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David Smétanine : « Allez savoir si je n’i­rai pas cher­cher une médaille à Tokyo en 2020 ! »

David Smétanine : « Allez savoir si je n’i­rai pas cher­cher une médaille à Tokyo en 2020 ! »

ENTRETIEN – Il y a quelques jours aux Jeux para­lym­piques de Rio, David Smétanine, 41 ans, décro­chait sa neu­vième médaille en quatre Olympiades dont une qua­trième consé­cu­tive, en argent, sur le 50 m nage libre caté­go­rie S4. Une fierté pour le Grenoblois, d’une lon­gé­vité impres­sion­nante au plus haut niveau… et en conflit ouvert avec la mai­rie de Grenoble.

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Le Grenoblois David Smétanine, médaillé d’argent sur 50 m nage libre caté­go­rie S4 aux Jeux para­lym­piques de Rio. © DR

Sportivement, que rete­nez-vous de vos Jeux para­lym­piques à Rio ?

Un sou­la­ge­ment, parce que c’était ma der­nière chance de gagner une médaille à Rio et qu’elle m’avait échap­pée pour un cen­tième [sur 100 m nage libre sur sa pre­mière épreuve, ndlr]. C’était dur… Le temps était bon. Je pense que c’était de la malchance.

Et puis le plai­sir à la fin des Jeux avec ce podium olym­pique, une médaille d’argent sur 50 m [50 m nage libre caté­go­rie S4 le der­nier jour, ndlr]. C’est une médaille qui a per­mis aussi à la France de remon­ter un peu au clas­se­ment, en étant 12e au final avec 28 récom­penses. On n’en avait que quatre en argent. Avec les médailles d’or [neuf au total, ndlr] obte­nues le der­nier jour, ça a per­mis de finir en fanfare.

Vous aviez de la pres­sion avant ce 50 m ?

J’avais les crocs. Un peu de pres­sion oui, mais sur­tout il fal­lait que je reste concen­tré. Je me suis dit : « Tu as fait de bonnes courses jusqu’à pré­sent [5e aussi sur le 200 m, ndlr]. Ne grille pas tes chances, sois propre, récu­père bien, fais ce qu’il faut dans la course, place toi bien, etc. Ça va se jouer dans les der­niers 5 – 10 mètres. Si tu vas au bout aussi bien que tu l’as fait sur les autres courses, tu gagne­ras ta médaille. » Il faut par­tir convaincu. Sur 50 m, il faut nager le mieux pos­sible, c’est-à-dire faire le moins de fautes possible.

Le Coréen Seon Jo Gi qui a rem­porté l’or était-il intouchable ?

Justement c’est ça qui m’a un peu attristé quand j’ai tou­ché. Je vois le plot qui s’éclaire avec deux diodes sur le côté. Je savais, du coup, que j’étais médaille d’argent. J’aurais espéré qu’une seule s’allume. Cela aurait voulu dire que j’avais l’or.

Je me retourne et je vois le chrono. J’ai eu un moment de sou­la­ge­ment, on le voit à la télé­vi­sion, j’ai eu chaud aux fesses et en même temps de la décep­tion, parce qu’il fait 39’’3 et l’année pas­sée aux Mondiaux j’ai fait 39’’6. Je pense qu’il était vrai­ment pre­nable. Après, c’est le contexte d’une finale… Peut-être aussi que si j’avais gagné cette médaille le pre­mier jour, j’aurais été plus relâ­ché sur le 50 m.

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David Smétanine a décro­ché à Rio sa neu­vième médaille lors de Jeux para­lym­piques. © DR

Le 50 m était votre meilleure chance de décro­cher un podium ?

En l’occurrence, c’était la der­nière. Je n’avais pas trop le choix mais au-delà de ça, ça été une vraie chance puisque l’histoire expli­quera après coup que je suis une qua­trième fois médaillé sur quatre Jeux sur la même dis­tance. Le 50 m m’aura par­ti­cu­liè­re­ment réussi.

Est-ce une fierté de mar­quer l’histoire ?

Je n’y pen­sais pas sur le coup mais, quand on y réflé­chit, bien sûr que je suis content d’avoir laissé mon empreinte à chaque fois sur le 50 m après chaque Olympiade [depuis Athènes en 2004, ndlr]. Et sur­tout, d’être médaillé une qua­trième fois sur quatre Jeux. Peu de spor­tifs peuvent s’en van­ter. Et en nata­tion en équipe de France, je suis le seul. Au total, j’ai décro­ché neuf médailles sur quatre Jeux.

L’émotion est-elle la même pour une neu­vième médaille olym­pique que pour la première ?

C’est dif­fé­rent. Chaque course, chaque médaille, chaque his­toire est dif­fé­rente. Surtout quand on remet les comp­teurs à zéro. Il faut par­tir en com­bat­tant à chaque fois, pas comme je l’avais fait à Londres. Je m’é­tais dit sur la finale du 100 m : « Mince ! J’ai peut-être trop observé », alors qu’il fal­lait être plus agres­sif. J’avais le meilleur temps des séries le matin, je pen­sais pou­voir gagner le titre, ou au moins faire deux[ième], et je finis médaille de bronze. C’est tou­jours un plai­sir dif­fé­rent et un sou­la­ge­ment différent.

