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Birdman nouveau long métrage du mexicain Alejandro González Iñárritu avec Michael Keaton

Michael Keaton magis­tral dans Birdman

Michael Keaton magis­tral dans Birdman

BLOG CINÉMA – Nouveau long métrage du mexi­cain Alejandro González Iñárritu, Birdman c’est 1 h 59 de cinéma dans les cou­lisses d’un théâtre new-yor­kais. Michael Keaton y prend son envol, secondé d’une belle et talen­tueuse bro­chette d’ac­teurs. Tous vibrent aux secousses d’une caméra qui vire­volte en un gigan­tesque plan-séquence dont on res­sort bouleversé. 

Alejandro González Iñárritu est ins­crit au pan­théon des cinéastes mexi­cains les plus pro­met­teurs et doués de leur géné­ra­tion, aux côtés de Guillermo del Toro et Alfonso Cuaron. En 2006, il est le pre­mier réa­li­sa­teur d’o­ri­gine mexi­caine à gagner le Prix de la mise en scène au Festival de Cannes. Ses longs métrages Amours chiennes, 21 GrammesBabel et Biutiful lui valent un suc­cès mon­dial dont 12 nomi­na­tions aux Oscars. Mais le point d’orgue de sa car­rière implique son petit der­nier, Birdman, comé­die dra­ma­tique ayant rem­porté quatre sta­tuettes en 2014 : Meilleur scé­na­rio ori­gi­nal, Meilleure pho­to­gra­phie, Meilleur réa­li­sa­teur et sur­tout Meilleur film.

Birdman

Succès mérité ? Éhontée mas­ca­rade ? C’est que nous allons voir tout de suite, dans cette cri­tique du pre­mier film que je vois dans la fil­mo­gra­phie du mexi­cain à la mode.

Michael Keaton prend son envol

alter ego Birdman

Riggan Thomson (Michael Keaton) et son alter ego Birdman

Michael Keaton est Riggan Thomson, l’ac­teur qui incarna par trois fois ce super-héros aux ailes majes­tueuses que l’on nomme Birdman. Il porte sur ses épaules ce gigan­tesque plan-séquence tru­qué qui hausse le ton face au Gravity d’Alfonso Cuaron.

Ayant refusé de tour­ner Birdman 4 pour de gros et méchants stu­dios hol­ly­woo­diens, il ira jus­qu’à repous­ser les limites de son jeu d’ac­teur pour recon­qué­rir son public. Adapter la pièce Parlez-moi d’a­mour de Raymond Carver, tel est son défi. Riggan a du cran et des alliés fidèles, des acteurs à contre-emploi, si talen­tueux par­fois que l’on oublie­rait volon­tiers leur fic­ti­vité. Donc toutes les cartes en main pour réussir.

Riggan et Mike dans Birdman

Riggan et l’ac­teur Mike Shiner (Edward Norton)

Edward Norton en comé­dien casse-cou se char­gera d’i­ni­tier Riggan aux arcanes d’un acto­rat super-réa­liste ; ce même acto­rat qui manque cruel­le­ment au théâtre et, par exten­sion, au cinéma amé­ri­cain, dans lequel tout n’est que poudre aux yeux.

Il lui ensei­gnera quand jouer un rôle : dans la vie et non sur scène, ce que, lui, expé­ri­mente depuis de nom­breuses années. Dans un pre­mier temps, cette phi­lo­so­phie échap­pera à Riggan. Mais dans un souci de recon­nais­sance publique et un second temps, elle s’avérera sal­va­trice pour l’ac­teur. Déchu, divorcé, vieillis­sant, en conflit avec ses démons et sa fille (Emma Stone) fraî­che­ment sor­tie de cure, il pas­sera outre ses tor­tures inté­rieures pour mieux prendre son envol.

Riggan et Sam dans Birdman

Riggan et sa fille Sam (Emma Stone)

Birdman invoque en nous des sen­ti­ments contraires. Au cinéma, les his­pa­niques ont ce don si par­ti­cu­lier ; j’y réflé­chis­sais déjà dans ma cri­tique de Parle avec elle, réa­lisé par Pedro Almodóvar en 2001. Michael Keaton y offre, en tout cas, sa plus belle per­for­mance depuis Batman Returns de Tim Burton, pro­fi­tant d’in­car­ner un acteur has-been pour dres­ser le bilan de sa propre car­rière. À la fois drôle et d’une sin­cé­rité bou­le­ver­sante, il se livre aussi bien sur lui-même que sur son per­son­nage, ce qui n’est pas anodin.

