FOCUS – Temps fort de la saison estivale, le Cabaret frappé, festival musical du centre-ville de Grenoble 100 % gratuit se déroule du 16 au 21 juillet au Jardin de ville. L’événement, qui souffle cette année ses vingt bougies, s’apprête à accueillir durant six jours sur ses deux scènes des artistes internationaux, nationaux et locaux. 21 concerts agrémentés de nombreuses animations et de quelques surprises.
C’est devenu un rite, pour tous ceux qui ne sont pas en vacances en ce mois de juillet : se retrouver en fin de journée et entre amis autour d’une bière sous les frondaisons du Jardin de ville, dans le cadre festif du Cabaret frappé. Temps fort de la saison estivale grenobloise, ce festival organisé par la Ville de Grenoble fête ses vingt ans cette année.
Du 16 au 21 juillet, se tiennent pas moins de 21 concerts. Une programmation « riche, soignée et plurielle », agrégeant toutes les esthétiques, et agrémenté de nombreuses animations. Un événement totalement gratuit pour un budget dans les clous de celui de l’année derniere avec un peu plus 3’40 000 euros, tout compris.
« Le Cabaret frappé, plus que des concerts, ce sont des soirées de découverte et de surprises, une aventure ! », n’hésite pas à vanter l’organisation. Qui rappelle l’image d’un festival « dénicheur de talents » impulsée au fil des ans par les découvertes et le flair artistique de Loran Stahl, responsable de la programmation depuis quinze ans.
Scénographie revisitée, diffusion en direct et parité
Pour cette 20e édition, la scénographie des lieux a été repensée, revisitée. Notamment l’emplacement de la petite scène réservée aux concerts des groupes issus de la scène locale. De quoi augmenter sa visibilité, en particulier depuis le kiosque abritant la buvette, et améliorer la fluidité de la circulation du public dans l’enceinte du Jardin de ville.
Toujours au chapitre des perfectionnements, l’éventualité d’un concert ou de séquences en direct des coulisses (streaming) ne relèverait pas du fantasme… Mais pas d’emballement car « pour l’heure, rien n’est encore calé », nous a‑t-on laissé entendre. Ne serait-ce pas là l’une des surprises mystérieusement promises par l’organisation lors de la présentation du festival ?
Autre amélioration, et de taille : plus de parité dans les concerts proposés au public. « Aujourd’hui, dans la production musicale, il n’y a pas de parité, il y a plus de projets masculins que féminins », explique Loran Stahl.
« Nous, nous avons fait un effort pour inclure des projets féminins le plus souvent possible et même avoir carrément une soirée féminine pour une mise en avant des fortes personnalités qui évoluent en ce moment dans le monde de la musique et du spectacle vivant. »
Ce sera notamment le cas de la soirée du 20 juillet, au cours de laquelle se produiront Flèche love, « une femme libre qui refuse les étiquettes », et Sandra Nkaké qui, elle, arrive avec un nouveau projet « entre Madonna et Björk », précise Loran Stahl. Sur les six journées que dure le Cabaret frappé, deux seulement seront exclusivement masculines. De quoi poser les premiers jalons d’une entière parité. « J’espère que les prochaines éditions continueront à aller dans ce sens », nous confie, prudent, Loran Stahl.
Clins d’œil et surprises pour les 20 ans du Cabaret frappé
L’organisation a tenu à marquer le coup pour le 20e anniversaire de l’événement musical phare de l’été grenoblois. Notamment en invitant certains artistes qui se sont produits par le passé au Cabaret frappé. Tels Seun Kuti, le fils de la légende de l’afrobeat, le Nigérian Fela Kuti avec le groupe de son père Egypt 80. Ou bien encore l’auteur, compositeur, interprète H‑Burns, « le plus américain des Français », qui vient là donner son seul concert de l’année avec, comme cadeau d’anniversaire, une partie des titres de son nouvel album, Kid we own the summer.
Sans oublier Sandra Nkaké – nommée pour les Victoires du jazz 2018 dans la catégorie voix – ou encore Gnawa diffusion, « groupe mythique du bassin grenoblois » qui s’est produit une première fois au Cabaret frappé pour ses dix ans. Cette longévité remarquable fera d’ailleurs l’objet d’une exposition photographique, une rétrospective qui retrace les vingt éditions passées, de manière parfois insolite nous assure-t-on.
La scène locale à l’honneur
Mis à part ces marqueurs commémoratifs, l’édition 2018 ne dérogera pas à tout ce qui a fait le succès des précédentes éditions, avec son lot de découvertes, d’expériences, d’artistes émergents et, aussi et toujours, son regard sur la scène locale et régionale. « Un réservoir de talents » en l’occurrence avec, cette année, sept groupes issus de la scène locale et régionale – sur les 21 programmés – dont trois se produiront sur la grande scène.
