FIL INFO — Un groupe de glaneurs grenoblois accuse sur Facebook le gérant du magasin Franprix de la rue Thiers de Grenoble de dégrader volontairement ses invendus alimentaires. Le directeur assume, en accusant à son tour les glaneurs de laisser les déchets sur les trottoirs, et en faisant valoir qu’il est propriétaire des denrées qu’il vend… comme de celles qu’il choisit de jeter.
Gaspillage alimentaire contre droit à la propriété ? La page Facebook La Fratrie des glaneurs solidaires grenoblois cible le magasin Franprix de la rue Thiers, dans un message posté lundi 19 août au soir. Photographies à l’appui, les auteurs du post y accusent la direction de pratiquer la destruction d’invendus alimentaires, en lacérant les paquets à coups de cutter pour les rendre irrécupérables.
« Nous avons pris des photos, nous avons prévenu le gérant que ça finirait sur les réseaux sociaux et nous sommes partis sans demander notre reste », écrivent les deux glaneurs. Non sans inviter les internautes à prendre contact avec le magasin en question. Et ceux-ci de rappeler la loi contre le gaspillage alimentaire, qui interdit aux distributeurs « de rendre leurs invendus alimentaires encore consommables impropres à la consommation ou à toute autre forme de valorisation ».
Le gérant du Franprix assume
Contacté par Place Gre’net, le gérant du magasin situé rue Thiers assume pleinement et prévient des conséquences de cette interpellation : « Il n’y aura plus d’invendus dans les poubelles. La seule chose qu’il y aura, ce seront des plastiques. » Avant d’ajouter : « Le magasin m’appartient, la bouffe est à moi, pas à Franprix. Quand je mets quelque chose à la poubelle, c’est de mon porte-monnaie. Donc je vais la manger ou je vais la distribuer à qui je veux. »
Le gérant indique au demeurant avoir plusieurs fois essuyé des insultes de la part d’autres glaneurs. Quant à l’épisode narré dans la soirée du lundi 19 août, il ne l’émeut guère : « Je les ai croisés, ils m’ont dit qu’ils allaient mettre un truc sur Facebook. Moi, je n’ai rien dit. Je m’en fous ! Je les ignore », poursuit-il.
Mais pourquoi prendre le parti de détruire sciemment les invendus ? « Vous avez vu les gens qui font les poubelles ? Lorsque vous passez derrière, il y en a partout sur le trottoir, c’est une vraie déchetterie ! », rapporte le gérant. Qui affirme que des riverains de la rue Thiers sont venus le voir pour lui reprocher l’état des poubelles. « À un moment, il faut prendre des décisions : je suis dans ma rue, je veux que ça soit nickel », assène-t-il.
Le gérant dit redouter un procès pour consommation de produit périmé
La crainte du gérant ? « Si un produit périmé est dans ma poubelle, qu’ils le mangent et tombent malades, ils peuvent m’attaquer ! », estime-t-il, peu impressionné au demeurant par la loi contre le gaspillage alimentaire. Une loi « pondue par des gens qui ne comprennent rien à la vie ». Et ce dernier d’insister : « La marchandise, elle m’appartient. J’en fais ce que je veux. Si je veux la donner à untel, je la donne, si je n’en ai pas envie, je ne la donne pas ! »
Que dit donc la loi en date du 11 février 2016 ? Elle interdit de rendre des consommables impropres à la consommation, sous peine d’une amende de 3 750 euros, mais n’oblige pas pour autant un commerçant à permettre la récupération des aliments directement dans ses poubelles. En cas de donation, la loi impose même aux surfaces de vente de plus de 400 mètres carrés* un conventionnement entre le distributeur et une association caritative.
Florent Mathieu
* Soit environ la surface du Franprix rue Thiers, que le gérant estime entre « 390 et 410 mètres carrés ».