DÉCRYPTAGE - Pourquoi un logement social est-il plus cher à Grenoble quand il est payé en argent liquide ? Les frais de gestion imputés aux paiements en espèces visent-ils à lutter contre le blanchiment de l'argent sale ? Les déclarations d'Eric Piolle, maire de Grenoble et président d'Actis, lors d'une réunion publique ont en tout cas semé le trouble.
La Ville de Grenoble majore-t-elle les loyers des HLM payés en liquide sous couvert de lutte contre l'argent sale ?
L'affirmation, extraite d'une réunion tenue le 16 novembre dernier à la chambre de commerce et d'industrie de l'Isère et prétendument sortie de la bouche d'Eric Piolle, a en tout cas mis en ébullition Alain Carignon.
Les loyers payés en liquide majorés ?
Contexte aidant et municipales en vue, l'ex-maire de Grenoble n'hésite pas à agiter deux fois plutôt qu'une le chiffon rouge d'une ville à la dérive. Le candidat malheureux à la primaire de la droite en 2013 a même annoncé dans un communiqué avoir saisi le procureur de la République de Grenoble à ce sujet.
Sans surprise, il n'a pas manqué de rebondir sur l'article de L'Obs « Deal sur la ville », lequel affirmait un peu rapidement dans son édition du 30 novembre 2017 que « pour tenter d’endiguer cette pratique, la mairie major[ait] désormais les loyers payés en cash ». L'ex-ministre est ainsi allé jusqu'à affirmer : « Eric Piolle confirme qu'Actis perçoit l'argent sale ».
Des propos que plusieurs personnes qui assistaient à la réunion tout comme le principal concerné démentent, en tout cas dans la manière dont ils ont été relayés. Sans parler de la façon dont certains s'en sont emparés, « à la sauce Carignon », commente le maire de Grenoble.
Si Eric Piolle nous confirme bien avoir évoqué ces paiements en liquide, non sans se demander s'il s'agissait, derrière, d'argent sale issu notamment du trafic de stupéfiants, ladite “majoration” de loyers emprunte en fait d'autres voies.
Car la mesure n'est pas plus édictée par la Ville de Grenoble que par le bailleur social Actis. Et pour cause, majorer un loyer pour d'autres motifs que des retards de paiement est tout simplement illégal. Qui plus est, les pénalités de retard ne s'appliquent pas au logement social…
En fait, la majoration vient du mode de paiement et des frais de gestion générés puis facturés par La Banque postale chez qui Actis a ouvert un compte. Depuis 2014, au motif de lutter contre le recyclage de l'argent sale, il est en effet interdit de payer en liquide auprès des organismes publics et notamment des HLM, des montants supérieurs à 300 euros par jour. La solution ? Le mandat. Moyennant quelques frais supplémentaires.
Le mandat-cash vit ses derniers jours
La banque réclame ainsi un peu plus de 7 euros pour tout versement entre 200 et 500 euros, fourchette dans laquelle se situe la majorité des loyers. Que cachent ces frais de gestion ? S'agit-il d'une manière de lutter contre le blanchiment d'argent, quand bien même les sommes en jeu ne sont pas astronomiques ?
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