FOCUS – La mobilisation s’intensifie pour le personnel du bassin isérois. Des professeurs de l’Isère, de la Drôme et de la Haute Savoie ont ainsi tenu une assemblée générale, ce jeudi 4 juillet au matin, devant le rectorat. Objectif : décider de la suite du mouvement. Un moment charnière pour les grévistes qui, pour beaucoup, ont boycotté les jurys du baccalauréat devant se tenir ce matin.
Voilà plusieurs semaines, qu’une partie du personnel enseignant se mobilise contre la loi de « l’école de la confiance » (dite loi Blanquer). Après plusieurs manifestations, grèves de surveillance des épreuves et, cette semaine, la rétention des notes du bac, les professeurs ne comptent pas s’arrêter là.
Ils se sont réunis en assemblée générale ce jeudi matin. En jeu ? Faire le point sur le déroulement des jurys du baccalauréat et décider quand ils remettront leurs copies corrigées.
Une quarantaine de professeurs se sont par ailleurs rassemblés ce matin au collège Lucie Aubrac (quartier Arlequin) afin de protester contre la réforme… et convaincre leurs collègues de se mettre en grève. Une action en partie facilitée par une annonce du rectorat.
En l’occurrence, tous les professeurs qui ne corrigeraient pas dans le temps imparti leurs 45 copies seraient considérés comme grévistes. Conséquence ? De nombreux enseignants ont rejoint leurs camarades en grève. Dans le collège des Saules, l’intégralité du personnel se serait ainsi mobilisé.
40 000 notes retenues dans l’académie
Les correcteurs du bac auraient donc dû remettre les copies corrigées et notées ce mardi. C’était sans compter sur une mobilisation insolite de la part des personnels enseignants de toute la France. Afin de montrer leur opposition à la réforme Blanquer, plusieurs centaines de correcteurs ont refusé de transmettre notes et copies. Dans l’académie de Grenoble, ce seraient plus de 40 000 notes qui n’auraient pas été présentées aux jurys ce matin. Pour les professeurs mobilisés, c’est une « solidarité des jurys qui se manifeste ».
Malgré le boycott, les grévistes se sont tout de même rendus devant les centres pour demander à leurs collègues de ne pas participer aux jurys tant que l’intégralité des notes n’a pas été remise. Chacun à leur tour, ils ont donné leur bilan.
Beaucoup de jurys ont dû être annulés et reportés. De fait, il manquait parfois jusqu’à un tiers des notes. Et de nombreux membres des jurys ont suivi le mouvement des grévistes.
Toutefois, la validation des résultats ne nécessite que l’aval du président du jury, qui est toujours un professeur d’université. Des présidents de jury ont, eux aussi, refusé d’enregistrer les résultats à cause des notes manquantes. Mais pas tous. Certains jurys ont donc été maintenus et des résultats enregistrés… au grand dam des professeurs mobilisés.
Des notes du bac remplacées par les moyennes de contrôle continu
En effet, en réponse à l’absence de notes, le rectorat a ordonné au personnel présent de remplacer les résultats manquants par les moyennes obtenues par les élèves au cours de l’année.
Une mesure inédite et « inégalitaire » pour les professeurs puisque les lycéens ne seront pas tous jugés sur les mêmes épreuves. Plus qu’inégale, cette solution temporaire pourrait être illégale selon le Code de l’Éducation qui stipule l’équité des résultats.
Les conséquences de ces discordances inquiètent professeurs et parents d’élèves quant à la publication des résultats qui doit avoir lieu demain matin.
Si Jean-Michel Blanquer suit ce qu’il a annoncé, des milliers de lycéens pourraient avoir des résultats faussés… et être convoqués aux rattrapages sans savoir s’ils le méritent réellement.
Une remise des copies collective demain dans la journée
À l’issue de l’assemblée générale, les dispositions de remise des copies ont été décidées. Dans la matinée, les professeurs se rendront dans leurs lycées afin de discuter avec élèves et parents et de leur expliquer les raisons de leur mobilisation.
Copies à la main, ils se rendront ensuite au rectorat aux alentours de 11 heures et espèrent alerter l’opinion publique sur les « mensonges » du ministre de l’Éducation. « Il ira jusqu’au bout dans son rôle de Pinocchio (…) Il veut faire un coup de com car ce ne seront pas des notes définitives », s’écrie un professeur du lycée Aristide-Bergès de Seyssinet-Pariset.
Pour finir, ils iront rendre tous ensemble leurs copies dans les centres d’examens, aux alentours de 14 heures. Un moyen pour eux de faire entendre leurs revendications sans trop retarder la publication des véritables résultats.
En tout cas, la rentrée scolaire s’annonce chaude. D’autant plus que plusieurs classes vont être supprimées et des départs en retraite non remplacés. Pour les grévistes, « ce n’est que le début (…) On remonte tous à la bataille en septembre ». Un “tous” qui comprend parents d’élèves, étudiants, lycéens mais aussi gilets jaunes dont quelques-uns étaient présents pour soutenir le personnel enseignant.
Nina Soudre