net : - « Pollution de l’air : respirez… Toussez ! » A lire sur Echosciences : - L’air de l’agglo sous surveillance