FOCUS – L’un parle d’embellissement et de rénovation, l’autre de nettoyage et de propreté… Les candidats Éric Piolle et Alain Carignon déploient leurs programmes en matière d’attractivité de la ville. Tandis que le maire sortant table sur la candidature de Grenoble comme Capitale verte de l’Europe et prône un embellissement de ses accès, l’ancien maire veut créer un service de propreté et d’insertion et promet la verbalisation des incivilités.
Embellir, rénover… ou nettoyer ? Sans surprise, les candidats aux municipales Éric Piolle et Alain Carignon n’ont pas la même approche des besoins de la ville. Pour le maire sortant, l’accent doit être mis sur l’embellissement, à l’intérieur de Grenoble mais aussi dans ses entrées et ses points de jonction avec les autres communes. Pour l’ancien maire, la priorité est de rétablir la propreté partout. Et plus encore dans des quartiers jugés délaissés par la majorité.
Une ville « plus belle et plus accueillante », tel est donc le credo affiché par Éric Piolle et sa liste Grenoble en commun. Non seulement pour les Grenoblois, mais aussi pour l’Europe… voire pour le monde. Car si l’équipe de campagne revendique sa farouche volonté d’embellir la ville, c’est aussi dans l’optique de sa candidature au titre de Capitale verte de l’Europe 2022. Candidature dont la dynamique doit entraîner « l’ensemble des habitants ».
« Privilégier la rénovation sur la construction »
Au programme de Grenoble en commun ? « Privilégier la rénovation sur la construction [et] la sauvegarde du patrimoine naturel et historique », explique Éric Piolle. « On sort du maire qui va poser son grand geste, qui creusait des parkings souterrains infinançables partout. Cette logique est révolue », insiste-t-il. Non sans rater l’occasion, campagne oblige, d’attaquer frontalement le bilan de la précédente majorité.
« Quand nous sommes arrivés en 2014, nous avons payé la fin de la halle de tennis, soit 12 millions d’euros financés par la Ville, tout en découvrant en même temps douze écoles en avis défavorable de la commission de sécurité », lance ainsi le maire sortant pour mieux illustrer son projet de se « consacrer à l’existant ». Ce depuis la rénovation de la tour Perret jusqu’à l’ancien musée de peinture, destiné à devenir une « maison de l’hospitalité » pour les nouveaux arrivants à Grenoble.
Autre préoccupation : les entrées de la ville. « Il nous faut penser aux accès de Grenoble en lien avec la Métropole. C’est essentiel pour concevoir une ville accueillante et dynamique, pour l’image de Grenoble, pour la cohérence du territoire », juge Éric Piolle. En exergue : le nouveau règlement métropolitain sur les panneaux publicitaires. « Plus de 600 panneaux de quatre mètres carrés vont devoir être démontés dans les deux ans qui viennent », promet le maire.
Ce dernier entend également lutter contre les parkings géants des zones d’activité en périphérie. À ce sujet, Éric Piolle compte bien obtenir « une modification réglementaire et législative pour une taxe sur les nappes de stationnement, comme cela se fait en Île-de-France ». Dans le viseur, toujours, le « parking aspirateur » de l’Esplanade. Le tout avec un travail sur les trois axes du Y grenoblois « pour qu’ils soient moins routiers et moins polluants, embellis et végétalisés ».
Des quartiers « délaissés » ?
Faute de « grand geste », Éric Piolle n’insiste pas moins sur la candidature de Grenoble comme capitale verte de l’Europe 2022, part intégrante de son programme et de ses propositions. Reste que le titre ne sera décerné qu’au mois de juin. Le maire sortant ne met-il pas la charrue avant les bœufs ? « Par définition, je conduis des projets pour les réussir », rétorque-t-il. Tout en considérant que plusieurs signaux lui permettent d’être optimiste.
Le titre risque de peu émouvoir les habitants de la Villeneuve ou de l’Arlequin que son concurrent Alain Carignon conviait à l’occasion d’une conférence de presse sur la propreté à Grenoble. Plus question ici de cure de beauté, mais simplement de nettoyer des zones de la ville jugées insalubres. Et dans lesquelles, dénoncent les habitants, prospèrent des rats qui n’hésitent plus à entrer dans certaines habitations.
Habib raconte ainsi comment sa mère s’est réveillée nez-à-nez avec l’un de ces rongeurs, dans son appartement en rez-de-chaussée de la Villeneuve. C’est peu dire que le jeune homme est en colère. « Monsieur Piolle fait n’importe quoi ! Ça fait un an que l’on avertit la Ville, on ne peut plus laisser la porte ou la fenêtre ouverte », s’indigne-t-il. Et de conclure : « Le maire investit massivement pour les pistes cyclables, mais il faut s’occuper de tout le monde. »
« Des réalités terribles », selon Alain Carignon
Habitante de la place des Géants, Joëlle ne dit pas autre chose. « Nous avons des rats et on est envahis de pigeons. On a fait une rénovation de l’immeuble et on commence à avoir plein de fientes le long des parois », explique-t-elle. Pour elle, la situation s’est nettement dégradée depuis trois ans. « Avant, on arrivait encore à se faire un peu entendre par les élus de secteur, mais maintenant c’est une catastrophe ! »
Conviés à la discussion, deux agents d’entretien d’ascenseur de l’agence Acaf en conviennent. « La propreté, c’est la seule et unique cause de problèmes. » Tout en nuançant grandement le portrait d’un quartier laissé à l’abandon par la municipalité : « Villeneuve est entretenue. Tous les matins, les gens de la Ville sont là ! Si seulement les gens respectaient un peu plus le travail de propreté qu’ils font… »
Le candidat Alain Carignon redit ses propositions : la création d’un service d’insertion tourné vers la propreté, à l’intention des jeunes ; la réorganisation des services de la Ville, avec la création d”« une unité de protection de l’environnement assermentée », ainsi que la sanction et la verbalisation des actes d’incivilité. « Notre plan part des réalités terribles qui sont là. C’est la vie quotidienne des Grenoblois qui est impactée ! », insiste-t-il.
Propreté à la Villeneuve : « Il reste à trouver le modèle parfait » selon Éric Piolle
Pas question cependant de limiter son propos à la Villeneuve, précise encore Alain Carignon. « Les rats, il y en a depuis la place Grenette jusqu’ici. Tous les quartiers sont délaissés ! », affirme le candidat. Et celui-ci de rappeler la récente interpellation des agents de la fourrière municipale de Grenoble. Qui se plaignent auprès de leur hiérarchie de la présence de rats dans leurs locaux, et disent craindre des cas de leptospirose.
Des rats dans Grenoble ? Éric Piolle relativise. « Des rats, il y en a dans toutes les villes, et il ne faut pas oublier qu’ils ont aussi une fonction. J’en vois à chaque fois que je sors de la mairie », répond le maire sortant. Avant d’ironiser : « À part avec nos opposants en période de campagne, ce n’est pas un sujet sur lequel nous sommes assaillis durant six ans. Il y a des opérations de gestion, mais ça n’a jamais été un sujet majeur ! »
L’élu ne nie cependant pas les problèmes de propreté à la Villeneuve. « Malgré l’investissement de la Métropole, de la Ville et de la régie de quartier, il reste encore à trouver le modèle parfait pour des lieux comme ceux-là », estime Éric Piolle. Mise en place de bacs à ordures enterrés, porte-à-porte autour de la gestion des déchets et du tri… « Tout cela est un chantier que l’on remet sans cesse sur l’établi », conclut-il.