Le choix du plan-séquence pour por­ter ce récit exal­tant n’est pas ano­din non plus. Il per­met à González Iñárritu de jon­gler avec beau­coup de sim­pli­cité entre dif­fé­rents degrés de réa­lité. Sans tran­si­tion, il passe de l’i­ma­gi­naire de Riggan au ration­nel de ses pré­oc­cu­pa­tions scé­niques. Arrivera-t-il à éra­di­quer la menace que repré­sente son double ? Sa pres­ta­tion à Broadway mar­quera-t-elle les esprits ? Il ne tient qu’à vous de le découvrir.

L’intelligence d’une mise en scène

Riggan vs. Mike dans Birdman

Riggan affronte Mike dans Birdman

À tra­vers sa mise en scène fluide et légère, González Iñárritu fait montre d’un savoir-faire hors du com­mun. Certains vous diront qu’elle empeste l’i­na­nité, la frime… Je ne les empê­che­rai pas de cra­cher leur venin. Toutefois, je vous prie de croire que, der­rière le plus long faux plan-séquence de l’his­toire du cinéma, se cache des inten­tions de réa­li­sa­tion par­fai­te­ment assumées.

N’espérez pas y trou­ver super-vilains, coups de feu ou défla­gra­tions mais plu­tôt “action ou vérité”, comme le célèbre jeu. Riggan n’est pas plus sur­hu­main que le com­mun des mor­tels et ne com­bat nul­le­ment le crime depuis le ciel. Si le fan­tas­tique fait quel­que­fois irrup­tion dans le récit, ce n’est pas tant pour nous éblouir que pour nous faire prendre conscience de cer­taines réalités.

J’ai per­son­nel­le­ment vécu Birdman comme une leçon de vie, un mes­sage d’es­poir. La démarche de Riggan a beau trou­ver son ori­gine dans l’or­gueil, elle reste belle et ins­ti­ga­trice de valeurs posi­tives : le cou­rage, la per­sé­vé­rance, la déter­mi­na­tion. Rares sont les scènes où il se voit endos­ser la peau du méchant.

Méchant, le public pour­rait l’être ou la plume du cri­tique d’art, même la célèbre jour­na­liste Tabitha Dickinson (Lindsey Duncan) pré­ten­dant qu’a­dap­ter la pièce de Carver, sor­tie en 1981, relève de l’esbroufe et non de l’ex­pres­sion artis­tique. Parlez-moi d’a­mour et non d’ad­mi­ra­tion ! Riggan confond-t-il ces deux sen­ti­ments ? À la fois pathé­tique et flam­boyant, Keaton crève l’écran.

Riggan, Jake et Lesley dans Birdman

Riggan, Jake (Zach Galifianakis) et Lesley (Naomi Watts)

Dans une entre­prise dif­fi­cile, la volonté déter­mine la réus­site. Ce n’est pas pour rien que l’a­dage clame « quand on veut, on peut ». Mais c’est sur­tout l’i­gno­rance qui donne des ailes, d’où le sous-titre du film (La sur­pre­nante vertu de L’Ignorance).

Candide, Riggan mène à bien sa quête du suc­cès en arpen­tant les rues, les cou­lisses et la scène. Il ne sait pas ce qui l’at­tend, quelle tour­nure pren­dront les évé­ne­ments mais il s’en contre­fout. Il va de l’a­vant. C’est la seule chose qui importe. Morpheus ne disait-il pas dans le film Matrix des frères Wachowski : « Il y a une dif­fé­rence entre connaître le che­min, et arpen­ter le che­min » ?

En conclu­sion, il vous faut décou­vrir Birdman et ce coûte que coûte. Vous y retrou­ve­rez un Keaton tout feu tout flamme dans un rôle à contre-emploi qui lui sied à mer­veille. Secondé par des acteurs au talent incon­tes­table, sa pres­ta­tion est subli­mée par une mise-en-scène inté­res­sante, en osmose par­faite avec les sujets de la scène et de l’ac­to­rat. Un régal. Mon coup de cœur du moment. Vous n’al­lez tout de même pas rater le plus long faux plan-séquence de l’his­toire du cinéma, si ?

Maxime Ducret

BirdmanBirdman

Un film de Alejandro González Iñárritu, avec Michael Keaton, Zach Galifianakis, Edward Norton, Emma Stone, Noami Watts, Andrea Riseborough et Amy Ryan (États-Unis)

Genre : comé­die dramatique

Durée : 1 h 59 min
Sortie en salles le 25 février 2015

Séances : cinéma Le Club, 9 bis rue du Phalanstère à Grenoble.

Tél. : 04 76 87 46 21

M. Ducret

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