TROIS QUESTIONS À - Denis Robert, journaliste d'investigation à l'origine des révélations sur l'affaire politico-financière Clearstream, a lutté de longues années pour faire reconnaître le sérieux de ses enquêtes et la véracité de ses révélations. Quel point de vue porte-t-il sur l'affaire dite des Panama Papers ? Entretien à l'occasion de son passage à Grenoble, dans le cadre d'une conférence sur « la face cachée de la finance ».
Place Gre'net - Concernant l'affaire des Panama Papers, quel regard portez-vous sur les réactions politiques et médiatiques, ainsi que sur les réponses avancées par le gouvernement ?
Denis Robert – Il y a quelque chose de nouveau, et c'est précisément l'impact médiatique de ces informations. Le fait que des journalistes de différents pays se réunissent et les sortent ainsi fait parler et je me réjouis que des gens réagissent aussi fortement. Mais je trouve que l'on découvre un peu la Lune. J'avais déjà cité toutes les sociétés panaméennes qu'utilisaient les partis politiques pour se financer dans des paradis fiscaux.
Le fait que des banques fabriquent des paravents pour leurs clients sont des informations qui ont été plusieurs fois écrites et étudiées, par moi comme par d'autres. Il est donc étonnant de voir des journalistes, mais encore plus des politiques, réagir comme s'ils découvraient que toutes les banques avaient des filiales dans les paradis fiscaux, et que Panama fabriquait des panaméennes !
Je remarque, en tout cas, que la droite est un peu taiseuse. Quant à la gauche, François Hollande a fait un beau discours au Bourget, puis a eu ensuite de maintes occasions de prouver qu'il s'attaquait à la finance. Et il n'a rien fait… Dans cette affaire, le gouvernement réagit à contretemps, et il réagit mal, sous la contrainte. On sent qu'il n'y a pas de sincérité.
Je ne suis pas devin mais ce que je remarque, pour être beaucoup sollicité en ce moment, c'est qu'il y a de l'électricité dans l'air. Les « Nuits debout » sont le dernier signe avant-coureur d'un phénomène plus profond. Et vous remarquerez qu'ils ne revendiquent rien, qu'il n'y a plus de confiance. Ce gouvernement n'est plus crédible, et le précédent était encore pire. Souvenez-vous de Nicolas Sarkozy qui disait que les paradis fiscaux étaient finis avec lui. Et les journalistes politiques l'interviewent comme si de rien n'était, alors que ce type devrait être disqualifié à jamais !
Comment jugez-vous la défense de certaines personnes mises en cause ? On peut penser notamment à l'éditeur isérois Jacques Glénat*, dont le nom a été mentionné dans ces fameux Panama Papers. Mais aussi à la ligne de contre-attaque de la Société générale**, qui se défend vertement et attaque même en justice ceux qui la mettent en cause…
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