FOCUS – L’Éléfàn va ouvrir ses portes le 1er septembre prochain, chemin de la Capuche à Grenoble. Cette épicerie collaborative réservée à ses adhérents-bénévoles disposera d’un local de vente de 100 m2 proposant de préférence des produits locaux ou bio à des prix accessibles. Un premier pas en attendant l’ouverture à terme d’un véritable supermarché.
C’est à la fois un aboutissement et une nouvelle étape. Après un an d’existence, l’association l’Éléfàn va ouvrir son épicerie collaborative le vendredi 1er septembre à Grenoble, au 13 chemin de la Capuche. Soit, ironiquement, tout juste derrière le magasin Intermarché du boulevard Foch.
Après un passage à Cap Berriat puis au pavillon Canopea de la Presqu’ïle, l’Éléfàn emménage dans un local de 180 m2 dont une centaine consacrée à l’espace de vente d’articles habituellement vendus en épicerie, depuis l’alimentaire jusqu’aux produits d’entretien.
Des produits bio, locaux… ou responsables
On est pourtant loin d’une épicerie classique. L’Éléfàn entend avant tout être « un lieu convivial » proposant « des produits de qualité, accessibles à tout le monde, de préférence locaux et bio », explique Olivier Bret, référent communication de l’association. « Ce n’est cependant pas une obligation : le fait que cela soit local ou bio peut créer des barrières à l’accessibilité. Mais on essaye de mettre en place un cahier des charges dans le choix des produits. »
Est-ce à dire que l’on ne trouvera pas, à l’Éléfàn, des produits mal considérés éthiquement comme le Nutella ou le Coca Cola ? L’exemple du Nutella fait sourire Olivier Bret, la marque revenant souvent dans les débats. « On est aussi dans une démarche où l’on veut laisser aux adhérents le choix d’avoir les produits qu’ils désirent. Si, demain, la majorité des adhérents dit vouloir du Nutella, nous n’aurons pas la possibilité de nous y opposer. »
Mais l’épicerie collaborative pourra, en revanche, proposer des alternatives. Le Noixtella par exemple, une pâte à tartiner créée par des producteurs de noix de Saint-Romans. Ou le Yaute Cola, un Cola bio fabriqué à l’eau des Alpes. « Tout a une alternative locale ou responsable. Il faut juste la trouver et pouvoir la proposer à un prix accessible », juge Olivier Bret.
Un commerce réservé à ses adhérents-bénévoles
La méthode pour parvenir à des prix de vente plus bas que les autres commerces, sur des produits parfois d’une qualité supérieure ? Faire appel au bénévolat. C’est l’autre particularité de l’Éléfàn, une épicerie qui « appartient à ses adhérents ». Vous ne pourrez ainsi prétendre y faire vos courses que si vous adhérez à l’association… et vous engagez à donner trois heures de votre temps par mois pour aider au roulement de la structure.
« Fonctionner essentiellement avec des bénévoles permet d’avoir des marges réduites et des prix 40 % moins chers que dans les grandes surfaces », affirme Olivier Bret. Une personne sera tout de même embauchée afin d’assurer une présence constante durant les horaires d’ouverture, « mais le but est vraiment d’avoir un minimum de salariés ».
Un mode de fonctionnement viable ? L’association s’inspire du modèle américain du Park Slope Food Coop, fondé en pleine vague hippie, en 1973, dans le quartier de Brooklyn à New-York.
Ici aussi, seuls les adhérents peuvent acheter, et chacun doit donner de son temps. Plus de quarante ans plus tard, l’établissement compte 17 000 membres et tourne à plein régime, sept jours sur sept.
L’Éléfàn n’a, pour le moment, pas cette prétention. Se basant sur l’idée qu’un éléphant « ne sait pas sauter », l’association préfère ne pas brûler les étapes et n’ouvrir l’épicerie collaborative que les vendredis et samedis dans un premier temps. Le but est d’avancer « intelligemment », affirme Olivier Bret. Y compris dans la gestion de stocks périssables, comme des fruits ou légumes. Quant à la viande, les adhérents ne la trouveront pas dans les rayons réfrigérés dès l’ouverture.
Un échec (relatif) de la campagne de crowdfunding
La prudence est d’autant plus de mise que l’Éléfàn risque fort de ne pas remplir les objectifs de sa campagne de financement participatif lancée sur la plateforme Helloasso. Sauf surprise de dernière minute, les 19 500 euros espérés ne seront pas atteints.
Pas de catastrophe non plus, toutefois : la somme obtenue dépasse les 11 000 euros, alors qu’il reste encore plus d’un mois de campagne.
« Notre campagne de financement participatif a été un peu compliquée, reconnaît Olivier Bret. On a fait le maximum, mais la période des vacances n’était pas idéale. C’est dommage parce que ça va nous obliger à réduire notre gamme des produits, mais cela ne nous empêchera pas d’en proposer d’autres par la suite. »
L’Éléfàn peut en tout cas compter sur les soutiens de Grenoble Alpes initiative active (Gaia), de la Métro et du Conseil départemental, dans le cadre du soutien à l’Économie sociale et solidaire. Sans contribuer financièrement au projet, la Ville de Grenoble a également apporté son aide en matière de conseils et de réseau.
À cela, s’ajoutent des dons de linéaires ou de meubles de caisse, et tout le travail des bénévoles pour refaire la peinture du local, un ancien garage à motos qui en avait bien besoin. Autant de bonnes volontés qui devraient permettre à l’Éléfàn d’ouvrir au premier jour de septembre, en attendant l’inauguration officielle le 6 octobre. Ainsi qu’une journée portes ouvertes le 14 octobre, « à l’occasion du lancement du Cairn ».
Un supermarché de 1 000 m2 d’ici 2020 ?
Cet emplacement n’est toutefois qu’une étape dans le projet de supermarché de l’Éléfàn. « C’est un local de transition, rappelle Olivier Bret. L’association a pour vocation d’ouvrir un vrai supermarché avec une surface de vente de 1 000 m2. Là, c’est vraiment pour commencer, c’est un peu le laboratoire de l’Éléfàn. »
Un laboratoire indispensable au demeurant pour éprouver sa méthode, mais aussi avoir le nombre suffisant d’adhérents. Ils sont actuellement 750, en comptant « beaucoup d’adhésions de soutien », précise Olivier. Ce dernier attend donc de voir combien de membres confirmeront leur volonté de donner trois heures de leur temps par mois, sachant qu’un véritable supermarché nécessiterait entre 1 300 et 1 500 adhérents.
Il n’en est pas moins optimiste quant à l’ouverture d’un supermarché collaboratif. « Si l’épicerie se passe bien, on pourrait prétendre à une ouverture pour 2020 », estime ainsi Olivier Bret. Espace restructuré quartier Berriat, écoquartier de Flaubert… les possibles emplacements sont d’ores et déjà étudiés de près. Mais le choix final reviendra encore une fois aux adhérents.