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Davis Smétanine, tout sou­rire, lors de son retour en France. © DR

Vous aviez laissé entendre que ce serait sûre­ment vos der­niers Jeux…

C’est tou­jours la ques­tion. Je finis sur une belle note, c’est très bien comme ça. Je vais pro­fi­ter de 2017 pour me faire plai­sir et arrê­ter ma car­rière sur une belle com­pé­ti­tion, peut-être les cham­pion­nats de « France Élite » à Strasbourg. Ce sera l’occasion de faire un grand au-revoir à toute la famille spor­tive de la natation.
Je ne vais pas pour autant cou­per avec l’entraînement cette année. Je vais prendre le plai­sir de m’entraîner avec moins de pres­sion. Ça va être un entre­tien et un entraî­ne­ment cohé­rent pour arri­ver à trou­ver un bon équi­libre entre la pré­pa­ra­tion phy­sique pour une fin de car­rière agréable et avoir un cer­tain niveau pour res­ter en bonne forme. Car j’ai envie aussi de me mettre à d’autres sports, en loi­sir : le ski de fond par exemple.

Enfin, il y a une petite idée qui germe. Je me dis que si au bout de deux, trois ans, j’arrive à main­te­nir un niveau de forme phy­sique assez bon et que dans l’eau je suis bien, que j’arrive à nager cor­rec­te­ment, allez savoir si je ne m’offrirai pas un voyage au Japon pour aller cher­cher une cin­quième médaille sur le 50 m nage libre [au JO de Tokyo 2020]. On verra si cette idée pren­dra forme ou pas. J’ai appris à ne jamais dire jamais.

Propos recueillis par Laurent Genin

DES JEUX SUR FOND DE CONFLIT AVEC LA VILLE DE GRENOBLE

Si des fes­ti­vi­tés sont d’ores et déjà pré­vues aux conseils dépar­te­men­tal et régio­nal pour fêter la médaille d’argent de David Smétanine aux JO de Rio, aucune céré­mo­nie n’a pour l’heure été annon­cée par la Ville de Grenoble. Rien d’é­ton­nant alors que le spor­tif est en conflit avec la muni­ci­pa­lité concer­nant sa non titu­la­ri­sa­tion à la mairie.

En 2006, David Smétanine intègre la Ville de Grenoble en tant qu’agent contrac­tuel à plein-temps, déta­ché pour le sport grâce à une conven­tion d’in­ser­tion pro­fes­sion­nelle (CIP). Avant de deve­nir conseiller spé­cial auprès du direc­teur géné­ral des ser­vices (alors, Gilles du Chaffaut) en charge du sport, de l’image de la ville et de l’accessibilité des per­sonnes en situa­tion de handicap.

Un « licen­cie­ment non fondé » pour David Smétanine

Mairie de Grenoble

Hôtel de ville de Grenoble. © Nils Louna – pla​ce​gre​net​.fr

Cadre A de la fonc­tion publique, le cham­pion han­di­sport était, à l’en croire, sur le point d’être titu­la­risé. L’arrivée de la nou­velle muni­ci­pa­lité a changé la donne.

Celle-ci a mis fin à son contrat au 31 décembre 2014 évo­quant « un non renou­vel­le­ment » en rai­son de « capa­ci­tés pro­fes­sion­nelles insuffisantes ».

Un « licen­cie­ment non fondé » pour David Smétanine qui a déposé un recours devant le tri­bu­nal admi­nis­tra­tif en 2015.

« Ce conflit avec la Ville a été un vrai souci dans ma pré­pa­ra­tion. Psychologiquement, je n’étais pas for­cé­ment libéré. Moralement, ça a été vrai­ment dur », confie-t-il. « Il est grand temps que la Ville pense à une solu­tion qui soit accep­table. C’est quelque chose de secon­daire mais qui me pèse. Et c’est dif­fi­cile de fêter quelque chose alors que la Ville elle-même n’a pour l’instant pas prévu de fêter quoi que ce soit. »

Un « emploi de com­plai­sance » pour François Langlois, actuel DGS

Pour François Langlois, l’ac­tuel DGS de la Ville de Grenoble, ren­con­tré ce mer­credi 28 sep­tembre, le poste de David Smétanine entrait plus dans la caté­go­rie des « emplois de com­plai­sance ». « A mon arri­vée, je lui ai demandé un rap­port sur son acti­vité. Celui-ci m’a pré­senté des pro­jets d’in­ter­ven­tion qu’il avait pour la Ville et n’a pas pu prou­ver une quel­conque acti­vité passée. »

François Langlois, directeur général des services annonçant le report du conseil municipal. © Joël Kermabon - Place Gre'net

François Langlois, DGS de la Ville de Grenoble. © Joël Kermabon – Place Gre’net

Pour le DGS, pas doute, son poste avait clai­re­ment une dimen­sion poli­tique. « Il était direc­te­ment en lien avec le cabi­net et n’a­vait pas de contacts avec les ser­vices. » Ce que conteste l’in­té­ressé. Pour rap­pel, David Smétanine était conseiller régio­nal PS avant le chan­ge­ment de majo­rité et a fait par­tie de la liste de sou­tien de Michel Destot aux légis­la­tives 2012.

François Langlois se demande aussi pour­quoi David Smétanine n’a pas été titu­la­risé lors du pré­cé­dent man­dat alors que son contrat a été pro­longé 13 fois. « Il aurait dû être titu­la­risé bien avant le chan­ge­ment de majo­rité, d’au­tant plus du fait de sa situa­tion de tra­vailleur han­di­capé », affirme le DGS qui se dit « serein » et laisse la jus­tice suivre son cours.

Laurent Genin

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