FIL INFO – Le conseil des Prud’hommes de Grenoble a, le 18 janvier, dans une décision rendue après le licenciement abusif d’un ouvrier, invalidé le plafonnement des indemnités de licenciement. Après Troyes, Amiens et Lyon, la juridiction grenobloise remet en cause, notamment sur la base du droit international, la mesure clé de la réforme du code du travail du gouvernement Macron.
Après Troyes, Amiens et Lyon, c’est au tour du conseil des Prud’hommes de Grenoble de faire un pied de nez au plafonnement des indemnités de licenciement. La mesure, décidée par le gouvernement d’Emmanuel Macron, est entrée en vigueur en septembre 2017 dans le cadre des ordonnances réformant le code du travail.
Dans une décision rendue le 18 janvier dernier, la juridiction grenobloise a, à son tour, invalidé les nouveaux barèmes de dommages et intérêts prévus pour les salariés dans le cadre d’un licenciement abusif. Elle a ainsi accordé 3 500 euros de dommages et intérêts pour « licenciement sans cause réelle et sérieuse » à un ouvrier embauché en CDI et licencié économique en avril dernier. Ce « sans qu’aucune procédure attachée à un licenciement ne soit respectée », précisent les juges,
Si les magistrats avaient suivi la règle du plafonnement, et compte tenu de son ancienneté – un an –, l’ouvrier aurait pu prétendre à un maximum de 2 960 euros. « Un tel barème n’est pas adapté », a convenu le conseil des Prud’hommes.
Les juges grenoblois estiment que cette mesure clé de la réforme du code du travail est contraire au droit international. Et viole notamment l’article 24 de la Charte sociale européenne. Qui souligne « le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée ».
Une mesure qui empiète sur le pouvoir d’appréciation des juges
La mesure va aussi à l’encontre du comité européen des droits sociaux. Lequel précise que « les mécanismes d’indemnisation sont réputés appropriés lorsqu’ils prévoient des indemnités d’un montant suffisamment élevé pour dissuader l’employeur et pour compenser le préjudice subi par la victime ».
Mais elle va également à l’encontre de la convention de l’Organisation internationale du travail (OIT) sur le licenciement. Laquelle stipule que si les tribunaux « arrivent à la conclusion que le licenciement est injustifié […], ils devront être habilités à ordonner le versement d’une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée ».
Dans sa décision, le conseil des Prud’hommes de Grenoble enfonce le clou. « Le droit au procès équitable n’est plus garanti lorsque le pouvoir du juge se retrouve ainsi drastiquement limité », souligne-t-il.
« En effet, le barème en vigueur ne permet assurément pas au juge de moduler l’appréciation des préjudices du salarié en fonction de différents paramètres de sa situation lorsqu’il existe si peu de marge laissée entre le plancher et le plafond (pour une ancienneté de deux ans le plancher est de trois mois et le plafond de 3,5 mois et pour une ancienneté de trois ans, le plancher est de trois mois et le plafond de quatre…). »
PC