FOCUS — Ils sont plus connus sous les termes de « pions » ou de « surveillants », mais c’est bien en tant qu’assistants d’éducation que les AED ont manifesté devant le rectorat de Grenoble, puis devant la cité administrative Dode, ce jeudi 25 mars 2021. Leurs revendications ? Un changement de statut, au regard des nombreuses missions accomplies.
Des pions, dans tous les sens du terme ? C’est le sentiment dominant chez les AED (assistants d’éducation), plus connus dans les collèges et lycées comme « pions » ou « surveillants ». À l’appel d’un collectif constitué sur l’Isère, et soutenu par les syndicats CGT Éduc’action, Sud Éducation, PAS 38, CNT, Snep ou encore Snes-FSU, les AED ont crié leur colère devant le rectorat de Grenoble jeudi 25 mars, dans le cadre d’un mouvement national. Devant le rectorat, mais pas seulement…

Mobilisation des AED devant le rectorat de Grenoble le jeudi 25 mars 2021. © Florent Mathieu – Place Gre’net
Peu avant midi, en attendant qu’une délégation soit reçue à 14 heures par le cabinet de la rectrice (voir encadré), une partie des manifestants a décidé de transformer le rassemblement… en manifestation. Le cortège s’est ainsi rendu devant la Cité administrative Dode pour déployer pancartes et banderoles et faire entendre des témoignages d’AED. Sans beaucoup, il est vrai, attirer l’attention.
Six ans, et plus rien
Les AED ont pourtant beaucoup de choses à dire. C’est le cas de Pauline Belnand, assistante d’éducation au Collège olympique de Grenoble, volontaire pour participer à la délégation. Loin de l’image d’un emploi occupé par des jeunes pour financer leurs études, la jeune femme décrit un véritable métier. Et rappelle que la moyenne d’âge des AED a considérablement augmenté pour atteindre aujourd’hui les 40 ans.
Un véritable métier… mais pas un véritable statut, dénonce-t-elle, en évoquant des contrats précaires, renouvelables dans une limite de six années d’exercice. Et ensuite ? « Merci, au revoir, allez faire autre chose ! », ironise-t-elle. Et d’ajouter : « Il n’y a aucune passerelle professionnelle, aucune validation d’acquis. On ne peut plus exercer ce métier, alors qu’on acquiert de vraies compétences et des savoir-faire auprès des élèves. »
Les AED, poursuit Pauline Belnand, sont souvent peu au courant de leurs droits. Quitte à se voir imposer des missions comme l’aide aux devoirs, censée relever du volontariat. Quand il ne s’agit pas de remplacer des professeurs sur certaines prérogatives. L’assistante d’éducation évoque encore le cas d’étudiants se voyant refuser des jours pour préparer, et même passer, leurs partiels. Quand bien même ils y ont contractuellement droit.
Des AED qui aiment leur métier
Autres griefs ? Si l’accessibilité de l’emploi est un plus, Pauline Belnand s’étonne de l’absence totale de formation demandée et fournie aux AED. Ce alors que les surveillants peuvent être amenés à gérer des tensions très marquées, sinon des crises. « Ce n’est pas évident pour faire face à des situations dont on n’a pas l’habitude », déplore-t-elle. Cerise sur le gâteau : les AED qui exercent dans des établissements en réseau d’éducation prioritaire (REP ou REP+) n’ont simplement pas droit à la prime que touche l’ensemble des autres personnels.

Les AED ont également manifesté devant la Cité administrative Dode. © Florent Mathieu – Place Gre’net
La tonalité est la même devant la Cité administrative… mais se conclut par un cri d’amour vis-à-vis du métier d’assistant d’éducation. « Je fais ça pour les jeunes. Je suis leur maman, j’écoute leurs bobos, je remplace l’infirmière quand elle n’est pas là, je remplace l’assistante sociale, je fais office de secrétaire des CPE… Je m’en prends plein la gueule par les parents et, malgré tout, j’aimerais continuer ! », s’écrie au micro une AED de 57 ans. Qui aborde son avant-dernière année et n’a que Pôle Emploi comme perspective.
Les AED aiment ce qu’ils font et se sentent utiles, confirme Pauline Belnand. « C’est un métier que je porte à cœur. On a des choses à faire valoir auprès des élèves, on a un rapport d’autorité sur eux, mais aussi complice. Parfois, les élèves se confient sur des choses qui peuvent être graves. On peut les aider, les accompagner dans plein de situations différentes », décrit-elle. Un point de vue partagé par Pedram Zouechtiagh, enseignant et membre de CGT Éduc’action : « On s’appuie sur eux au niveau éducation. On en a besoin pédagogiquement ! ». Mais le statut, lui, ne suit pas.
Florent Mathieu
Les réponses du rectorat à la délégation
Quelles réponses des services du rectorat ? Dans un compte-rendu, le collectif des AED indique que le cabinet de la rectrice… a invité les manifestants à faire valoir leur revendication auprès du ministère de l’Éducation nationale, quitte à interpeller des parlementaires et des syndicats pour créer un rapport de force. « Le rectorat ne peut pas faire plus pour nous », résume le collectif.
Des avancées, tout de même ? Les représentants du cabinet auraient « promis de revoir l’intégration des AED dans les nouveaux établissements avec les CPE ». Et ceci via un « un groupe de travail composé de personnels du Rectorat, de CPE et d’AED, pour trouver des solutions techniques sur l’harmonisation des pratiques ». Enfin, le rectorat a invité les AED à se tourner vers lui en cas de « problèmes de médiation ».