FOCUS – L’Association des commerçants Championnet – Lakanal et l’Union de quartier Championnet tiennent à faire entendre leur voix, collective et concertée, dans le cadre du projet Cœurs de ville, cœur de Métropole. Une manière pour le quartier de faire valoir son caractère de « village ». La Métro semble avoir entendu le message…
« Notre projet est collectif, réfléchi par des gens qui vivent et habitent dans le quartier. » Nicolas Trouillon, président de l’Association des commerçants Championnet – Lakanal, ne cherche pas à s’opposer radicalement au plan Cœurs de Ville, cœur de Métropole proposé par la Métro. Mais il souhaite très clairement faire entendre sa voix, secondé en cela par Guy Waltisperger, président de l’Union de quartier Championnet.
L’un de leurs griefs ? La volonté de la Métro de piétonniser le secteur. « On ne veut pas passer au tout piéton d’une manière trop rapide ou radicale, explique Nicolas Trouillon. Ce que l’on demande, c’est quelque chose d’évolutif, que les commerçants puissent avoir une idée de ce que peut être une fréquentation piétonne plus importante. Et si, dans deux ou trois ans, tout le monde demande du piéton, on ne pourra pas leur refuser ! Mais cela permet de ne pas provoquer une rupture dans le circuit commercial du quartier. »
Et Nicolas Trouillon d’insister : « Dans tout cela, c’est commerçants ET habitants. Ce n’est pas : les commerçants veulent de la voiture, les habitants veulent du piéton et on ne les écoute pas. Les habitants ont tout de même envie de pouvoir accéder à chez eux. Si on ne veut que du piéton, on peut habiter dans les vieilles rues en ville. »
Des trottoirs plus larges et végétalisés
L’Union des commerçants et l’Union de quartier ont ainsi demandé à un cabinet d’architectes de réaliser des modèles 3D de leur projet. On y découvre une rue Lakanal dotée de trottoirs beaucoup plus larges, végétalisés, avec moins de places de parking. Et deux chicanes obligeant les voitures à rouler à faible allure, car l’idée est bel et bien de créer une « zone 20 ».
La place Championnet se verrait, pour sa part, refaire une beauté. Nicolas Trouillon explique la démarche : « On garde la tonnelle, mais il faut enlever les murs et les haies. Et on demanderait un déplacement de l’abribus sur la rue Lesdiguières, juste à une trentaine de mètres. » L’idée ? Faire place nette, et pourquoi pas proposer un kiosque qui serait géré en bonne entente par les différents commerçants du quartier.
Dernier point : améliorer le lien entre la Place Championnet et la Caserne de Bonne, qui se situe tout près. Il est vrai que le piéton passera de l’un à l’autre en empruntant des rues pour le moins austères, comme une étrange passerelle entre deux mondes, phénomène courant dans une ville aux quartiers très segmentés comme Grenoble.
Les habitants et commerçants du quartier souhaitent par exemple que la rue Doudart de Lagrée, qui relie le centre commercial de la Caserne de Bonne au quartier Championnet, soit plus accueillante et plus sûre pour les piétons, et également mieux pensée pour les personnes âgées ou à mobilité réduite.
Chœur de quartier contre Cœur de Métropole
Une chose est certaine : s’ils jugent que leur projet est, à bien des égards, compatible avec Cœurs de ville, cœur de Métropole, les représentants des commerçants et des habitants du quartier Championnet plaident la concertation et n’entendent pas se faire dicter des aménagements par des personnes extérieures, concertation métropolitaine ou pas.
« Quand on discute avec des politiques, ils nous disent que des gens à Vizille, par exemple, aimeraient bien que tout soit piéton, ici. Si des gens veulent venir faire des courses dans notre quartier, nous sommes vraiment flattés et heureux, mais de là à ce que l’avis de personnes qui habitent à trente kilomètres impacte sur la décision finale et les 5 000 habitants du quartier… »
Le village Championnet : un Marais grenoblois
« Ce que l’on fait sur Championnet, plein de quartiers en rêvent, estime Guy Waltisperger. D’avoir pu faire cette concertation entre commerçants et habitants, c’est quelque chose qui prend graine et qui est en train de pousser dans d’autres quartiers ! »
Et François Bazes, vice-président de la CCI et dirigeant de la Talemelerie, de mettre en avant le côté “village” du quartier Championnet. Un « Marais grenoblois » (en référence au quartier parisien) qui aurait favorisé ce rapprochement et cette concertation afin de proposer un projet alternatif.
Marais grenoblois, ou « Place des Bobos », ainsi que l’affirme un tag sur un mur de la place Championnet ? Les commerçants et habitants assument volontiers, et le prennent avec humour : « En général, les gens préfèrent vivre dans un quartier bobo que dans une cité. Et puis, ça vaut mieux que Place des Connards ! »
De son côté, Christophe Ferrari, président de la Métro, indique dans un communiqué avoir « pris connaissance avec intérêt de la contribution » des commerçant et habitants du quartier. Elle témoigne, selon lui, « d’une volonté de croiser les regards », « viendra enrichir le bilan de la concertation qui s’est tenue du 26 septembre au 7 novembre derniers » et « sera examinée avec toute l’attention qu’elle mérite ».