Ce qui n’est pas sans risque pour des groupes en voie de professionnalisation. Mais Loran Stahl se veut rassurant : s’ils sont sur la grande scène, c’est qu’ils sont en capacité de s’y produire. « On n’a pas envie de les envoyer au casse-pipe », se défend le programmateur du festival.
Ainsi pourra-t-on voir ou revoir toute la diversité des artistes locaux : deux voix, féminines et masculines, duo grenoblois Poupard, l’ensemble violoncelle, claviers et saxophone de Pelouse, « pop-électro mélancolique » de La marine, rythmes orientaux de Arash Sarkechi… il y en aura pour tous les goûts.
La plupart des groupes programmés sur la petite scène – ou la grande – font partie de la compilation 2018 de la Cuvée grenobloise, produite chaque année par l’association Retour de scène – Dynamusic . Un partenaire du Cabaret frappé qui gère le bar circulaire situé sous le kiosque du Jardin de ville.
La petite scène accueillera aussi le spectacle des deux inventeurs poétiques et loufoques de La ligue des utopistes non alignés.
Ces derniers, à ne pas manquer, proposeront « une conférence improbable doublée d’un concert qui l’est tout autant, via un dispositif inespéré de conférence motorisée et pliable », promet l’organisation.
Kokoko ! la « grosse claque » de Kinshasa
Côté grande scène, là aussi, l’éclectisme règne en maître. Si la soirée du lundi 16 juillet est plutôt dans un esprit chanson et rock, celle du lendemain, avec notamment Gnawa diffusion, sera plus dans les courants musique métissée, fusion, chanson et électro. Le mercredi, place entre autres à Kokoko !, de la techno tout droit venue de Kinshasa en République démocratique du Congo.
« C’est vraiment ce que l’Afrique livre aujourd’hui en musique électro », se délecte d’avance Loran Stahl, qui promet « une grosse claque ». Et de poursuivre : « Ce sont des gens qui ont l’habitude de faire des concerts de six heures. Et là, on leur demande de jouer une heure et quart, ça va être compliqué de les tenir ! », anticipe-t-il.
Juste avant, Clément Bazin jouera du steel drum connecté à des machines, au cours d’un « très beau projet, très remarqué ». Le jeudi 19 juillet ce sera blues, rock et pop avec Gunwood, un trio de blues et de folk en passe de devenir une vraie révélation puisqu’ils remplissent déjà les grandes salles parisiennes. Le trio sera précédé d’H-Burns « qui livrera une pop hyper classe. Un des songwriters les plus importants de son époque », commente, non sans admiration, Loran Stahl.
La soirée du vendredi 20 juillet sera donc exclusivement féminine, avant d’en arriver à la soirée de clôture. Après la prestation de Seun Kuti et Egypt 90, elle sera animée par Mélissa Laveaux, une artiste haïtienne et canadienne qui renouvelle la chanson créole à travers des histoires et traditions de son île.
Lectures publiques, jeux du monde, sérigraphie et… budget participatif
Autour des concerts, le public grenoblois, confortablement installé dans des transats au beau milieu de la roseraie, pourra retrouver les lectures publiques organisées par les bibliothèques municipales de Grenoble.
Les enfants pourront, quant à eux, découvrir les jeux du monde, tous les jours de 17 heures à 20 heures, tandis qu’un atelier de sérigraphie vous proposera d’imprimer le visuel anniversaire de la 20e édition du Cabaret frappé sur vos t‑shirts ou sacs.
Plus original ou incongru – c’est selon – la démocratie participative sera également de la fête. Deux ateliers autour du budget participatif se dérouleront ainsi les mardi 17 et vendredi 20 juillet en présence des porteurs de projets.
De quoi rendre lyrique Éric Piolle, le maire de Grenoble. « L’été est là et, avec lui, arrive le plaisir de partager cet événement de qualité, reconnu et attendu […] Qu’il soit riche comme chaque année en rencontres et en émotions, à l’écoute des bruissements du monde ! »
Joël Kermabon
Divercities, en préouverture du Cabaret frappé
En soirée de préouverture, la grande scène du festival accueille les 7e rencontres musicales internationales Divercities. Après dix jours de résidence à La Bobine, de jeunes artistes venus de dix villes partenaires de Grenoble et un groupe grenoblois présenteront un concert unique le 15 juillet au Jardin de ville… À savoir le jour de la finale de la Coupe du monde de football.
Pas d’inquiétude toutefois pour les amateurs du ballon rond : « La finale se déroule à partir de 17 heures tandis que le concert débutera à 21 heures », rassure Olivier Bertrand, le conseiller municipal délégué à l’animation et aux événements festifs. Reste à savoir si ce sera un concert de consolation ou de célébration…