FOCUS – Le mouvement de grève entamé le 13 décembre par 34 des 55 salariés de la MC2 a été levé, mercredi 20 décembre, au terme d’une ultime journée de négociations. Un accord a été signé avec la direction, répondant aux trois revendications principales des grévistes : sanctuarisation des accords internes d’entreprise, pérennisation de l’emploi et de la masse salariale et refus de la dégradation des conditions de travail. Annulés depuis une semaine, les spectacles ont ainsi repris mercredi soir.
Il aura fallu une dernière session marathon de négociations, une nouvelle nuit blanche et des litres de café avalés. « Les négociations de mardi 19 se sont déroulées de 10 heures à 13 heures, ont repris à 14 h 30 jusqu’au lendemain matin 6 h 30, puis de nouveau à 13 h 15 le même jour », raconte Nejib Maaroufi, délégué syndical SYNPTAC-CGT (Syndicat national des professionnels du théâtre et des activités culturelles).
Finalement, mercredi 20 décembre en début de soirée, au terme d’une journée et demie quasi ininterrompue de pourparlers s’ajoutant aux négociations des jours précédents, un accord a enfin été conclu entre la direction et la délégation de salariés grévistes de la MC2.
La signature de ce texte a mis fin à la grève entamée une semaine plus tôt par 34 des 55 salariés de l’établissement. Ces derniers avaient ainsi débrayé mercredi 13 décembre, puis reconduit chaque jour le mouvement, entraînant l’annulation des différents spectacles programmés à la Maison de la culture.
Engagements fermes de la direction
À l’origine de la grogne, la situation financière « fragile » de la MC2, pointée fin 2016 par un rapport de la Cour régionale des comptes, avec un déficit estimé à 432 000 euros, pour un budget global de 10 millions d’euros.
Un chiffre inquiétant puisqu’un déficit dépassant les 6 % du budget pouvait justifier un plan social. Les élus du personnel avaient donc décidé d’exercer leur droit d’alerte économique à l’issue d’un comité d’entreprise extraordinaire tenu le 13 décembre.
Ces mauvais résultats financiers n’étaient toutefois pas le seul grief des salariés, qui dénonçaient également les méthodes de management de la direction et la dégradation du dialogue social et des conditions de travail, notamment depuis l’arrivée à la tête de la MC2 de Jean-Paul Angot, fin 2012.
Les grévistes avançaient donc trois revendications principales : la sanctuarisation des accords internes d’entreprise (pouvant être dénoncés par l’une des deux parties avec la nouvelle loi Travail), la pérennisation de l’emploi et de la masse salariale et le refus de la dégradation des conditions de travail.
Trois points satisfaits par la signature du protocole d’accord du 20 décembre, comme le précise Nejib Maaroufi : « La direction s’engage à ne pas dénoncer les accords d’entreprise signés le 15 novembre 2005, pour une durée de deux ans à compter de ce jour, et à maintenir le volume d’emploi et la masse salariale des permanents pendant une durée de trois ans. »
Finalisation des fiches de postes, réclamées de longue date par les salariés
« Les parties se sont entendues pour faire évoluer l’accord actuel, notamment sur la représentation du personnel au conseil d’administration », ajoute le délégué syndical, qui évoque également, entre autres avancées, la « mise en place de dispositions spécifiques applicables aux salariés en tournée » ou la « rédaction des modalités de gestion et d’utilisation du compte épargne-temps ». Des évolutions qui devraient faire l’objet « d’avenants à l’accord d’entreprise dans les prochains jours ».
Les grévistes ont aussi été entendus sur la réorganisation de l’organigramme et de la communication interne ainsi que sur la finalisation des fiches de postes, réclamées de longue date par les salariés, qui déploraient le « flou total » induit par leur absence.
Enfin, concernant la situation financière précaire de l’établissement, la délégation syndicale lance un appel aux autorités de tutelle (Ville, Métropole, Département, Région, État) afin « d’aider la MC2 à résorber le déficit cumulé et lui permettre de cesser de vivre dans un état d’équilibre budgétaire instable ».
La fin de « l’absence de dialogue social » ?
Mais au-delà des avancées concrètes, ces négociations comportaient également un enjeu moins visible mais sans doute plus difficile à résoudre : rétablir le lien en apparence rompu entre la direction et les salariés.
Pas une mince affaire à en croire les mots parfois très durs employés par certains grévistes, notamment à l’encontre de Jean-Paul Angot.
Plusieurs salariés interrogés en fin de semaine dernière dénonçaient ainsi « l’absence de dialogue social » depuis l’arrivée de la nouvelle direction, pointant la vague de départs record (dix en deux ans) à la MC2 et les nombreux cas de dépression, burn-out et surmenage. Certains craignaient même d’avoir atteint un « point de non-retour ».
Une « confiance retrouvée » entre la direction et les salariés
Les longues heures de discussion ont-elles suffi pour aplanir ces différends ? Difficile d’être catégorique aussi vite. « Il faudra voir à l’usage, pour l’instant on est satisfaits mais on reste vigilants », affirme une salariée. Un pas dans la bonne direction a en tout cas été franchi, comme l’atteste le vocabulaire commun utilisé par les deux parties.
Nejib Maaroufi parle ainsi d’une « confiance mutuelle retrouvée », expression reprise mot pour mot par la direction, dans un communiqué diffusé ce vendredi : « Cet accord à l’esprit responsable traduit la confiance retrouvée entre direction et salariés qui ont réaffirmé leur soutien au directeur de la MC2, pour conduire la mise en œuvre du projet d’entreprise. »
Et Jean-Paul Angot d’ajouter dans ce communiqué : « Cette semaine de négociation entre les parties prenantes a permis de mettre en évidence l’inquiétude partagée par une grande partie des salariés. La direction de la MC2 en a pris la mesure et s’est toujours attachée, dans le courant de cette semaine, à maintenir les possibilités du dialogue. Elle a trouvé dans cette négociation, des partenaires soucieux de l’intérêt général qui ont constamment veillé à privilégier un débat serein, constructif et approfondi. »
Si chacune des deux parties joue la carte de l’apaisement, les salariés, parfois échaudés par les relations conflictuelles de ces dernières années, mêlent cependant la prudence à l’optimisme. Une posture que résume Nejib Maaroufi : « Nous souhaitons que cette confiance retrouvée perdure. Mais nous restons en éveil. » En attendant, les spectacles, annulés depuis une semaine, ont pu reprendre normalement dès mercredi soir.
Manuel Pavard