EN BREF – Bras de fer entre le maire de la petite commune de Saint-Just-de-Claix et le groupe industriel Lactalis. Tandis que la fromagerie l’Étoile du Vercors déverse ses eaux usées dans l’Isère, l’édile refuse d’accorder un permis pour construire une station d’épuration, exigeant de l’entreprise qu’elle se raccorde au réseau public d’assainissement.
« Comment stopper la pollution de la rivière Isère à Saint-Just-de-Claix ? » Cette question, la Fédération Rhône-Alpes de protection de la nature (Frapna-Isère) se la posait déjà en 2014. En cause ? La fromagerie l’Étoile du Vercors, propriété du groupe groupe Lactalis depuis 2011, dont les effluents* « se dévers[ai]ent par milliers de m3 directement dans l’Isère ». Trois ans plus tard, rien n’a changé…
L’affaire est revenue dans les médias à la faveur d’une nouvelle demande de permis déposée par Lactalis auprès du maire de Saint-Just-de-Claix, Joël O’Baton. Depuis plusieurs années, Lactalis demande en effet l’autorisation de construire une station d’épuration autonome sur la commune qui lui permettrait de traiter ses effluents. Et l’entreprise se heurte à un refus municipal.
Le maire veut un raccordement au réseau public d’assainissement
Pour quelle raison ? « Un réseau public d’assainissement a été fait, qui arrive devant leur cour. Nous demandons à l’entreprise de se raccorder », nous répond Joël O’Baton. Qui ajoute que, dès l’an 2000 et donc avant le rachat de l’entreprise par Lactalis, les responsables de l’Étoile du Vercors avaient donné leur accord à ce raccordement.
Pas question pour le maire, de fait, d’accorder un permis de construire pour une station d’épuration. « Ils veulent planter une station en plein terrain agricole ! », s’agace Joël O’Baton.
L’édile « campe sur sa position », quand bien même la préfecture de l’Isère elle-même l’a mis en demeure d’accorder le permis à l’entreprise.
C’est notamment le coût de la station qui pose souci au maire : « En plus du problème de pollution, on a un problème d’argent public ». Joël O’Baton n’a, de toute évidence, pas l’intention de céder. Quand bien même, assure-t-il, Lactalis ne manque pas de pratiquer le chantage à l’emploi, l’usine employant plus d’une centaine de salariés.
Impossibilité technique, rétorque Lactalis
Côté Lactalis, l’agacement est tout autant de mise. Dans un communiqué diffusé le 2 novembre 2017, le groupe évoque des « polémiques stériles » et des « déclarations erronées dans les médias », déplorant « les nombreuses attaques et allégations regrettables et fausses du maire de Saint-Just ».
Lactalis l’affirme : sa volonté de remédier à la situation est « constante »… à condition d’obtenir un permis de construction pour une station d’épuration. Quid du raccordement au fameux réseau public ? « Le groupe Lactalis a mandaté des études qui ont montré que le raccordement à la station intercommunale n’était techniquement pas pérenne et ne pouvait recevoir le type d’effluents de la fromagerie sans pénaliser son fonctionnement », répond le communiqué.
« Il ne s’agit pas uniquement de raccorder simplement la sortie des effluents mais [il] est nécessaire de construire un bassin de prétraitement », ajoute Lactalis. Un bassin de prétraitement qui nécessitera… un permis de construire. Ce que le maire de Saint-Just-de-Claix « sait d’ailleurs très bien », considère le groupe.
Enfin, le communiqué évacue la question du coût avec autant de célérité que sa fromagerie les effluents : « Les détails techniques des investissements qui sont de 2 millions d’euros ont été largement partagés avec les services compétents de l’État. » Une situation de blocage en somme… dont l’Isère est la première à souffrir.
Florent Mathieu
- * Les eaux usées ou polluées.