La Semaine des fiertés, c’est parti ! Lancée au soir du mardi 23 mai à l’Hôtel de ville de Grenoble, ce moment de rencontres avec la cause LGBT s’ouvre sur une tonalité assez grave. La hausse des agressions homophobes ou “l’affaire” Hanouna ont de quoi noircir les discours. Toujours unis, cependant, sous les couleurs de l’arc-en-ciel.
« Grenobloises et Grenoblois, militez, engagez-vous… mais n’oubliez pas les paillettes ! » Tel est le cri du coeur d’Emmanuel Carroz, adjoint de Grenoble à l’égalité des droits et la vie associative. Des « paillettes » pour fêter le lancement, mardi 23 mai à l’Hôtel de Ville de Grenoble, d’une nouvelle « Semaine des fiertés. »
Malgré les sourires, les rires, les applaudissements et le moment de grâce offert par la chorale LGBTIH (Lesbien, gay, bi, transgenre, intersexe et… hetero-friendly) Free-Son, c’est pourtant bien une certaine gravité qui ressort des discours. Moment-clé pour les militants de la cause LGBT, la Semaine des fiertés ne s’accompagne pas moins de tristes réalités.
Des agressions physiques, verbales… et télévisuelles
Au micro, Sophie Vilfroy et Emma, de l’association SOS Homophobie, dressent un bilan douloureux de l’année 2016. En exergue : une augmentation de 19,5 % des agressions homophobes par rapport à l’année précédente.
Ces agressions, on les retrouve au sein des cercles familiaux dans les lieux publics ou, naturellement, sur Internet. Un « déchainement de la parole homophobe », dénonce l’association, mais aussi un déchainement de violence. 124 agressions physiques ont ainsi été reportées à SOS Homophobie en 2016, dont un quart de violences intrafamiliales sur des jeunes. Sur les départements Isère, Savoie et Haute-Savoie, l’association a recueilli 31 témoignages en 2016.
« Il y a des personnes qui n’osent pas témoigner. Ce chiffre, il faut le multiplier par deux ou par trois », nous confie Sophie Vilfroy. Mais pourquoi une telle hausse ? Plusieurs facteurs entrent en jeu, nous disent les membres de l’association. Plus visible, SOS Homophobie recevrait plus de témoignages qu’auparavant. Mais Sophie Vilfroy évoque surtout « une homophobie banalisée au sein de la société, dans les médias… ou chez les politiques, dont le silence est assourdissant. »
Les médias et… Cyril Hanouna ? La polémique entourant le “sketch” de l’animateur, dans lequel il piège via une fausse annonce des homosexuels, est dans tous les esprits. Mais jamais le nom du présentateur de Touche pas à mon poste ne sera mentionné. « Un crétin homophobe qui s’ignore », se contentera de dire Emmanuel Carroz. « On banalise les moqueries, on banalise la violence : simples prétextes à divertissement, elles deviennent légitimes pour le téléspectateur », ajoute l’adjoint à l’égalité des droits.
Une soirée et une semaine de revendications
La soirée de lancement de la Semaine des fiertés est également un moment de revendications. Coordinateur de la Marche des fiertés, Léo Gatellier n’oublie pas de les citer : ouverture de la PMA (Procréation médicalement assistée) pour les couples de lesbiennes, ouverture au droit du don du sang aux personnes gays, ou encore « simplification des procédures judiciaires, médicales, économiques et sociales de changement d’état civil pour les personnes transsexuelles. »
Des revendications qui seront portées durant le programme de la Semaine des fiertés. Échanges avec des associations (Rita ou Grrrnoble Bears association), apéritifs et pique-niques, projection de films ou conférences… Les occasions d’aller à la rencontre du monde LGBT sont aussi nombreuses que variées. Mais le point d’orgue de la semaine demeure sans nul doute la Marche des fiertés, qui se tiendra le samedi 3 juin à partir de 14 heures 30 au Jardin de ville.
« Nous avons pu maintenir la Marche et c’est une grande joie, même si cette année nous avons des conditions de sécurité un peu plus difficiles, vu le contexte », se réjouit Emmanuel Carroz. Qui veut croire aux revendications portées par les militants LGBT, dont il a lui-même fait partie.
« Avoir l’état civil qui correspond à son identité de genre »
L’une des préoccupations de l’adjoint à la Ville de Grenoble ? La question du changement d’état civil. « Il faut que les lois changent, qu’elles soient inclusives, que personne ne sente au bord de la route. Le changement d’état civil peut se faire mais c’est un parcours du combattant. On doit avoir l’état civil qui correspond à son identité de genre, cela devrait être facile d’en changer. Et pourquoi pas en mairie ? »
Malgré le ton parfois grave de la soirée, Emmanuel Carroz refuse la maussaderie. « L’une des forces des militants LGBT, c’est de savoir militer dans les paillettes et dans les bulles. La Marche est un moment militant mais un moment de joie. J’en parle en tant qu’homosexuel moi-même : il n’est pas honteux d’être homosexuel ce n’est pas grave. Nous sommes juste comme tout le monde ! »
En attendant une société où l’homosexualité sera acceptée et “normalisée”, et dans laquelle les homosexuels n’auront ni à avoir honte, ni à être fiers, de leur identité ? Emmanuel Carroz acquiesce. Avant d’ajouter : « Mais on aura toujours un côté paillettes ! »