FOCUS – Remontés contre le projet de loi « pour une école de la confiance » et l’interdiction des sorties scolaires aux femmes voilées, des parents d’élèves du groupe scolaire Léon-Jouhaux – fréquenté par 400 élèves – ont organisé un « blocage » le mercredi 12 juin et une action symbolique de die-in le lendemain. Espérant calmer la fronde, le député de l’Isère (LREM) Olivier Véran leur propose de les rencontrer ce vendredi 14 juin.
Des parents du groupe scolaire Léon-Jouhaux, situé dans le quartier Bajatière, non loin de Teisseire, à Grenoble, sont très remontés contre le projet de loi « pour une école de la confiance ».
Leur courroux est tel qu’ils ont appelé au « blocage » de leur établissement, ce mercredi 12 juin au matin. Un terme du reste pas approprié car les enseignants ont pu faire classe normalement.
L’opération a toutefois été couronnée de succès, selon les parents organisateurs de la mobilisation. Ces derniers affirment ainsi que 90 % des familles ont suivi le mouvement. Profitant de cette dynamique, les parents d’élèves présents le mercredi matin, ont décidé, à main levée, d’un die-in (action simulant la mort) pour le lendemain.
Ce jeudi matin, vingt-cinq parents se sont ainsi allongés ou assis sur la place de l’amitié, devant l’école maternelle. Et d’autres actions sont à venir, dès la semaine prochaine, assurent les parents d’élèves.
Interdites de sorties scolaires, des femmes voilées affirment se sentir « humiliées »
L’étincelle qui a mis le feu aux poudres et décidé les parents à se mobiliser ? « L’introduction dans la loi par les sénateurs d’interdire aux mamans voilées d’accompagner les sorties scolaires », a rappelé mercredi matin Pierre Gos, l’un des organisateurs de la mobilisation, aux parents d’élèves.
Cet amendement apporté par les sénateurs est incompréhensible, estime Stéphanie Liabeuf, autre parent d’élève mobilisée ce mercredi : « Les trois quarts des mamans de l’école sont voilées, constate-t-elle. Cela n’a jamais posé de problème. Les mamans déléguées sont voilées. On a toujours eu un discours totalement ouvert. »
Directement concernées par la loi, bon nombre de femmes voilées ont participé ce mercredi matin à la mobilisation devant l’école Léon-Jouhaux. « Avec cette interdiction de sorties scolaires par le Sénat, on se sent humiliées. Les autres parents n’ont jamais été choqués par notre voile, affirme Inès, en colère. Nous sommes d’une aide non négligeable lors des sorties d’école. Les maîtresses nous remercient », souligne-t-elle.
Soraya déplore, pour sa part, que l” « on s’en prenne encore au voile. On ne fait pas de prosélytisme, se défend-elle. On demande juste le respect de chacun ». Et ces mères de famille d’accuser l’État « d’agiter une nouvelle fois le voile pour détourner l’attention des vrais problèmes que présente cette loi ».
« Cette loi ne nous convient pas du tout »
Bon nombre de parents d’élèves de l’école Léon-Jouhaux se méfient beaucoup du projet de loi pour l’école de la confiance. Ils lui reprochent ainsi d’être porteur d’inégalités entre les écoles et de ne pas permettre une prise en charge de qualité des enfants handicapés. Mais aussi de s’en prendre aux plus précaires avec la « possible retenue sur les allocations familiales pour lutter contre l’absentéisme scolaire ».
Les opposants à la loi jugent par ailleurs que les enseignants ont beaucoup à perdre avec celle-ci. Bref, « cette loi ne nous convient pas du tout ! », résume Pierre Gos.
Fabien Malbet, adjoint au patrimoine scolaire de la Ville de Grenoble, est venu leur apporter son soutien ce mercredi matin et rappeler son opposition au projet de loi. Notamment sur la mesure qui obligerait les communes à financer les écoles privées.
L’adjoint a par ailleurs assuré aux parents partager bon nombre de leurs inquiétudes. Fabien Malbet a ainsi pris la défense des mères voilées désireuses de participer aux sorties scolaires. « Quand on est parents d’élève, on est tous égaux ! », a lancé l’adjoint, pour qui « le devoir de neutralité concerne les agents de l’État uniquement ».
Interpellé par les parents d’élèves parmi d’autres élus, le député de l’Isère LREM Olivier Véran leur a quant à lui proposé une rencontre ce vendredi matin… L’objet de la rencontre ? Les « rassurer », aurait répondu la collaboratrice du député.
Séverine Cattiaux