ENTRETIEN – Sauveur pour les uns, controversé pour les autres, Alain Carignon n’en a pas moins été une (jeune) personnalité montante de la droite des années 1980, et l’un des ministres du gouvernement de cohabitation de Jacques Chirac entre 1986 et 1988. Retour avec l’ancien maire de Grenoble et député RPR de l’Isère sur la figure politique incontournable qu’était Jacques Chirac, dont le décès a été annoncé jeudi 26 septembre en fin de matinée.
Place Gre’net – Que ressent-on en apprenant la mort de Jacques Chirac, alors que l’on a compté parmi ses ministres ?
Alain Carignon – Je l’ai appris avec beaucoup d’émotion. C’était particulier : j’étais l’invité du Figaro pour le Talk de midi et, une minute avant le début de l’émission, on nous a appris ce décès. L’apprendre juste avant de débuter une interview en direct, c’est une émotion importante. Bien sûr que l’on s’y attendait : sa fille Claude Chirac n’avait pas caché l’état de santé de son père. Mais ce n’est pas la même chose que de savoir cette issue inéluctable, et de la vivre en direct.
Quelle impression vous a‑t-il laissé en tant que ministre ?
Notre relation avait déjà connu un long parcours, bien avant que je sois son ministre ! Jacques Chirac était beaucoup venu à Grenoble et dans l’Isère nous soutenir. Dès les années 1970 – 1975, il a parcouru le département de long en large, de Vienne à La Mure en passant par Grenoble et Vizille. Il connaissait toute l’Isère. Son premier poste lorsqu’il était stagiaire à l’Ena a d’ailleurs été à Grenoble. Il est toujours venu participer à nos batailles parce que c’était un homme de courage, comme il l’a montré ensuite comme chef d’État.
Quel souvenir gardez-vous de ce passage à Matignon ?
Je n’avais pas eu de surprise sur le personnage, puisque c’était quelqu’un que je connaissais pour l’avoir beaucoup vu. C’était un homme déterminé dans cette période ascendante pour lui, face à François Mitterrand.
Jacques Chirac a toujours fait preuve de respect vis-à-vis de la fonction présidentielle. Je ne l’ai jamais vu chercher à l’affaiblir.
Même en étant dans le combat avec François Mitterrand, il y avait tout de même ce respect de la fonction qui montrait que lui-même avait toutes les aptitudes pour l’exercer ensuite.
Est-ce que vous pensiez, à ce moment-là, qu’il serait un jour président de la République ?
C’était difficile… Il y a eu une période où peu de monde croyait en lui, et lui-même a sans doute vécu cette phase très difficilement. Mais il a toujours conservé cette détermination, qui l’a conduit, après beaucoup de combats et de défaites, à gagner et ensuite à reprendre du courage, du sens du social et de la proximité à l’égard des Français.
Quel enseignement doit-on, selon vous, retenir de Jacques Chirac ?
Je retiens justement le courage qui va avec la détermination. Et aussi la préoccupation sociale et la solidarité, qu’il faut toujours avoir au coeur et à l’esprit. Ainsi que la proximité : chaque personne compte, tout le monde doit être entendu d’un façon égalitaire et on ne doit oublier personne sur le bord du chemin. Ce sont, pour moi, les grandes leçons de Jacques Chirac.