REPORTAGE – Policiers, urgentistes, transporteurs, veilleurs de nuit… Ils sont nombreux à travailler alors que les autres dorment. Découvrez leur quotidien et partez en immersion dans cet univers parallèle, à travers une série de portraits-reportages. Deuxième de cette série, Sylvain Manoukian, boulanger.

Minuit. Alors que les lumières s’éteignent peu à peu dans le quartier, Sylvain, 24 ans, commence sa nuit de travail qui s’achèvera au petit matin. Après avoir jeté un coup d’œil aux commandes, il fait le plein de farine, avec des sacs de 25 kilos. Puis il lui faut pétrir le pain, découper la pâte, préparer les pains viennois… Toute une succession de gestes habituels, rapides, maîtrisés, réalisés six jours sur sept. « C’est un métier physique, avec des gestes répétitifs, des charges lourdes » reconnaît Sylvain qui travaille de nuit depuis quatre ans. « Mais c’est le métier qui est dur, pas le fait de travailler la nuit. L’été, c’est horrible. Avec les fours, la température monte à 40 – 50° C. Et l’hiver, on souffre de la neige et du froid lors des livraisons. » Pourtant, le jeune homme se plaint pas. « J’ai toujours voulu faire ce métier », assure-t-il. « Déjà, tout petit, j’avais des amis boulangers. J’ai grandi dans ce milieu. C’est un rêve de gosse. Le déclic a eu lieu en 2000, lorsque ma mère m’a emmené dans la boulangerie de ses amis, à la sortie de l’école. Je suis allé derrière le comptoir et là j’ai su que je voulais en faire mon métier. » Seul, la moitié de la nuit
Sylvain Manoukian est arrivé il y a huit mois dans la boulangerie familiale Les Bergères, à Seyssinet Pariset. « Je travaille seul la moitié de la nuit, ce que j’apprécie. Et comme on me laisse beaucoup d’autonomie, le temps passe très vite. Vers 4h00, on prend une pause tous ensemble, avec les autres pâtissiers. J’apprécie car il y a une bonne ambiance. D’ailleurs, quand je finis, j’ai l’impression d’avoir travaillé deux heures. Là où j’étais avant, c’était bien plus strict et la nuit me paraissait plus longue. »
Quand il finit son travail, aux alentours de 7h30 ou 8h00, Sylvain passe boire un café chez sa mère ou sa grand mère, puis se détend devant la télévision ou en faisant de la mécanique. « A midi, je ne mange pas, mais je grignote pas mal dans la journée… Puis vers 14h00, je me couche jusqu’à 17h00 ou 18h00. » Il enchaîne alors avec un bon repas vers 19h, puis se rendort aux alentours de 21h30 pour se réveiller à 23h00. « C’est ma petite sieste. Au total, je dors au maximum 6h00 par jour. Tout dépend de la quantité de travail que j’ai pu avoir dans la semaine. »
Profiter de la vie
« Je pourrais bien dormir tout l’après-midi, comme le font certains boulangers mais j’ai choisi ce rythme car, comme ça, je profite plus de la vie », explique Sylvain. Pour lui, c’est d’ailleurs le grand avantage qu’il y a à travailler la nuit : « Etant donné que je finis tôt et que je ne dors pas beaucoup, je peux profiter de la journée, du soleil et de ma famille. » Comme ils le voient le matin, l’après midi et le soir, ses proches ont parfois même l’impression qu’il ne travaille pas. « Et puis je suis souvent présent à la maison. Du coup, je ne ressens pas de décalage avec ma copine, qui est secrétaire juridique. Quand elle part ou rentre du boulot, je suis réveillé. Il n’y a que le week-end qu’on se voit un peu moins. »
Pour ce noctambule, le travail nocturne relève donc bel et bien d’un choix. « Je préfère travailler de nuit ou, sinon, commencer vers 5h pour finir vers 13h. Je ne peux pas travailler en journée. Je n’y arrive pas, ça me rend fou. J’ai l’impression de passer ma vie au travail. Je l’ai fait dans une expérience précédente et je n’ai pas du tout aimé. En plus, ça me fatigue davantage. » Sans compter que le travail de nuit est mieux payé. « Il me faudrait une belle carotte financière pour que je reparte travailler en journée ! ».
Le seul inconvénient, à ses yeux ? Ne pas pouvoir profiter pleinement des soirées et des repas en famille ou des sorties entre amis. « J’en ai bien profité quand j’étais « jeune ». Je me suis calmé, je ne peux plus me permettre », conclut le jeune homme.
Reportage photo (cf. portfolio ci-dessous) : Véronique Serre
Rédaction : Muriel Beaudoing
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Minuit. Alors que les lumières s’éteignent peu à peu dans le quartier, Sylvain, 24 ans, commence sa nuit de travail qui s’achèvera au petit matin. Après avoir jeté un coup d’œil aux commandes, il fait le plein de farine, avec des sacs de 25 kilos. Puis il lui faut pétrir le pain, découper la pâte, préparer les pains viennois… Toute une succession de gestes habituels, rapides, maîtrisés, réalisés six jours sur sept. « C’est un métier physique, avec des gestes répétitifs, des charges lourdes » reconnaît Sylvain qui travaille de nuit depuis quatre ans. « Mais c’est le métier qui est dur, pas le fait de travailler la nuit. L’été, c’est horrible. Avec les fours, la température monte à 40 – 50° C. Et l’hiver, on souffre de la neige et du froid lors des livraisons. » Pourtant, le jeune homme se plaint pas. « J’ai toujours voulu faire ce métier », assure-t-il. « Déjà, tout petit, j’avais des amis boulangers. J’ai grandi dans ce milieu. C’est un rêve de gosse. Le déclic a eu lieu en 2000, lorsque ma mère m’a emmené dans la boulangerie de ses amis, à la sortie de l’école. Je suis allé derrière le comptoir et là j’ai su que je voulais en faire mon métier. » Seul, la moitié de la nuit