FOCUS – Avec l’exposition « Femmes des années 40 », présentée jusqu’au 18 mai 2020, le Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère porte un éclairage nouveau sur la période de la Seconde Guerre mondiale.
L’exposition Femmes des années 40 revient sur le rôle de la gente féminine au cours de cette décennie. Un juste retour des choses alors que le récit de la Seconde Guerre mondiale a en effet souvent fait l’impasse sur leurs actions.
Le Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère remet ainsi les femmes au cœur de cet épisode de l’Histoire. « Toutes, dans leurs ensemble, et pas que les résistantes », précise Alice Buffet, directrice de l’exposition. Mères de famille, ouvrières, juives, déportées ou même collaborationnistes : « Elles ont vécu cette période de différentes manières », explique-t-elle.
Les femmes sous le régime de Vichy
La première partie de l’exposition replonge les visiteurs dans le contexte historique. « Les femmes n’ont pas eu le droit de vote à la fin de la Première Guerre mondiale », rappelle Alice Buffet. « Les hommes politiques cherchent à repeupler la France et demandent aux femmes d’être des mères avant tout. »
Puis avec la défaite de 1940 et le régime de Vichy, « la femme doit procréer », insiste la directrice de l’exposition. Plusieurs affiches de propagande exposées témoignent de cette politique. Les nombreux documents historiques du musée montrent la vie quotidienne des femmes à l’époque : tickets de ration, carte de grossesse ou encore tracts militants.
L’exposition retrace aussi le parcours de femmes iséroises, y compris celles qui ont collaboré. Les visiteurs découvrent alors l’histoire romanesque de Simone Waro ou de Claire Darré-Touche et sa biscuiterie à Saint-Martin‑d’Hères.
C’est aussi l’occasion de découvrir le récit de femmes qui ne prenaient pas forcément parti, comme Monique Guyot, à la fois pétainiste et anti-Allemands.
La Résistance des femmes
La Résistante est au cœur d’une autre salle de l’exposition. « Les femmes représentent environ 15 % des résistants », chiffre Alice Buffet. « Mais leurs actions étaient perçues comme secondaires. »
L’exposition offre alors l’opportunité de découvrir des récits historiques absents des manuels scolaires, comme celui de Marie Reynoard ou de Marguerite Gonnet, deux résistantes iséroises. « L’exposition met en avant des parcours connus, mais aussi moins connus », précise Alice Buffet.
La salle suivante est dédiée aux femmes déportées. Parmi les nombreux documents exposés, des femmes témoignent des conditions de vie dans les camps de concentration, de la place de la féminité ou encore de la prostitution, parfois seule alternative à la mort. Puis vient l’heure de la Libération, suivie de l’épuration.
Certaines violences traduisent alors la volonté de la population de débarrasser le pays des « traitres » des deux sexes. « Les femmes subissent des violences et des humiliations », raconte Alice Buffet.
« Elles sont tondues, dénudées, puis exhibées sur la place publique. » En 1944, dans le journal Combat, Jean-Paul Sartre parle alors de « sadisme moyenâgeux ».
L’héritage des années 1940
La fin de l’exposition revient sur la reconnaissance tardive du rôle des femmes pendant les années 1940.
« À Grenoble, l’avenue Marie-Reynoard est la première à être nommée en l’honneur d’une résistante en 1968 », rappelle Alice Buffet. Enfin, l’exposition ouvre quelques pistes de réflexion et pose la question : « La Libération a‑t-elle libéré les femmes ? »
L’exposition était « en réflexion depuis un moment », explique Alice Buffet. Et avec l’organisation des expositions sur Rose Valland ou Vivian Maier, le moment était tout choisi. « Pendant les mois prochains, les femmes sont à l’honneur ». Plusieurs rendez-vous sont organisés autour de l’exposition : visites thématiques, ateliers créatifs, projections et publications.
Augustin Bordet
Exposition « Femmes des années 40 »
Entrée libre
Musée de la Résistance et de la Déportation de l’Isère, 14 rue Hébert
Tous les jours de 9 heures à 18 heures sauf les 1er janvier, 1er mai et 25 décembre.
Mardi : 13 h 30 – 18 heures
Week-ends : 10 heures – 18 heures